Mission diplomatique à Nguelundi... et plus loin encore
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 5, 2008 at 5:09 AM
Le bruit courait parmi les cuisiniers impériaux que l’aide-diplomate Aigrepont était arrivé à cinq heures du matin pour leur demander des provisions. Le mécontentement était généralisé : on ne les avait jamais payés pour travailler à cette heure! Quel ingrat, ce Cornelius…
Il était déjà beaucoup trop loin pour entendre ces protestations. Alors qu’il franchissait la grille du palais, il regarda l’imposant bâtiment une dernière fois. Deux ans qu’il travaillait sans relâche à se faire reconnaître, deux ans qu’on ne le reconnaissait pas. Le Consul Bolton était l’ennemi public numéro un pour Cornelius. Cet arrogant personnage ne méritait assurément pas son poste. En diplomatie, il fallait un peu de chaleur, selon Cornelius. Et l’attitude d’un thuriféraire…
Il ne reverrait pas Systéria avant un an, à moins d’un miracle. Il ne voulait toutefois pas donner la satisfaction à son supérieur de revenir avant que le temps soit écoulé. Il avait préparé un échéancier très strict. Il était évident dans son esprit qu’il n’irait pas croupir un an à Nguelundi. Ce pays était trop peu important pour ça. Non… il voyagerait pendant ce temps. C’était presque un coup du destin, la chance qui lui souriait. Il pourrait aller voir ce qui se tramait partout sur Enrya et le savoir bien avant son supérieur et cela lui donnait une satisfaction énorme.
Il ne se retourna plus sur le chemin du port, s’y dirigeant d’un pas décidé. Le Funeste, son navire (quel nom bien choisi… Cornelius était sûr que le Consul y avait porté une attention toute particulière), arborait déjà le drapeau systérien avec fierté. Les bagages de l’aide-diplomate étaient étonnamment volumineux : un sac entier de vêtements soigneusement pliés, un coffre de parchemins et d’encre (il ne voulait pas en manquer), un autre coffre contenant des tonnes de réactifs, et enfin, ses bagages personnels, comprenant ses documents d’immunité diplomatique, son carnet de bord, cinq feuilles de parchemin, une plume de paon et ses habits.
Il présenta son billet au capitaine. Apparemment, il n’était pas le seul à partir. Une vieille folle qui racontait des histoires à dormir debout dans son coin, un vieux loup de mer aux plaisanteries grivoises et un Zanthérien baraqué l’accompagnaient.
La Chancelière fut la seule personne à venir lui souhaiter un bon voyage. Tout le monde se fichait de ce brave Cornelius. Beaucoup de gens seraient déçus de voir qu'il n'était pas si inutile qu'il en avait l'air... Bien que la Chancelière demeurât sans émotion, il était pratiquement certain que cette dernière lui vouait quand même un certain respect, voire une certaine amitié. Néanmoins, il n'avait aucun moyen de le vérifier. Il se promit de lui envoyer des missives régulièrement après qu'elle le lui eût demandé.
La grand-voile fut hissée. Les amarres furent larguées. Le bateau commença à avancer, poussé par la prodigieuse force du vent qui, heureusement, soufflait dans la bonne direction ce jour là. Cornelius n’eut pas un regard pour la ville et ses affres qu'il quittait. Le Consul la lui avait fait haïr.
Ce crétin le lui paierait un jour.
Post by Thomas Bolton, Emp - May 5, 2008 at 11:12 AM
Aux portes de la ville, on put voir le carrosse du Consul marquer un arrêt alors que Le Funeste quittait le port et hissait la grand-voile. Dans la pénombre du véhicule, l’homme fixait l’imposant navire systérien qui s’éloignait peu à peu de la cité, transportant l’aide-diplomate Aigrepont vers sa punition. Dès que le trois-mâts ne fut plus visible, Thomas donna trois petits coups secs sur une des parois et le véhicule hippomobile continua soudainement sa route.
Une punition de goût avait été offerte à Cornelius. Ce dernier ne jurait que par ses compétences alors qu’il n’était qu’une boule de nerf incapable de se contrôler. Ce genre d’individu n’est pas destiné à devenir diplomate. La perspective de passer une année entière à parcourir d’arides dunes de sable ou d’humides jungles à rencontrer des individus avec qui il serait incapable de communiquer suffirait à calmer son arrogance.
Sans compter les innombrables dangers auxquels il serait exposé. Non, ce ne serait évidemment pas facile, mais si l’expérience s’avérait enrichissante et qu’il revenait en vie, alors il aurait sans doute beaucoup appris sur lui-même. Les voyages forment la jeunesse, dit le célèbre proverbe. Les souvenirs d’une de leur dernière discussion revinrent à son esprit…
« J’ai besoin d’or pour acheter mon billet. »
« Inutile, monsieur Aigrepont. Je m’en suis chargé, vous embarquerez sur… »
Son doigt cherchait un porte-document dans l’épaisse bibliothèque où il entreposait les dossiers. Il en sortit un relié de cuir, contenant une épaisse liasse de papiers.
« Le Funeste donc. Il reste à quai encore toute une semaine, le temps de faire vos préparatifs. Voici votre billet pour l’embarquement. Cette lettre est garante de votre immunité diplomatique à Nguelundi. »
« Mais… »
L’imbécile. Il croyait vraiment que Thomas pensait que les sauvages allaient la respecter ? Encore tout à apprendre.
« Pour les officiels étrangers qui exploitent leurs ressources naturelles. »
« Ah, d’accord. »
Le Consul lui avait quand même donné de nombreux conseils, sur la façon de se vêtir. Des avertissements pour qu’il ne tombe pas dans des pièges mortels…
Le jeune sot apprendrait-il ?
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 5, 2008 at 3:22 PM
Cornelius haïssait Bolton. Il lui vouait un faux respect. Il savait que Bolton le détestait.
Bolton détestait Cornelius. Il ne lui vouait qu'un maigre respect professionnel. Il savait que Cornelius le haïssait. Du moins, c'était ce que croyait l'aide-diplomate.
Le voyage ne devait durer que quatre jours. C'était ce qui était prévu. Depuis le tout début de son épopée, Cornelius n'avait adressé la parole à personne sur le navire. La vieille folle continuait de raconter ses histoires fausses seule dans son coin et le vieux loup de mer racontait encore les mêmes blagues osées.
Quant au Zanthérien, Cornelius ne voulait même pas en entendre parler. Il lui vouait une haine certaine depuis que ce dernier l'avait bousculé pour entrer avant lui dans la cale. Quel ingrat!
Un effroyable bruit de vomi retentit alors que Cornelius était en train d'étudier les nombreux documents qu'il avait apportés avec lui. Il frissonna de dégoût. Encore un de ces imbéciles avec le mal de mer, assurément. Il regarda autour de lui et remarqua que le Zanthérien n'était plus là. Il fut alors très amusé et décida de monter sur le pont (car il était alors dans la cabine) pour pouvoir ridiculiser l'autre. Il ne s'était pas trompé: appuyé sur le bastingage, la tête au-dessus de l'eau, il était secoué de hoquets repoussants et recrachait sans cesse le même âcre liquide malodorant. Les marins ne semblaient pas s'en formaliser: ils en avaient vu d'autres.
