L'Intendant renfloue le Trésor...

L'Intendant renfloue le Trésor...

Post by Thomas Bolton, Emp - October 24, 2008 at 8:42 PM

Quelques jours après l’assaut donné sur le palais et la destitution de Mala, les habitants de Systéria reprenait leur souffle. Après une période de violence et d’horreurs, le calme consécutif au retour de Cybelle sur le trône de l’empire était une véritable bénédiction. Mais un matin, alors que le soleil venait à peine de se lever, des coups de marteaux, de burins, des ordres beuglés à tue-tête jaillirent en moyenne ville, troublant le paisible et lourd sommeil des citoyens.

Des ouvriers s’affairaient à l’ancienne place des Vertus mais aussi à la chapelle Mala, supervisés par des contremaîtres et fonctionnaires impériaux. Des charriots entouraient le lieu des travaux. On voyait les travailleurs détacher scrupuleusement et avec un soin particulier les lourds blocs de marbre rose pour les charger dans les véhicules. Des petits hommes portant des registres vérifiaient scrupuleusement et compulsaient les données.

Un lourd carrosse noir arriva et s’arrêta près du chantier de la chapelle. Impossible de passer à côté, il était bien trop visible. L’Intendant Bolton en sortit et se dirigea vers le chef d’exploitation.

« Bien le bonjour, monsieur Gredar. Comment avancent les travaux ? »

« Oh, Vot’ Seigneurie ! A une vitesse pas croyable, c’est sûr. Chacun de mes p’tits gars n’a qu’une envie, c’est de voir tous ces tas d’rose déguerpir le plus vite possible, pour sûr ! On finira tout très rapidement, ça j’en suis persuadé. »

« Parfait. Veillez à ce qu’il n’y ait aucun vol, c’est très important. »

« Oui, Vot’ Seigneurie. J’en ai coincé un tout à l’heure, je l’ai viré. Oh, vos invités vous attendent là bas, près de l’escalier. »

Après avoir salué l’homme qui retourna à son travail, le baron se dirigea vers un groupe non-négligeable de riches marchands, systériens ou étrangers, qu’il avait convoqué la veille. Apparemment, un vif débat les animait.

« Comment ?! Vous les achetez deux fois leur valeur, c’est un scandale ! Et vous osez me reprocher mes tarifs ? Escroc ! »

« Messieurs, voyons, nous sommes entre gens civilisés. J’ai ici plusieurs tonnes de marbre rose, la chapelle a coûté en tout un million six cent mille pièces d’or. Que me proposez-vous ? »

C’est alors que chacun entreprit de détailler ses plans de vente et d’achat, vantant ses mérites et dénigrant les autres. L’Intendant n’écoutait pas, il se contentait de noter mentalement les tarifs qui seraient les plus profitables à l’Empire.

« Soit. Les blocs de grande taille iront chez monsieur Ventimer, les moyens chez madame de Deridis et le reste chez Miral&fis. »

Les gagnants se frottèrent les mains et les malheureux perdants émirent quelques faibles protestations. Ca ne servait à rien de dialoguer avec cet homme-là. Thomas rejoignit alors un autre groupe d’artisans et de marchands.

« Alors, avez-vous apprécié la visite ? »

Aucune réponse, juste des devis furent tendus devant le ministre, qui apprécia fortement. Les chiffres parlaient suffisamment. Les tapisseries, statues, chandelier, en bref, toute la décoration des lieux serait revendue. Mala avait peut-être dépensé des sommes folles pour assouvir sa mégalomanie, mais il était possible de trouver acquéreur pour de tels objets. Fort heureusement !

« Plume. »

Là encore, des dizaines de plumes humectées d’encre se retrouvèrent devant lui. Au hasard, il en prit une et signa une partie des devis. Des sourires s’étirèrent, des sourcils se froncèrent.

Thomas jeta un dernier regard aux vestiges du règne de la Sanglante qui tombaient en ruine, se désagrégeant petit à petit au fur et à mesure que les blocs étaient charriés. Une fois dans le carrosse, il s’entretint brièvement avec son secrétaire.

« Voila qui devrait aider à renflouer le Trésor. Ajouté à la vente des cadeaux qui n’ont pas encore été donné à Mala, qui sont en cours d’analyse et à la réquisition des loyalistes et nous aurons à nouveau un budget en bonne santé. La reconstruction de la cité pourra alors se poursuivre avec l’aide du Trésor. »

« Vous avez été rapide après la validation de votre réforme, Votre Seigneurie. »

« Nous n’avons pas de temps à perdre, monsieur Cressen. »

Puis le véhicule démarra en trombe pour amener l’Intendant au laboratoire Minh Yu…


Post by Thomas Bolton, Emp - October 25, 2008 at 4:40 PM

La directrice des recherches, Yuri Minh Yu, devait être excédée par tous ces marchands et acheteurs potentiels qui examinaient d’un œil critique l’entrepôt du laboratoire où étaient stockés tous les cadeaux qui avaient été offerts à Mala et que l’Intendant avait scrupuleusement interceptés. Chacun en allait de son estimation, parlant parfois tout haut. Un tel luxe, c’était impressionnant, les clients les plus fortunés se les arracheraient !

