Un paquet surprise pour Ste-Elisa

Un paquet surprise pour Ste-Elisa

Post by Mr Trovénère - December 20, 2008 at 9:37 PM

C'est tôt à l'aube de ce nouveau jour, alors que les paladins gardant les portes de Ste-Elisa échangèrent leur poste de garde, qu'une faible complainte retentit du petit boisé devant l'édifice médical.

Les plaintes de souffrance déchirèrent les petits gazouillis des oiseaux pour laisser planer une mélopée lugubre sur les environs.
Les deux paladins échangèrent un regard hésitant l'un envers l'autre, puis ils se dirigèrent finalement vers la provenance des cris.

Plus ils s'avancèrent, écartant branches et buissons sur leur passage, plus les sons devenaient distincts. Craignant qu'il pouvait s'agir d'une attaque des trolls qui rôdaient toujours non loin, les deux guerriers saints tinrent fermement leurs hallebardes en mains, avançant d'un pas plus avisé.

Ils arrivèrent finalement à l'endroit qui avait piqué leur curiosité. Au sol, ne se retrouvait à travers les feuilles mortes qu'une grosse poche, déchirée, percée et tachée de sang à quelques endroits. Une fleur de lys blanc était fixé aux liens qui tenaient le sac clôt.

L'un des gardien s'avança lentement pour s'accroupir près du sac où s'échappèrent subitement quelques cris d'effroi. L'homme défit le cordage puis ouvrit le sac sans plus attendre afin de dévoiler son contenu. Troublé par la révélation il porta sa propre main à sa bouche pour étouffer un cris à son tour.

Un jeune garçon, âgé d'environ d'une dizaine d'années, couvert d'ecchymoses et souillé de son propre sang gisait au fond. Sur ses bras chétifs, divers symboles anciens étaient gravés dans sa chair. Ceux-ci ressemblant d'avantage à une langue elfique, quelques idéogrammes pouvaient néanmoins être associé au Prince des Ténèbres. D'autre écritures plus fraîche se retrouvaient également en langue commune sur son torse.

"Je suis le messager, élu parmi les infidèles. Ce jour annonce le début de la fin de tout ce qui fut cher à votre cœur... Appréciez ce dernier levé de soleil, car l'ombre l'engouffrera éternellement dans ses ténèbres tout comme mon regard sur ce monde."

Abattu par cette œuvre démesurément monstrueuse, l'homme de foi ne pu retenir quelques larmes alors qu'il reconnu le visage aux yeux brûlés du fils de l'un de ses collègue. Les marques du prince noir empêchant tout soin possible par la magie divine, il n'eût d'autre choix que de le conduire à l'hôpital tout près.

"À jamais tu porteras le message. Emprisonné dans l'ombre de ton univers, tu ne verras point ta fin approcher. Ta dernière vision sur le monde de chair, te condamnant à une éternelle folie..."

Telles furent les seules paroles que l'enfant semblait pouvoir prononcer inlassablement...


Post by Thomas Bolton, Emp - December 20, 2008 at 11:42 PM

Le Directeur, une fois n’est pas coutume, étudiait divers dossiers médicaux dans son bureau de l’hôpital Sainte-Elisa. Le soleil était à peine levé aussi l’endroit était-il particulièrement calme, même dans l’aile psychiatrique. Les cris de rages de la princesse Mala ne retentissaient pas dans les sous-sols. Uniquement son habituel ronflement hargneux, entrecoupés de gémissements agressifs et irréguliers.

Malgré cela, Thomas arrivait à percevoir le léger fond sonore qui devait alerter les gardes mis à dispositions de la prestigieuse institution médicale. C’était singulièrement déconcertant. Pourtant, l’hôpital étant situé au cœur de la forêt, des bruits étranges il en avait entendu !

Le bruit fut rapidement remplacé par des bruits de métaux qui s’entrechoquaient. Les deux paladins revenaient avec le mystérieux paquet. Attrapant sa canne, l’Intendant se redressa et approcha de la fenêtre. Il vit sortir les gardes des fourrés avec ce qui ressemblait à un petit corps ensanglanté. Voila donc la source de ce fond sonore.

Les grandes portes de bois s’ouvrirent à la volée, des bruits de pas précipités se firent entendre dans les escaliers qui menaient aux chambres.

« Il n’est donc pas mort. »

Le docteur rejoignit alors le petit groupe à l’étage. Une infirmière commençait déjà à déshabiller l’enfant pour le nettoyer. L’eau tiède du bac fut bientôt écarlate. Un des gardes se tourna alors vers Thomas pour lui énoncer une triste vérité.

« Je le reconnais, monseigneur, c’est le fils du paladin Medanin Caran. Un homme noble, il n’y a pas plus lumineux que lui. Il ne lui restait plus que son petiot, qu’il entraînait pour prendre sa suite dans l’Ordre. Il commençait à devenir doué, d’ailleurs. Ah, pauvre petit gars. »

Et le garde exécuta un signe de croix thaarien.