Alors que la vigie regardait l'horizon, on put percevoir son cri puissant.
-Capitaine! Terre en vue!
Cornelius fut surpris par cette annonce. Il plissa les yeux considérablement mais ne vit qu'une mince bande sombre à l'horizon. Était-ce là Egador? Il le saurait bientôt, car le bruit courait maintenant qu'on y arriverait dans moins d'un jour.
Il redescendit dans la cale et retourna à son étude tandis que le Zanthérien continuait de purger son estomac sur le pont. À grands coups de compas, il vérifia une énième fois son itinéraire. Le prochain arrêt était la Ligue de Zanther, un pays possiblement très dangereux. Fort heureusement, ils n'accosteraient qu'à l'extrémité sud de Zanther, dans une ville côtière où Cornelius aurait tôt fait de trouver un interprète bilingue.
La grand-voile égait gonflée par le vent, qui soufflait miraculeusement dans la bonne direction. Le Funeste* poursuivait son périple vers le second pays le plus autarcique d'Egador, voire d'Enrya... Car le premier constituait la destination principale de Cornelius: Nguelundi.*
Post by Arthur le marin - May 5, 2008 at 4:59 PM
" Plus qu'une journée et je pourrais descendre…"
Trois jours qu'il était ici, depuis que la dernière vigie était morte d'une insolation et d'une déshydratation, il était bloqué à son poste, tout cela parce qu'il n'avait pas voulu nettoyer le pont avec les autres. Le dernier voyage était un voyage à destination du désert et le soleil tapait dur, il était même impossible de se balader à pieds nus sur le pont tellement il était brûlant et ce débile de capitaine lui demandait de prendre seau et brosse et de le récurer parce que monsieur avait fait couler un peu de porto sur le pont… A midi… En plein soleil…
Il avait refusé et se trouvait maintenant à 50 pieds de hauteur, regardant le balai des marins en bas après avoir annoncé l'arrivée d'une terre. Ils courraient comme des fourmis affollées, il remarqua même qu'une personne qui vomissait passait par-dessus bord. Seul à l'avoir vu, il se tint bien de le faire remarquer.. Il paierait pour les autres…
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 6, 2008 at 4:38 AM
HRP: Pour ajouter un peu d'agrément à votre lecture, j'insère des images provenant de DeviantArt. © leurs artistes respectifs. Merci à eux. En cliquant sur l'image, vous arriverez sur la page qui lui correspond sur DA.
Des poissons géants, gonflés d'air, se promenaient dans les hauteurs de cette ville Tsen sur laquelle il n'arrivait pas à mettre un nom. Ils portaient d'énormes charges: caisses, tonneaux, cargaisons de bois, tout y passait. Lentement, l'un d'entre eux fonçait sur lui, qui se tenait sur un des étroits ponts de bois qui longeait les murs des édifices environnants. Sa gueule s'ouvrait de plus en plus. Il se rapprochait. L'impact ne tarderait pas...
Soudain, le noir total. Cornelius ouvrit les yeux, en sueurs. Quel était donc cet étrange rêve? Il ne se rappelait pas d'en avoir jamais fait de semblables. Frustré de s'être fait berné par de telles pensées, qu'il croyait vraies il y a à peine cinq secondes, il bâilla longuement avant de jeter un coup d'oeil furtif vers le hublot situé derrière sa couchette.
S'il y avait une chose qu'on ne pouvait reprocher au Funeste, c'était certainement son confort. Les lits étaient espacés et moelleux à souhait, l'ambiance était feutrée et les vitres, bien récurées, ce qui permettait à ses occupants d'admirer le paysage extérieur en toute quiétude à l'intérieur de la cale. Les bruits des ronflements du vieux loup de mer, qui dormait une demi-douzaine de mètres plus loin, parvenaient jusqu'aux oreilles de l'aide-diplomate et l'agaçaient grandement. Dans un état second, encore un peu groggy, il se remémora soudain ce qui s'était passé la veille. La vigie (un marin du nom de Arthur avec lequel Cornelius n'avait aucunement fraternisé jusqu'alors) avait crié que les côtes d'Egador se profilaient à l'horizon. Dans moins de douze heures alors, ils atteindraient ces dernières.
Les heures étaient écoulées. Cornelius fut agité d'un frisson d'extase: son voyage commençait réellement ici. Après quatre jours de voyage plutôt ennuyants, il était temps de se dégourdir les jambes sur la terre ferme. Il enfila ses vêtements sans aucune pudeur, étant donné que les autres passagers dormaient encore (il était approximativement onze heures du soir), et monta sans bruit les marches qui séparaient la cale du pont. Une fois arrivé sur ce dernier, ayant refermé la porte, l'aide-diplomate regarda l'équipage s'affairer à préparer l'accostage. Le capitaine beuglait des ordres. Et déjà, on pouvait apercevoir les gens déambuler dans les rues d'une petite ville côtière Zanthérienne qui n'était désormais plus qu'à quelques mètres du bateau. On entendait même les bruits de conversation de certaines personnes.
Cornelius s'étira alors que le bateau accostait et qu'on attachait les énormes cordages au quai. Il se dirigea d'un pas décidé vers la cabine du capitaine pour s'entretenir brièvement avec lui. Les cris des matelots devenaient franchement agaçants, mais il fit un effort pour les ignorer.
-Capitaine, le Funeste doit rester ici quatre jours.
-Mais...
Voyant que l'autre allait protester, Cornelius extirpa lentement une bourse de sa besace et la mit dans la main du capitaine, puis poursuivit.
-Lorsque je serai de retour ici, dans quatre jours, vous m'emmenerai de l'autre côté du Mur.
-Mais...
Il lui donna une autre centaine d'écus d'or et tourna les talons. Il n'avait plus de temps à perdre avec cet imbécile de capitaine. Il ordonna à deux solides gaillards de l'équipage de descendre ses bagages à terre et quitta le navire avec ces derniers.
Stémacol était un petit hameau d'un millier d'habitants. Ce n'était pas pour rien que le Funeste y accostait: C'était la bourgade côtière la plus près du Mur, le prodigieux obstacle qu'avait érigé les Zanthériens pour séparer leur pays des sauvages Nguelundis. Cornelius y passerait trois jours, le temps de trouver un interprète qui parle le commun et un des dialectes Nguelundi frontaliers.
Il demanda à un vieil homme le chemin vers l'auberge la plus proche, tirant derrière lui ses lourds bagages. Heureusement, elle se trouvait non loin de là, à l'extrémité d'un quai situé un peu plus loin que l'endroit où il avait accosté.
Son nom n'était pas des plus accueillant, et par un hasard surprenant, il ressemblait beaucoup à celui du navire sur lequel il s'était rendu jusque-là: L'Étoile Funeste*. Le bâtiment n'avait absolument rien d'un astre et portait sans doute mal son nom. Il entra dans la bâtisse et s'approcha tranquillement du tenancier de l'établissement, agacé par la cacophonie qui y régnait.*
-Salutations, mon brave. J'aimerais vous prendre une chambre pour trois nuits. Tranquille, de préférence. J'ai de quoi payer.
