Une volonté dérangeante

Une volonté dérangeante

Post by Nikita, OdS - October 28, 2008 at 5:45 PM

C'était une journée monotone, comme toutes les précédentes depuis le regrettable couronnement de la régente Mala, la folle à lier. On aurait cru que même le soleil fuyait son règne futile et meurtrier. Plus aucun éclat de rire ne se faisait entendre au marché, plus de discussions enflammées, plus de prestations musicales, plus rien. L'endroit semblait morne et dépourvu d'attraits, contrairement à sa réputation. La jeune Clerc s'affairait à compléter quelques achats pour renflouer la réserve de denrées pour le centre d'aide, un projet commun à sa complice de toujours, Juliette. C'est lorsqu'elle pénétra dans sa chambrée au Manoir Balgor que Nikita constata qu'on lui avait fait parvenir du courrier, rien qu'elle attendait précisément. Elle dénoua délicatement le noeud qui retenait sa cape qu'elle déposa sur le dossier d'un fauteuil à proximité. En effet, une lettre avait été déposée à son attention, bien en vue sur son lit. Nikita aggripa une fine lame pour décacheter la lettre et, silencieusement, commença à prendre connaissance de son contenu.

Estimée Clerc,

Je me ferai brève mais facile à comprendre. Certainement, vous connaissez mon célèbre nom, je suis la Baronne Cécillia d'Argentel, la future femme du Marquis Charles D'Ambroise. Nous comptons officialiser nos épousailles d'ici la fin de l'hiver et je tiens à ce que ce soit le Prêtre Galiador Fradriel qui préside cette importante cérémonie. Je ne tolèrerai aucun substitut à cet homme de Thaar. J'ose espérer que sur ce point, je me suis bien faite comprendre. Somme toute, le Prêtre Fradriel n'est plus établi à Systéria. Aux dernières nouvelles, il vivait modestement dans les campagnes enrobant le royaume de Yuriale, à l'extrême Ouest de cet Empire. Sachez qu'il sagit d'un vieil ami de la Famille d'Argentel et qu'il m'est impossible de concevoir son absence à mon propre mariage. Je vous somme donc d'aller le quérir en terres étrangères et de l'escorter jusqu'à Systéria où je saurai le loger et le nourrir avant le Grand Jour. Vous comprendrez que par les temps qui courrent il m'est catégoriquement interdit de voyager, c'est mon futur époux qui n'en serait guère fort aise. Or, il vous faudra accomplir cette tâche pour mon humble personne. Bien entendu, je me doute que cette requête ne vous plait pas, mais sachez que mon fiançé est également très influent parmis la communauté noble systérienne et qu'il serait fort regrettable que votre compagnon, le Sieur De Nogar, soit brîmé dans son ascension vers la gloire et le renom. Lui qui a travaillé si ardemment pour parvenir à ses fins. Il a su attirer l'attention des bonnes personnes, il pourrait aller loin, mais seulement si nous y consentons. Il en va de même pour vous jeune Clerc. Il est donc dans votre intérêt de me rendre ce petit service.

Cordialement,

La Baronne D'Argentel

Rageuse, Nikita froissa la missive et jetta un regard dédaigneux sur celle-ci avant de porter son attention sur le foyer embrasé. Mais cette alternative n'était pas la plus prudente et la jeune femme le savait plus que pertinemment. Il lui fallait répondre au caprice de cette noble insipide et prétentieuse sinon elle ne serait pas la seule à ressentir les conséquences d'un choix hâtif et précipité. Il était assuré que Nikita ferait le choix qui ne comprometterait pas l'avenir de ses proches, même si c'est à son propre détriment, c'est dans sa nature. Après avoir préparé soigneusement les effets personnels qui l'accompagneront pendant la durée du voyage ainsi qu'après avoir été prier au Temple, Nikita se retrouva seule avec elle-même, assise sur son lit, ne trouvant pas le sommeil malgré la rude traversée qui l'attend. Elle s'occupa donc les esprits en fabriquant deux bracelets identiques avec des languettes de cuir rigide, question de faire en sorte que l'aube du jour suivant lui parvienne plus rapidement. De plus, cette nuit là, Nikita avait penser à écrire une lettre à son bien-aimé qui devait être retenu par ses fonctions. Elle tenta de lui expliquer la situation tout en lui épargnant le discours à saveur de menaces de la Baronne, sans pour autant lui mentir.

Mon tendre amour,

Vous écrire cette lettre fût l'une des tâches les plus déchirantes qu'il m'est été donné d'accomplir. Je m'en désole tant, si vous saviez ...
Il me faut prendre la mer vers les terres lointaines de Yuriale, le Royaume gouverné par le monarque Philippe D'Aigrefeu II.
Je dois y retrouver un Prêtre dénommé Galiador Fradriel et l'escorter jusqu'à notre empire à la demande de la Baronne Cécillia D'Argentel, pour que lui seul préside son union avec son futur époux. Je sais qu'il aurait été préférable d'attendre que les circonstances soient plus cléments et sécures, mais elle m'a bien fait comprendre que je risque de compromettre bien des opportunités si je m'imposais contre son caprice, et que les répercutions d'un possible refus d'obtempérer pourraient se faire ressentir sur mon entourage. Je suis peinée d'avoir à m'éloigner de vous en ces temps si difficiles et amers, mais croyez-moi, je ne m'y rend pas selon ma volonté, car s'il n'en tenait qu'à moi, je resterais lovée dans vos bras à jamais, c'est le seul endroit où je puisse ressentir un peu de quiétude. Je n'ai pas su trouver le sommeil cette nuit. Maintenant, le soleil se pointe à l'horizon me rappelle qu'il me faudra quitter Systéria dans très peu de temps. Néanmoins, mon éveil prolongé n'a pas été vain, avec cette lettre vous trouverez un bracelet que j'ai confectionné pour vous, avec tout l'amour que je vous porte. J'en porterai un identique nuits et jours. S'il vous arrive de penser à moi ou de perdre votre merveilleux sourire, regardez ce présent et dites-vous que je prie pour vous à chaque jours, et que mon coeur vous appartiendra jusqu'à mon trépas, et même au-dela.

Je reviendrai avant le printemps, surveillez la venue des lys, elles annonçeront mon retour à vos côtés.

Je vous aime de tout mon âme Brehan, que Thaar m'accorde le bonheur de vous retrouver en santé,

Nikita

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