« Messieurs, je vais vous demander de quitter la pièce, je dois m’occuper de ce garçon. »

Et sans leur laisser le loisir de répondre, il referma la porte. Un nouveau bruit de métaux l’informa qu’ils étaient retournés à leur poste.

La canne fut déposée contre le rebord de la petite table de chevet et divers ustensiles furent déposés dessus, ainsi que des fioles en tout genre. L’examen minutieux commença.

« Les deux yeux brûlés. Sûrement à cause d’une lame chauffée à blanc. »

Ses longs doigts fins attrapèrent le crâne de l’enfant pour lui ouvrirent les paupières en grand et les observer de plus près. Le droit n’était qu’un morceau de tissus de brûlés. Une grande partie d’humeur vitrée s’était échappée au moment où le métal avait dû toucher l’œil.

« Voyons voir le gauche. Ah, intéressant. »

Le gauche avait eu de la chance. La brûlure avait été superficielle. Le gamin s’était sans doute débattu pour celui-là. Il le conserverait peut-être si des soins réguliers lui étaient prodigués. L’infirmière Nikita pourrait faire l’usage de ses connaissances théoriques sur l’œil humain.

Le Directeur attrapa une fiole contenant une sorte de baume épais et visqueux et commença à la déboucher quand la porte s’ouvrit à la volée et cogna contre le mur dans un bruit de choc extraordinaire. Un paladin se rua vers le lit, fonçant vers Thomas qui réussit à l’esquiver de peu en effectuant un petit pas de côté.

« Non ! Kaleb ! Pas toi, mon fiston ! Ce n'est pas possible, pourquoi on t’a fait ça ? »

C’était un homme d’une quarantaine d’année aux tempes grisonnantes. Une carrure de taureau, des épaules larges. Un paladin dans toute sa splendeur, dans la force de l’âge.

En larmes et tremblotant.

« Soignez-le, faites quelque chose, mince ! »

« J’allais le faire, paladin. Son œil gauche peut encore être sauvé, mais je dois faire vite. »

Des étincelles lumineuses apparurent alors pendant que le paladin, heurté par la terrible nouvelle d’un fils maintenant borgne, déchaînait la puissance de sa foi pour le sauver.

« C’est inutile, il a été marqué à tout jamais par la magie noire et les fidèles du Prince Noir. Ca ne sera d’aucun effet. »

Et comme il continuait, inlassablement, Thomas quitta la pièce et tomba nez à nez avec les deux autres gardes de l’hôpital, ceux-là même qui avaient découverts le corps.

« Mettez-le dehors si vous avez un tant soit peu d’amour pour son fils. »

Le ton était froid et sévère. Extrêmement autoritaire, même si Thomas n’avait pas haussé la voix. Le paladin fut expressément expulsé de la chambre que le Directeur ferma à double-tour. Retournant à son poste, il appliqua l’onguent sur l’œil gauche après s’être lavé soigneusement les mains.

Son regard glacial examina ensuite les différentes blessures ainsi que les mots gravés dans sa chair. Des cataplasmes furent déposés sur toutes les ecchymoses, des onguents sur les griffures. Deux heures après, l’Intendant sortit de la pièce et retourna à son bureau pour écrire aux principaux intéressés. En descendant il croisa les collègues du père.

« Il s’en sortira, mais il est trop tôt pour dire s’il se remettra de toutes ses blessures. Les dommages mentaux peuvent être irréversibles. »

« Par Thaar ! Que va devenir le père… »

Et c’est sur le ton le plus simple du monde qu’une réponse leur fut donnée.

« Soit monsieur Caran deviendra encore plus impliqué dans l’Ordre, son fanatisme n’aura d’égal que sa tristesse, soit il s’effondrera. Bien le bonsoir. »

Et des missives partirent quelques minutes plus tard. La première, pour l’infirmière Nikita.

Infirmière Nikita,

Par la présente, je vous informe que le fils unique du paladin Caran, un dénommé Kaleb, a été retrouvé il y a quelques heures aux alentours de l’hôpital. Ce dernier a été utilisé dans une cérémonie au Prince Noir. Il est encore en vie.

L’œil droit est total brûlé, le gauche peut-être sauvé. J’ai appliqué un onguent de premiers secours, mais je tiens à ce que vous vous occupiez personnellement de remettre cet enfant sur pied. Physiquement parlant bien entendu. Je crains que son esprit ne soit perdu.

Informez les autorités du Temple que les fidèles des Dieux Sombres ont décidé de faire du zèle. On tente d’atteindre les membres du clergé par des moyens particulièrement insidieux. La Confrérie sera contactée dans l’heure, je vous suggère de mettre en place une entente rapide.