Il fit teinter les pièces de sa bourse.
-Eh bien, d'accord. Je loue à partir de soixante-quinze écus la nuit, ce qui fait un total de deux cents vingt-cinq pièces pour le séjour en entier. Soyez le bienvenue.
-Merci de votre hospitalité. Par le plus pur des hasard, dites-moi, savez-vous si un de vos comparses de Stémacol sait parler un des dialectes Nguelundi des villages frontaliers?
L'aubergiste se renfrogna alors qu'un bruit effroyable de bouteille cassée parvenait à leurs oreilles. Nguelundi était un sujet tabou par là. Néanmoins, comme l'argent n'avait pas d'odeur, il se résigna à répondre à l'étranger moustachu.
-Vous savez, ce n'est pas pour rien que nous avons bâti un mur entre ces chiens de sauvages inférieurs et notre patrie. Avant, ils saccageaient tout sur leur passage. Enfin, je suppose que Philomène de Milanville pourrait vous aider... en échange de quelques pièces, évidemment.
Cornelius ne laissa rien paraître de sa surprise, mais elle était bien réelle. Une femme, interprète Zanthérienne? Le défi serait encore plus grand que si ç'avait été un homme, mais l'expérience serait certainement plus... enrichissante.
-Merci, mon brave. Je vais m'installer dans la chambre dont vous me donnerez la clef.
L'homme lui tendit la clef de la chambre numéro 3 (l'auberge n'en comportait qu'une dizaine) et Cornelius le paya, puis traîna ses bagages jusque dans cette dernière. Une petite fenêtre donnait sur la mer: c'était le principal attrait de l'endroit. Le lit était standard et semblait moyennement confortable. Un globe terrestre minable posé sur une table minuscule était la seule décoration de la pièce. L'aide-diplomate déposa ses affaires dans un coin de la chambre et en sortit. Il devait parler avec beaucoup de gens s'il voulait retrouver cette Philomène de Milanville.
Il aborda un groupe d'hommes à l'air mauvais qui buvaient dans un coin de la pièce mal éclairée et leur demanda s'il pouvait se joindre à eux dans un langage excessivement léché. Que voulez-vous, on ne reniait pas ses habitudes.
-Excusez-moi, messieurs. Je serais extrêmement obligé si vous me faisiez la faveur de bien vouloir me laisser me joindre à votre sympathique groupe.
-Ta gueule, le pète-sec, on t'as pas causé!
-Quel accueillant discours... Je...
-Fous le camp, on a rien à foutre des crétins comme toi.
-Crétin? Voyons voir de quel bois se chauffe le crétin que je suis.
Il avait dit cela d'un ton très calme. Alors que l'homme barbu se levait et se préparait à lui casser la figure, Cornelius attrapa quelques réactifs dans sa sacoche et incanta à la vitesse de l'éclair, pointant sa main vers le rustre vulgaire.
-An Ex Por!
Le sort de paralysie l'atteint en pleine poitrine. L'homme ne pouvait plus bouger. Alors que ses trois amis se levaient pour aller compléter la besogne que l'autre n'avait pas pu accomplir, il leur lança tour à tour des sorts différents.
-Vas Flam! In Por Ylem! Port Ort Grav!
L'établissement était désormais silencieux. Le quatuor de malabars faisait pâle figure face au mage moyennement expérimenté qu'était Cornelius. La situation aurait été comique si les circonstances avaient été autres que dans le cas présent. Le plus grand des quatre était paralysé et deux de ses amis regardaient encore leur barbe flamber, alors que le quatrième était pris de convulsion, ayant été frappé par un éclair d'énergie puissant. Il tourna les talons et alla se terrer dans sa chambre alors qu'un tonnerre d'applaudissement retentissait dans la salle. On aimait assurément les batailles dans le coin.
Philomène de Milanville... il ne savait pas comment il la trouverait, mais il saurait sûrement se faire respecter. Avant de s'endormir, il barricada sa porte, la verrouilla magiquement et y ajouta une protection supplémentaire (un piège). Si un de ces lourdauds essayait de défoncer cette dernière, il finirait nu comme un ver au milieu du couloir, car l'amusant sortilège de disparition des vêtements était l'un des préférés de l'aide-diplomate.
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 6, 2008 at 3:37 PM
Il venait tout juste de terminer la nuit qu'il n'avait pas eu l'occasion de compléter lors du débarquement. Il bâilla et s'étira, puis revêtit ses vêtements de tous les jours. Ce sommeil avait pour lui été sans rêve. Il ne se rappelait déjà plus des poissons volants. D'après la position du soleil à l'extérieur, il devait être environ neuf heures du matin. Cornelius avait dormi longtemps. La mer était calme et les goélands piaillaient déjà dans le ciel: leur cri était audible jusque dans la chambre.
Il sortit quelques réactifs de son coffre et en remplit sa sacoche, puis défit tranquillement les sortilèges de protection qu'il avait placés sur la porte de sa chambre afin d'éviter l'intrusion de visiteurs indésirables. Une fois que ce fut fait, il en sortit et verrouilla la porte avec des moyens conventionnels. L'auberge était vide à cette heure, si ce n'était de l'aubergiste qui s'affairait à replacer les tables et les chaises déplacées la veille.
Cornelius évita de lui parler. Il savait que l'homme ne serait pas très content de la bataille qu'il avait déclenchée le jour d'avant. Il sortit de l'établissement, franchit les quais et se rendit jusqu'au centre du village. Après tout, c'était l'endroit où le plus de gens étaient concentrés à Stémacol.
-Excusez-moi, savez-vous où je puis trouver Philomène de Milanville?
-Connais pas.
-Excusez-moi, savez-vous où je peux trouver une certaine Philomène de Milanville?
-Connais pas.
-Excusez-moi, savez-vous où je puis trouver Philomène de Milanville?
-Connais pas.
C'était toujours la même chose. Cette dame ne semblait pas avoir une notoriété hors du commun. La quatrième personne que l'aide-diplomate interrogea semblait toutefois en savoir un peu plus. Elle lui indiqua la maison de ladite Philomène de Milanville.
Qu'avait-il à perdre? Il s'y rendit d'un pas rapide. Pas de temps à perdre ce jour-là. Son habitation était située un peu à l'écart de la ville. Mais... diantre! Elle ressemblait beaucoup à celle d'une petite-personne...
Il frappa trois fois sur la lourde porte de chêne qui séparait l'extérieur de l'antre de cette interprète méconnue et se rappela soudainement que Zanther était habité par une myriade de petites-personnes. Était-il possible que...
-Entrez.
La voix était aiguë et faible. Cornelius s'accroupit, courbant le dos pour arriver à passer la porte, et pénétra dans la maison étrange de Philomène de Milanville. N'était-ce pas là un étrange nom pour une petite-personne? Il tâcherait d'en savoir plus avant de partir de là, car il n'en sortirait pas les mains vides, foi d'aide-diplomate. Il fut très surpris lorsqu'il constata les habits excentriques de la petite-personne.