Fort heureusement pour elle, le baron Bolton ne tarda pas à arriver. Une nouvelle fois, le petit manège démarra, chacun allant de son estimation pour obtenir tel ou tel objet. Des prix fusaient, parfois hurlés, parfois murmurés. Comment Thomas faisait-il pour différencier les tarifs avantageux des mauvais ? Sans doute avait-il pris quelques mesures de précaution en établissant des devis au préalable. Quoiqu’il en soit, au bout d’un certain temps, il rendit son verdict.

« Les œuvres de tisserand seront vendues à l’Aiguille Dorée, en Ville Haute. Les peintures et sculptures à la Galerie Mirameau et le mobilier au Bois d’Argent. Les bijoux seront dispersés entre les différentes joailleries. Dès que l’or sera déversé dans les Caisses Impériales, vous pourrez prendre possession des articles que je vous ai dévolu. »

Les trois propriétaires des boutiques nommées sautèrent de joie. Ca représentait un marché juteux. Ils vendraient les articles plus chers que le prix de vente de l’Intendant, mais l’empire ne perdrait rien à vendre ces cadeaux. Thomas retourna alors dans son carrosse pour renseigner Cressen sur la tenue des comptes.

« Nous pouvons ajouter un peu plus de trois cents mille pièces d’or, monsieur Cressen. »

Alors que le véhicule avançait à un rythme soutenu, le cocher freina brusquement, le secrétaire manquant de s’écraser sur le ministre. La cause de cet arrêt brutal était un petit attroupement devant une maison de Moyenne Ville. Trois gardes et un percepteur impérial toquaient à la porte pendant que les badauds examinaient la scène d’un air curieux.

« La perquisition des biens appartenant aux fidèles de Mala avance bien. »

D’une main agile et souple, il leva le petit rideau sombre qui garantissait d’ordinaire aux passagers de ne pas être vus. L’Intendant écoutait le fonctionnaire impérial, la porte de la demeure venait de s’ouvrir.

« Monsieur Farendad ? »

« Oui, qu’est-ce que je peux faire pour vous ? »

« Vous résidez bien boulevard d’Edegar II, avez une femme répondant au nom de Mariette ainsi que trois enfants se prénommant Rufus, Edouard et Philipe ? Respectivement âgé de six, onze et treize ans ? »

« Heu et bien heu oui, mais qu’est-ce que vous voulez, d’abord ? »

Le percepteur fit un signe de main aux gardes pour leur faire signe d’entrer. L’habitant ne put pas s’y opposer.

« Attendu que vous avez été reconnu coupable de frayer avec les fidèles de Mala la Sanglante, que votre implication dans son règne a été prouvée, que vous avez touché des sommes conséquentes pour avoir dénoncé les fidèles de Sa Majesté Impériale Cybelle Ière De Systéria, vous êtes condamné par décret de Sa Seigneurie l’Intendant a être déchu de la propriété de l’ensemble de vos biens à partir de la présente annonce. Je vous invite donc à quitter votre demeure avec votre famille. »

L’homme était bouche-bée. Les gardes impériaux étaient déjà en train de faire des allers-retours entre la maison et un charriot tiré par des bœufs pour charger les objets de valeur.

« Mais, mais ! J’ai une famille, des enfants, on ne peut pas nous mettre à la rue comme ça ! »

« Les gens que vous avez dénoncé aussi avaient famille et enfants. Ils ont connu un bien plus triste sort, monsieur Farendad. »

« Mais qu’est-ce qu’on va devenir ?! »

« La vente de vos biens servira à renflouer le Trésor Impérial, asséché par la Régente, afin de financer la Reconstruction. »

La foule aux alentours huait maintenant le citoyen qui venait de perdre en l’espace de quelques secondes l’ensemble de ses biens. C’est donc sous les quolibets et la vindicte populaire que la famille Farendad quitta sa maison, son nid douillet pour les affres de la rue.

« Salopards ! »

« Bandes de vendus ! Bien fait pour votre gueule ! »

« Ca vous fait quoi hein, d’finir comme des moins que rien ? C’est ma cousine que vous avez fait tuer ! Avec vos foutues délations ! »

L’Intendant laissa retomber le rideau et le véhicule reprit sa route pendant que les fonctionnaires impériaux prenaient possession de la demeure pour la mettre en vente. Après un long silence, le secrétaire de l’Intendant se permit une réaction.

« Etait-ce nécessaire d’en arriver là ? »

Thomas le fixa longtemps, très longtemps, muré dans un silence de mort, avant de concéder quelques mots au fonctionnaire.

« Oui, le Trésor a besoin de ces fonds si nous ne voulons pas que les guildes perdent leur budget mensuel et si nous voulons que la ville puisse se reconstruire rapidement avec des matériaux de qualité. »

« Une famille mise à la porte… »

« Ils ont profité du règne de la Régente, c’est un juste retour de bâton, monsieur Cressen. Cette famille et leurs semblables ont coûté des sommes folles à l’Etat, sans compter la perte démographique qui en découle. »

Au même moment, dans toute la ville, tous quartiers confondus, des perquisitions du même type s’effectuaient sous l’égide des fonctionnaires impériaux. Tous ceux qui avaient dénoncés, tous ceux qui avaient pactisés avec Mala ou participés à ses atrocités furent dépossédés de leurs biens. Une mesure stricte, sévère, voire cruelle, mais qui profiterait au plus grand nombre…