Imaginons-la un peu plus petite et sur fond de maison de hobbit ^^
-Salutations. Vous devez être mademoiselle de Milanville.
-C'est moi, oui. Enfin, enlevez vos chaussures. Ah, ces humains!
Cornelius s'exécuta.
-On m'a parlé de vous comme d'une interprète aux talents merveilleux. Les rumeurs sont-elles fondées? J'ai absolument besoin de quelqu'un de bilingue pour un voyage de la plus haute importance à Nguelundi.
-Nguelundi? Oui, c'est vrai que je parle trois des dialectes de leurs villages près du Mur. Et puis, moi, j'aime l'aventure. Si vous payez, je vous accompagnerai n'importe où.
-Je vous propose mille deux cents écus. C'est tout ce que je peux vous offrir, conjointement avec trois mois hauts en couleur et en défis.
-Trois mois... Vendu! De toute façon, ici, personne ne me parle, enfin presque. Et puis, mon nom, ce n'est pas Philomène de Milanville. Ça, c'est un surnom que je me suis donné. Je m'appelle Vaska Longfémur. Mais tu peux m'appeller Vaska. Envoie la monnaie et je suis à toi, coco!
Légèrement agacé par l'attitude très amicale de la petite-personne enjouée, Cornelius sortit tranquillement mille deux cents écus de sa bourse. C'était, a priori, le tier de ce qui lui restait. Il était bien content que la dame ait accepté sans faire d'histoires. Il lui donna un petit bout de parchemin sur lequel étaient inscrites toutes les informations qu'elle devait posséder sur la mission (hormis, bien sûr, celles qui étaient confidentielles). Il s'inclina brièvement et partit en ville. Il lui restait deux jours à écouler à Stémacol et il comptait en profiter. Une promenade sur le bord de la mer lui ferait le plus grand bien.
[...]
Ils devaient embarquer dans cinquante minutes pour un jour de voyage jusqu'à Nguelundi. Cornelius avait rassemblé ses affaires et les marins les mettaient déjà dans la cale du navire. Les trois autres passagers qui étaient avec lui à son arrivée avait décampé. Il ne restait plus que Vaska et lui dans l'embarcation.
La cloche annonçant le départ imminent du Funeste sonna. Les marins larguèrent les ammarres et le capitaine beugla des ordres à ses maîtres d'équipage pendant que le navire prenait lentement de la vitesse, propulsé par le vent qui s'engouffrait dans la grand-voile. Cornelius regarda une dernière fois Stémacol. Dès le lendemain, il serait arrivé à Nguelundi.
Avant d'aller dans la cale, il remarqua que la vigie le fixait. Que voulait donc cet Arthur?
Quoi qu'il en soit, Vaska Longfémur avait l'air d'être très à l'aise en mer et d'avoir un plaisir fou pendant ce voyage. Appuyée sur le bastingage, elle regardait les vagues défiler et se fracasser sur la coque du fier vaisseau de transport.
Cornelius avait tout juste eu le temps d'écrire trois missives et de les envoyer par un autre bateau jusqu'à Systéria avant de partir. L'une parvint à la Chancelière Mel'Viir quelques jours plus tards, la seconde à Kirael et la troisième, au supérieur acariâtre que Cornelius détestait tant. La première missive était écrite dans un niveau de langage amical, la seconde comme pour un enfant et la dernière, dans un langage châtié à souhait.
Chancelière Mel'Viir,
Vous êtes en train de lire la première missive que j'écris depuis mon arrivée à Stémacol, un petit village zanthérien des côtes du sud. Exophon n'est pas loin, aussi le trafic maritime bat-il son plein. J'ai vu le Mur qui sépare Nguelundi de Zanther. Il est impressionnant: vous devriez voir cela un jour.
Je n'ai eu aucun problème jusqu'à maintenant. Ma bourse est encore assez pleine, je ne manque pas de réactifs et tout va bien. À part une altercation avec quatre hommes que j'ai eu tôt fait de maîtriser dans une petite auberge, il n'y a rien à signaler. J'ai trouvé une femme, une petite-personne, qui m'accompagnera à Nguelundi comme interprète. On l'appelle Philomène de Milanville, mais son vrai nom est Vaska Longfémur. Et elle le porte bien, car elle est assez grande pour une femme de cette race.
J'arriverai dans un jour ou deux à Nguelundi et ma mission débutera. Attendez-vous à recevoir des missives fréquemment: écrire chasse l'ennui.
En vous souhaitant une excellente fin de journée,
Cornelius Aigrepont
Kirael, chère pupille,
Je vous envoie une lettre facile à lire pour que vous vous pratiquiez. Je suis à Stémacol, un village du sud d'un grand pays nommé la Ligue de Zanther. Le voyage s'est bien passé. J'ai rencontré une gentille petite-personne qui va m'aider à faire ma mission. Je pars demain pour Nguelundi.
Bonne lecture à vous,
Cornelius Aigrepont, aide-diplomate
Consul Bolton,
Voici la première des missives que vous recevrez durant mon voyage diplomatique à Nguelundi. Le Funeste m'a mené à bon port: nous avons accosté à Stémacol, un petit village méridionnal de la Ligue de Zanther, situé non loin d'Exophon. Le Mur n'est pas très loin d'ici: je l'aperçois à partir des quais de la ville. Je loge dans une auberge nommée L'Étoile Funeste, qui n'est pas sans me rappeller le nom du navire que vous m'avez choisi.
Pour entrer davantage dans les détails, les trois jours que j'ai passés dans cette petite bourgade du sud se sont passés paisiblement, mis à part une altercation entre quatre hommes et moi dans une taverne. J'ai eu tôt fait de les maîtriser pacifiquement en les paralysant, m'évitant une râclée. Les gens d'ici n'aiment pas la magie, mais respectent ceux qui en pratiquent. Je ne me suis plus fait harceler par la suite.
Je suis parti à la recherche d'une interprète et en ai trouvé une, du nom de Philomène de Milanville. Ce pseudonyme n'est pas sa véritable appellation: elle se nomme en fait Vaska Longfémur. Elle porte bien son nom, étant donné qu'elle dépasse facilement toutes les petites-personnes que j'ai pu rencontrer dans ma vie d'une dizaine de centimètres. Malgré ses vêtements excentriques, elle semble compétente. Je me fie à elle. Son prix était raisonnable: il s'élève à trois milles écus d'or pour l'année que je passerai à Nguelundi. Je joindrai à cette missive un devis complet de mes dépenses jusqu'à maintenant.
Le bateau part dans quelques heures en direction de Guluj'Afalo, le village Nguelundi dont Vaska parle le dialecte. J'ai dû payer le capitaine pour qu'il accepte de rester à Stémacol: manifestement, ce gredin prévoyait partir sans moi jusqu'à Exophon.
Voici le devis:
-200 écus pour les vêtements
-73 écus pour la nourriture
-56 écus pour les réactifs
-225 écus pour la chambre
-3.000 écus pour les services de Vaska
-300 écus pour persuader le capitaine
Total: 3854 écus
N'ayez crainte, à Nguelundi, il n'y aura pratiquement aucune dépense. Les réactifs y abondent et je pourrai créer ma propre nourriture. Le coût total de mon voyage tournera donc aux alentours de 4000 écus à la fin de ce dernier.
Je vous prie d'agréer l'assurance de ma très haute considération,
Cornelius Aigrepont
Post by Thomas Bolton, Emp - May 6, 2008 at 7:28 PM
Le Consul travaillait sur la remise des récompenses pour les combattants sur quartier contaminé quant son secrétaire fit irruption dans la pièce, par une porte dérobée. Approchant du bureau, il déposa une liasse de lettres sur le bureau et en garda une dans la main, le sceau brisée. Thomas ne releva pas la tête. Il ne le faisait jamais. Un toussotement ne le perturba pas.
« Oui, monsieur Cressen ? »
Son regard continuait d’aller d’un rapport à un autre tandis que sa main droite griffonnait sur un petit carnet. Jolies récompenses, nota le collaborateur du diplomate. Certains guerriers seraient sans doute honorés, de quoi augmenter l’estime de la populace à leur égard après l’ivresse de la bataille.
« Je me suis permis de lire celle-ci, monsieur le Consul. Une lettre de Zanther, de monsieur Aigrepont. »
Alors qu’il esquissait un sourire, Thomas hocha la tête et tendit une main impérieuse pour recevoir le courrier. Ses yeux parcoururent le papier avec intérêt.
« Dommage. Ce petit épisode à la taverne aurait pu participer à dégonfler son formidable ego. S’il est respecté par la populace, ça n’ira pas en s’arrangeant. Enfin, la traversée de Nguelundi lui offrira son lot de surprises. »
« C’est un mage expérimenté, hélas, monsieur le Consul. »
« 3.854 pièces d’or. L’empire ne cautionnera pas son paiement au capitaine, ce dernier avait pour ordre d’attendre l’aide-diplomate. Il s’est fait escroqué. Je ne le reprocherai pas au propriétaire du navire, il a su saisir une opportunité intéressante. Nous verrons les détails au retour. »
« Dois-je envoyer une réponse, monsieur le Consul ? »
« Inutile, le temps que la lettre arrive, il aura déjà quitté Zanther. Ne dépensons pas l’or de l’ambassade pour monsieur Aigrepont en louant les services des mages. Disposez, monsieur Cressen. »
Le secrétaire s’inclina roidement tandis que son supérieur reprenait son travail là où il l’avait interrompu…
Post by Kirael, Adc - May 6, 2008 at 10:23 PM
Kirael vaquait comme d'habitude a ses occupations, la tete dans la lune, a se demander si elle devait manger une pomme ou une poire quand elle eu la bonne idée de se diriger vers le coin chaud. Arrivée la-bas, courant gaiement vers le comptoir et en criant un bonjour vers le tavernier, elle pu voir celui ci se cacher sous son comptoir. Eberluée elle s'approcha a pas de loup puis fut surprise de le voir se relever une lettre a la main.
-Une lettre! Waaaa certainement Monsieur Aigrepont! Il m'a dit qu'il m'en enverrait! mais si vite!
Elle s'assit sur le tabouret absorbé par l'enveloppe qu'elle s'empressa de dechirer n'importe comment.
-Je dois lui repondre vous pensez? ahh mais il me le dit peut etre la dedans, mais je sais pas ou il vit! et je vais mettre trop de temps a l'ecrire et je dois la donner a qui?
Elle s'arreta d'un coup, lisant attentivement, déchiffrant les mots ecrits butant sur les noms communs.
- Il va bien! J'espere qu'il a mangé plein de fruits sinon POF plus de dents! Et il repart deja loin avec une petite madame qui s'appelle Nguelundi!
* Posant la lettre de coté, elle se jeta sur le plat habituel que le tavernier lui concoctait, impatiente de recevoir d'autres lettres de son professeur.*
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 7, 2008 at 4:49 AM
Des fruits, Cornelius n'en avait pas beaucoup mangés, mais c'était par un heureux concours du hasard qu'il était en train d'incanter dans la cale du navire qui tanguait, chevauchant les vagues avec difficulté. La mer s'était beaucoup agité, mais heureusement, ils atteindraient le rivage d'ici une dizaine de minutes. Pour s'occuper, le magicien jouait avec une pomme qu'il venait de créer. Il croqua dedans. Infecte. Sa magie était encore à améliorer, décidément. Il essaya d'invoquer un fromage.
-In Mani Ylem!
Il murmurait. Ses paroles n'étaient audibles que par lui-même. Le résultat fut parfait: le fromage sentait divinement bon. Cornelius en prit une bouchée avant de jeter le reste sur le sol. Aussitôt, une dizaine de rats se précipitèrent sur la nourriture abandonnée tandis que l'aide-diplomate se levait. Il avait hâte de voir à quoi ressemblait Nguelundi: Il n'y était jamais allé.
Il monta sur le pont. Le vent soufflait avec toute sa puissance sur le navire, qui avait peine à garder le cap. Toutefois, on pouvait apercevoir le quai de fortune sur lequel Cornelius et Vaska allait quitter le navire. Il n'était plus très loin. On entendit un petit bruit alors que le Funeste accostait. Le navire ne comptait manifestement pas rester là. Des marins jetèrent littéralement les effets personnels des deux compagnons sur le quai, alors qu'on les pressait de sortir. Visiblement, on n'avait pas prévu faire un arrêt inutile de trois jours à Stémacol, et encore moins reconduire ces deux hurluberlus dans un pays dont ils n'avaient rien à faire.
Une fois sorti, Cornelius regarda le navire s'éloigner. Il faisait nuit, aussi ne put-il pas vérifier avec exactitude ses soupçons: était-ce son esprit qui lui avait joué un tour, ou la vigie les avait-elle suivis? Il ne saurait le dire. L'aide-diplomate dut faire déferler une grande puissance magique pour arriver à transporter les lourds bagages qu'ils transportaient avec eux. Finalement, il décida d'invoquer un cheval de trait qui les porterait à leur place. Vaska prit la tête de l'étrange duo. Elle savait mieux que Cornelius où se rendre, forcément.
-Guluj'Afalo n'est pas très loin d'ici. Apparemment, et si je me rappelle bien, nous ne devrions pas marcher plus de trois heures.
-La perspective ne m'enchante pas tellement, mais avons-nous vraiment le choix? Partons. Je n'ai pas de temps à perdre.
Peut-être l'invocation du cheval était-elle une mauvaise idée: ils eurent toutes les peines du monde à tirer l'animal à travers les maints obstacles de la jungle inhospitalière, humide et affreusement suffocante dans laquelle ils s'engouffraient. Le voyage n'allait visiblement pas être une partie de plaisir. Cornelius détestait la chaleur.
Ils arrivèrent donc à Guluj'Afalo, un village tribal bien étrange qui réservait un lot de surprises à l'aide-diplomate.
-Nous y voilà. Voici Guluj'Afalo. J'en parle le dialecte. Alors, si vous le voulez bien, on va tout de suite aller voir leur chef. Ça ne sert à rien d'essayer d'attendre avec les Nguelundis. Si on n'y va pas, on se réveillera avec des lances pointées dans le front.
-Joie. Soit. Allons-y.
Cornelius dissipa le cheval lorsqu'ils eurent trouvé un coin confortable pour s'installer. Il dormirait là ce soir... heureusement qu'il avait amené du matériel de "camping", étant donné qu'il ne souhaitait nullement être attaqué par des créatures au cours de la nuit. Les deux compagnons grimpèrent aux échelles de bois qui permettaient d'accéder aux huttes des sauvages, bâties sur des arbres. La maison du chef était très facile à repérer.
L'aide-diplomate frappa trois coups à la porte du dirigeant. Celui-ci vint leur ouvrir rapidement. Il était vêtu d'une splendide coiffe indigène en or, manifestement pur. Il garda son calme malgré les tenues excentriques de ses visiteurs (ils ne s'étaient pas encore changés en fonction du climat de la jungle).
Cornelius n'attendit pas plus longtemps.
-Bonjour. Je suis Cornelius Aigrepont et je viens de l'Empire de Systéria en tant que diplomate.
Vaska traduit avec rapidité la phrase que venait de dire l'aide-diplomate. Leur langue était étrange et difficile à comprendre. Cornelius n'avait pas mal fait d'engager une interprète. L'autre parut comprendre et se lança dans un long discours en dialecte de son village.
-Il dit qu'il vous souhaite la bienvenue, tant que vous n'êtes pas un de ces fichus nobles qui volent leurs animaux et leurs richesses. Il demande aussi ce que vous venez faire ici.
-Dites-lui que je viens voir leur Grand Shaman, Homme-qui-sourit-à-la-Terre. L'Empire de Systéria souhaite tirer un trait sur les heurts du passé et entamer une alliance prospère entre nos deux pays.
Encore une fois, Vaska traduit le tout avec une rapidité et une efficacité qui ne laissaient aucunement à désirer. Le chef de Guluj'Afalo parut légèrement amusé par ses paroles, mais Cornelius n'en fut pas décontenancé. De toute façon, à vrai dire, il se fichait bien de réussir sa mission ou pas. Quoiqu'il serait préférable qu'il en revienne triomphant, car il voulait sa promotion... L'indigène se remit à babiller des paroles incompréhensibles dans son dialecte natal.
-Il dit que le Grand Shaman Homme-qui-sourit-à-la-Terre est à trois villages d'ici, dans les dunes du désert Nguelundi, et qu'il y restera pendant un mois. C'est ce qui est prévu. Sauf que là, le désert est à au moins deux semaines de marches d'ici. Faudrait savoir ce que vous allez faire.
-Nous irons au désert. Demandez-lui toujours si nous avons sa permission pour passer la nuit ici et remerciez-le de son hospitalité.
Une fois qu'ils eurent obtenu la permission de dormir dans le territoire du village tribal, ils allèrent à l'emplacement où reposaient leurs bagages et s'endormirent à la belle étoile.
Le lendemain allait être une journée importante.
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 8, 2008 at 3:08 AM
Ils ne se réveillèrent pas avec des lances pointées dans le front.
Aux petites heures du matin, ils défirent leur tente. C'était une chance que Cornelius en ait apporté une. Les insectes de Nguelundi était particulièrement effroyable: gigantesques libellules, moustiques de la taille d'une bille, tout y était en proportions épiques. Les arbres, qui poussaient dans ces forêts vierges depuis des temps immémoriaux, semblaient effleurer les nuages tant ils étaient grands. La faune était typique à celle des jungles: Panthères, singes et autres se partageait le territoire. Heureusement, ils n'avaient pas été attaqués pendant la nuit.
C'était le jour du départ. Vingt jours à passer dans le désert, cela serait décidément toute une épreuve. Cornelius avait encore de la difficulté avec le sort d'invocation d'eau. Il espérait de tout coeur que ses problèmes s'évanouissent et qu'il réussisse à le maîtriser d'ici le moment où il en aurait besoin. La nourriture ne manquerait pas, toutefois.
Avant de partir, Cornelius cueillit quelques plantes réactives en catimini pour ne pas se faire voir par les sauvages. Bientôt, l'aide-diplomate et l'interprète furent fins prêts à se diriger vers ledit village, duquel ils n'avaient pas reçu le nom.
[...]
Le soleil faisait darder ses puissants rayons depuis plus de dix jours sur la peau des pauvres voyageurs. Dans l'étendue aride du désert Nguelundi, il n'y avait aucune oasis: L'eau commençait à cruellement leur manquer, puisque l'aide-diplomate ratait de plus en plus souvent ses sorts d'invocation d'eau, étant donné sa fatigue. Son stock d'ingrédients avait diminué de moitié. Ils étaient couverts de coups de soleil et complètement démoralisés.
Qu'avait ce chef imbécile derrière la tête quand il les avait envoyés au beau milieu du désert? Cornelius pensait que ce dernier savait très bien où il les envoyait... Il aurait dû se méfier. Il savait pourtant très bien que les Nguelundis détestaient tous les Blancs. Ah! quel sot il faisait...
Rien à l'horizon, hormis les sempiternelles dunes qu'ils franchissaient depuis trop longtemps déjà. Il était déjà arrivé à deux reprises à l'aide-diplomate de se jeter dans le sable, croyant voir une oasis. Leurs yeux leur jouaient des tours.
Cornelius commençait sérieusement à avoir mal aux yeux, et Vaska peinait à suivre leur cadence. Ses petits pieds poilus étaient irrités par les petites roches mêlées au sable. Leur progression était de plus en plus lente, puisqu'ils devaient ménager leur eau et leur énergie. La fin semblait inévitable.
-Ah, mais pourquoi est-ce que j'ai accepté de vous suivre? C'était une folie de vouloir venir dans le désert Nguelundi... C'est déprimant.
-Cessez de maugréer, mademoiselle Longfémur. Vous gaspillez votre salive inutilement. Je vais tenter une dernière fois d'invoquer de l'eau. Si je ne réussis pas, nous serons morts d'ici deux jours.
Il sortit quelques réactifs de sa sacoche. Si les Systériens avaient vu l'allure de l'aide-diplomate à cette instant, ils auraient constaté que cet homme était humain et n'avait pas toujours l'air à l'aise. Le bandana défait, les cheveux collants, la barbe mal rasée, les yeux hagards, la démarche chancelante, le torse nu, les culottes sales, les chaussures trouées, Cornelius avait perdu toute sa superbe. C'était tout juste s'il avait encore l'énergie d'incanter.
-In Mani Aqua!
Miracle. Quelques gouttes s'échappèrent de sa gourde. En la soupesant, il constata qu'elle était pleine. Sa joie était indicible: Oubliant toute retenue, il sauta de joie en criant un "Victoire" puissant. Vaska parut interloquée en voyant son employeur agir ainsi.
-Eh bien, nous voilà carrément sauvés. Un litre d'eau pour deux, ça va sûrement nous faire vivre 20 jours, hein? Sois réaliste, Cornelius, si on n'atteint pas de village d'ici trois jours, on sera mort.
-J'ai confiance. Je suis certain que nous atteindront notre but. Ces damnés sauvages n'auront pas réussi à m'achever. Oui! Nous atteindrons ce village avant que je ne meurs, foi d'Aigrepont.
Vaska soupira. Elle le trouvait légèrement trop optimiste.
Le temps sembla passer plus vite avec de l'eau. Ils marchèrent un jour. Deux jours. Trois jours. L'eau fut épuisée, et il n'y avait toujours pas de village à l'horizon. Soudain, un bruit attira leur attention: on aurait dit une flèche qui fusait... Cornelius dut sa survie à un réflexe: il avança la tête. Le projectile le manqua d'un demi-centimètre. Vif comme l'éclair, il incanta et regarda partout autour.
-Port Ort Grav!
Un sauvage armé d'un arc le regardait avec de grands yeux. Cornelius n'hésita pas une seule seconde: Il foudroya le sable juste à côté de l'homme pour lui signifier qu'il pouvait facilement lui tenir tête. L'autre parut effrayé et se jeta au sol, tremblant comme une feuille.
-Vaska, parlez-vous le dialecte désertique?
-J'ai bien peur que non, Cornelius. Va falloir te débrouiller autrement, quoi.
Que faire avec un indigène terrifié duquel on ne parle pas la langue? Utiliser les mimes. Cornelius réussit à persuader Vaska d'aller secouer le sauvage, opération qui réussit, malgré la réticence apparente de l'homme à les aider. Cornelius utilisa un sort d'illusions simple pour montrer un masque Nguelundi à l'autre. Puis, il se pointa, sourit et pointa la terre. L'autre parut enfin comprendre.
-Ah! Agah agah! Gulaf potawak midjelor!
L'aide-diplomate et l'interprète ne savaient pas du tout ce que voulaient dire ces paroles.
Que faire?
Suite demain, manque d'inspiration et de temps
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 8, 2008 at 3:47 PM
L'étrange indigène, vêtu très légèrement en raison de la chaleur accablante qui régnait dans cette étendue désertique, les avait menés à l'intérieur d'une montagne qui se situait à un jour de marche de l'endroit où ils s'étaient d'abord rencontrés. Cornelius et Vaska avaient très soif, mais ils espéraient de tout coeur que l'arrivée providentelle de leur "sauveur" allait les aider à survivre à cet épisode qu'ils voulaient oublier. Le désert... Ils avaient été idiots. Cornelius s'en voulait. Il n'aurait jamais dû croire le chef de Guluj'Afalo. Après tout... c'était un indigène, et Cornelius, un emblème de l'oppression des hommes Blancs contre eux.
Ils étaient libres de faire ce qu'ils voulaient, mais ils ne protestaient pas et suivaient l'homme à travers les méandres des ramifications d'un énorme tunnel creusé à même la montagne. À un moment donné, ils commencèrent à entendre des bruits de voix provenant d'une cavité non loin de leur position. Ils entrèrent et...
Une douzaine de gardes formaient un cercle autour d'un grand homme coiffé d'un masque d'oiseau superbe. Aussitôt qu'ils furent entrés, l'aide-diplomate et l'interprète eurent chacun six lances pointées dans le front.
La pièce était assez ronde et éclairée par deux torches situées à l'arrière. Un tapis tissé dans une matière étrange ornait le sol.
Leur sauveur se mit à parler à son chef (puisque c'était indéniablement lui qui se trouvait au milieu de la pièce).
-Ugh agah m'elf pagadok. Holuf yirus poweh poweh!
Il sautillait frénétiquement dans une mimique proche de celle d'un singe tout en pointant les deux voyageurs. Il n'avait pas l'air très intelligent, mais son interlocuteur, lui, paraissait empreint de sagesse. Il se râcla la gorge et regarda les deux voyageurs. Il prononça alors une pléthore de mots qui se ressemblaient tous un peu, environ une centaine, et Vaska parut en comprendre deux ou trois dans le lot.
-Que sommes-nous censés faire? Je n'ai pas compris un traître mot de ses borborygmes incessants, et vous ne semblez pas avoir mieux saisi l'essence de son message que moi.
Il attendit la réponse de l'interprète. Ils étaient dans une impasse.
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 10, 2008 at 9:38 PM
-Aucune idée, Cornelius, je n'ai pas plus compris que vous. Tout ce que j'ai cru saisir, c'est qu'il veulent nous faire cuire.
-Nous faire cuire? Quelle délicate attention. Soit. Dans ce cas... Nous allons devoir nous arranger pour goûter mauvais, n'est-ce pas?
Bien qu'il se gaussât bien de la situation, Cornelius était très conscient du danger. Ces indigènes n'hésiteraient sûrement pas à les faire cuire, il n'en doutait pas une seule seconde. Il se pencha alors très lentement, les lances toujours pointées sur lui, et entreprit de faire un dessin dans le sol pour faire comprendre le but de sa mission au chef qui se trouvait au milieu de la pièce rudimentaire. Il commença par tracer la forme d'un bonhomme très simple, puis lui dessina un sourire. Il traça alors une flèche entre lui et le sol, puis pointa son dessin au chef sauvage. Celui-ci parut saisir l'essence du message plutôt simple.
-Ugh stal'ah, m'gadark ploc.
Tous les soldats levèrent leur lance et se préparent au combat. Vif d'esprit, Cornelius réalisa ce qui se passait et incanta rapidement pour mettre à terre celui qui était le plus proche de l'interprète.
-Vas Flam!
Pendant que l'escouade improvisée de gardes sauvages regardaient, mystifiés, leur camarade être atteint par une boule de feu puissante, Cornelius et Vaska prirent la poudre d'escampette en s'élançant avec vélocité dans les méandres tortueux des tunnels de la montagne. Cornelius savait bien qu'il fallait toujours tourner à droite dans un labyrinthe... Et c'est ce qu'ils firent, alors qu'ils entendaient déjà les troupes sauvages leur courir après. Ils sortirent rapidement de la montagne, et Cornelius prit soin de poser un petit piège à l'entrée avant de prendre ses jambes à son cou. Un ours polaire en plein désert, les sauvages seraient déroutés.
-Courez, Vaska, courez, ne vous arrêtez pas! Nous devons fuir le plus vite possible!
Elle ne rechigna pas et ils s'enfuirent loin devant... Alors que les indigènes, cois, regardaient le plantigrade immaculé qui contrastait à l'excès avec l'ambiance de l'endroit.
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 10, 2008 at 9:55 PM
Cet épisode avait déjà été oublié par les deux compagnons alors qu'ils entreprenaient à nouveau de traverser le désert. Cornelius avait miraculeusement réussi trois sorts d'invocation d'eau de suite: ils n'en manqueraient plus. La nourriture non plus ne leur faisait pas défaut.
Ils marchèrent si longtemps qu'ils avaient perdu la notion du temps. Cornelius, d'habitude austère, commençait à manifester une certaine amitié envers Vaska. Mais rien de très extravagant...
Ils parcoururent les dunes du désert à nouveau, bravant les dangers de la faune, les tempêtes de sable et la chaleur caniculaire pour enfin arriver à l'orée d'une jungle. La jungle... encore... Cornelius était persuadé qu'ils n'étaient plus très loin du Mur. Maintenant, il y avait un problème: Ils n'avaient plus de bateau, personne n'allait jamais à Nguelundi et le Mur était infranchissable. Que faire?
Ils devraient vraisemblablement trouver un moyen d'escalader l'obstacle titanesque...
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 11, 2008 at 8:03 PM
-In Sanct Ylem. In Sanct Ylem. In Sanct Ylem. In Sanct Ylem. In Sanct Ylem.
Il avait mis beaucoup de temps à trouver une solution intelligente. Heureusement, les Zanthériens n'étaient pas tous stupides: les gardes assignés à la défense du Mur avaient rapidement compris que les deux voyageurs n'étaient nullement des Nguelundis, de par la blancheur de leur peau. Ils avaient alors dit quelque chose de très sympathique.
-Si vous arrivez à monter jusqu'ici, c'est parfait, on vous laissera passer!
*Ils avaient ri de cette blague pendant une demi-heure au moins. Cornelius, orgueilleux à souhait, avait vu cela comme une nette provocation, une invitation à relever un défi. *
Parfait!, se dit-il. Je n'ai qu'à... invoquer un escalier...
L'idée pouvait paraître complètement stupide, mais elle ne l'était pas tant. Cornelius était capable d'invoquer des murs. Il commença par en créer de petits, puis fit grossir leur taille au fur et à mesure que l'escalier improvisé s'élevait vers les hauteurs du Mur (environ 10m). Vaska et lui étaient au comble du bonheur lorsque l'escalier fut achevé. Mais ils devaient se hâter, car le tout ne durerait que deux minutes. Ils coururent jusqu'en haut du Mur devant les yeux ébahis des deux gardes avant que l'escalier ne disparaisse.
-Eh bien... Parfait. Vous avez gagné. Tenez, il y a une échelle à deux cents pieds vers l'est. C'est par là que nous montons, chaque matin.
Les deux compagnons ne se firent pas prier et se hâtèrent de descendre sur la terre ferme. L'aventure était terminée.
-Merci pour votre aide, Vaska, bien que vous ne m'eûtes pas été de la plus grande utilité. Ce voyage aura été très inutile. Je vais retourner immédiatement à Systéria... Et laisser tomber mes projets.
Et c'est ce qu'il fit. Quelques jours plus tard, un petit bateau de pêcheur accostait au port impérial... et l'aide-diplomate en débarquait. Ce voyage avait avorté rapidement.
Post by Cornelius Aigrepont, Ind - May 11, 2008 at 8:25 PM
Une fois qu'il fut rendu à Systéria, il fit envoyer trois différentes missives.
Chancelière Mel'Viir,
Le voyage n'a rien apporté de bon. Après nous être perdus dans le désert et avoir été brûlés par l'incroyable puissance du soleil Nguelundi, nous sommes tombés sur un chef particulièrement agressif qui a failli nous faire tuer lorsque je lui ai dessiné le Grand Shaman. Nous avons fui, retraversé le désert et sommes sortis de ce pays, damné soit-il. La mission est un échec.
Je vous prie d'agréer l'assurance de mon profond respect,
Cornelius Aigrepont, Aide-diplomate
Kirael,
Un méchant chef indigène nous a attaqués. Nous avons dû fuir. Je suis de retour à Systéria. Au plaisir de te voir prochainement.
Bien à toi,
Cornelius
Consul Bolton,
La mission diplomatique est un échec. Je dois vous rencontrer le plus rapidement possible pour discuter de tout cela.
Je vous prie d'agréer l'assurance de ma très haute considération,
Cornelius Aigrepont, Aide-diplomate
Post by Thomas Bolton, Emp - May 11, 2008 at 10:48 PM
La lettre de Cornelius parvint à Thomas Bolton par l’intermédiaire de son secrétaire. A peine en eut-il terminé la lecture qu’on toqua à la porte. L’aide-diplomate, plus bronzé que d’ordinaire, se tenait droit sur le seuil, une moue sur sa lippe d’ordinaire si arrogante.
« Monsieur Aigrepont. Je lisais justement votre lettre. »
« Quelle coïncidence. J’ai échoué, Consul, quand allez-vous me signifier mon renvoi ? »
Ignorant la question, le ministre retourna s’installer dans son austère siège de pierre. D’un geste de la main droite, il invita son subalterne à s’asseoir en face de lui.
« Puis-je refuser ? »
« Non, vous ne pouvez pas. »
Et le récit du voyage fut fait à Thomas, qui l’écouta silencieusement, ponctuant à de rares occasions de mots neutres le discours de son interlocuteur. Ce dernier pensait dur comme fer être congédié.
« Qu’avez-vous appris de ce voyage, monsieur Aigrepont ? »
« Je ne sais pas, je ne pense pas que cela m’a formé à quoique ce soit, Consul. »
« Et pour quelles raisons, à votre avis, vous ai-je envoyé là-bas ? »
« Parce que je vous déplais. Et aussi parce que mon attitude vous agace. »
Thomas laissa un sourire jouer sur ses lèvres quelques secondes, avant de le laisser s’estomper pour arborer le sempiternel visage neutre qu’on lui connaissait si bien.
« Vous avez tort pour le premier point, raison pour le second. Mais vous en avez oublié une. Certaines choses ne changent pas. Ce n’est pas en une année ou même en un seul tout petit mois que vous allez réussir à changer la vision que ces individus ont de nous. Des siècles de pillages et de massacres ne s’effacent pas. »
« Alors j’ai du empirer la situation. »
« Non, vous n’avez eu strictement aucun impact. Calciner un sauvage n’a été qu’une goutte de plus dans l’océan de fléaux qui déferle sur eux chaque jour. Parlons maintenant de votre devis. »
Le Consul fouilla dans un dossier pour en sortir la première lettre qu’il avait reçu de Zanther de la part de son employé.
« Vous aviez avancé la somme de 4.000 pièces pour le voyage, vous me l’avez confirmé dans cette lettre. Or, votre mission devait durer une année, vous n’y êtes resté que trois mois. En conséquence de quoi je divise ce devis par quatre. »
« Mais, Consul. Mes économies… »
« Je n’ai pas fini, monsieur Aigrepont. Vous aurez tout le loisir de renflouer vos économies avec votre salaire de diplomate. »
Cornelius restait coi, incapable de répondre quoique ce soit. Thomas posa les mains à plat sur le bureau, puis alla chercher une note officielle dans une liasse de papier posé à côté de lui sur l’épaisse table de pierre. Il la fit glisser vers son collaborateur. Elle lui informait de sa récente promotion et des avantages fiscaux qui allaient avec.
« Vous n’avez pas hésité à mettre votre vie en danger pour cette mission. Vous avez échoué, certes, mais en vertu de vos états de services et de vos compétences, je vous nomme diplomate. »
« Merci, Consul. Vous devez donc avoir encore quelques bribes de confiance envers moi. »
Le reste ne fut que remerciement, paiement du devis et gaudrioles magiques du nouveau diplomate…