T. H. Bolton, Directeur de Sainte-Elisa

La seconde fut envoyée à Lenne Vespari. Sur la lettre était écrit « A lire, document non-conformiste sur les cultes sombres. »

Magistère Vespari,

Je vous suggère de venir à l’hôpital Sainte-Elisa pour étudier le cas d’un enfant de l’Ordre du Soleil, Kaleb Caran, qui a été victime d’un culte au Prince Noir.
Une prière rédigée en elfe-noir a été inscrite sur son torse ainsi qu’une sorte d’avertissement en langue commune.

L’Ordre du Soleil a été informé de cet incident, je vous laisse prendre contact avec eux pour déterminer d’où vient le danger.

T. H. Bolton, Directeur de Sainte-Elisa

Et enfin, une lettre à Sarälondë Balgor.

Madame Balgor,

Je vous informe qu’une attaque a été recensée dernièrement sur le fils d’un membre de l’Ordre du Soleil, le paladin Caran.

Le jeune Kaleb a été utilisé par des fidèles du Prince Noir dans une cérémonie faite, je pense, à sa gloire. Il est couvert d’ecchymoses, ses yeux ont été brûlés, des mots sont gravés sur son corps.

Faites attention pour votre enfant.

T. H. Bolton, Directeur de Sainte-Elisa

P.S. : Félicitations pour votre accouchement.

La matinée, une fois n'est pas coutume, avait été chargée...


Post by Yuri Minh Yu, AdC - December 21, 2008 at 2:41 AM

Que dire des rumeurs...

Mélodie et une autre infirmière chuchottaient à la lueur d'une chandelle. Elles brisaient le silence lourd que régnait dans l'hôpital après les événements de cette terrible journée.

-Si vous aviez vu l'allure de ce pauvre gamin...

-Ne m'en parlez pas! Je croyais qu'il avait été écorché vif et qu'aucune lanière de peau ne lui restait...

-Et les pleurs de son père, si je n'étais pas habituée à ce genre de pleurs lorsque les gens viennent chercher la dépouille de leurs proches, j'aurais été complètement secouée.

Et les deux femmes continuaient leurs radotages à voix basse, sans se soucier de cette noire ombre qui était tapise au coin de la porte, qui n'avait étrangement pas grincé sur le passage de l'alchimiste. Elle marcha lentement vers les deux employées de Sainte-Élisa, jusqu'à ce que sa silhouette ne devienne visible, comme l'apparition d'un spectre. Il ne va sans dire que Yuri félicitait les bienfaits de sa demi de sang elfique et ainsi des dons de vision nocturne qu'elle lui procurait. Surtout lorsque les deux infirmières hurlèrent d'effroi à sa vue. Mélodie en échappa sa chandelle, puis les paladins qui gardaient l'endroit entrèrent à la volée, empoignant la directrice du laboratoire avec rustrerie. Mais le calme de la dame, ainsi que les torches qu'ils allumèrent à la suite eut raison d'eux.

-Milles excuses madame Minh Yu!

-Tous nos pardons... si vous saviez...

-Ce n'est rien, mes braves, vous ignoriez de qui il s'agissait... Oubliez donc ce qui est arrivé. Retournez garder l'hôpital, le danger rôde peut-être toujours.

Le calme de la voix de la jeune veuve les rassura un peu tant qu'à ce petit événement, et ils retournèrent en chuchottant, à leur poste.

-La femme de Kalidor...

-Tu as brusqué la femme de l'ancien protecteur des vertues...

-Je n'étais pas seul...

-Oui, tu as raison, ce n'est pas le moment...

Et leur voix disparurent derrière les portes. Les deux infirmières se confondirent en excuses, inclinant même la tête. Décidément, les événements les avaient plus marquées qu'elles ne l'avaient cru. Ce sourire, cette étrange gentillesse que démontrait comme à son habitude la directrice Yu semblait, ce soir, effrayant. Peut-être étais-ce la noirceur de ses yeux qui se mariait si bien avec les ténèbres environnantes. Ces ténèbres qui rongeaient leur coeurs par la peur. Mais les deux femmes ne purent se retenir d'avantage, et racontèrent ce qui était arrivé dans la journée. Elles avaient un besoin fou de vider ce qui pesait sur leur coeur.

Alors la directrice vint voir l'enfant mutilé, alors qu'il était secoué par ses sombre songes nocturnes. À la lueur d'une lanterne, elle examina les marques qui n'avaient pas eu besoin d'être pansés. Puis, comme troublée, elle descendit les manches de son gilet pour couvrir ses bras, et remonta ses gants, pour bien cacher sa peau. Un courant d'air, peut-être. Par bienveillance, peut-être, qui sait, elle ouvrit sa mallette, puis laissa un modèle nouvellement développé au laboratoire pour soigner les divers types de brulures, sur la table de nuit avec une simple notice pour celui qui prendrait soin de l'enfant sur les fonctions du baume.

Quelques mots furent chuchottés à l'oreille du gamin, une main au dessus des inscriptions maudites, quelques mots seulement qui purent l'apaiser le temps d'une nuit. Mais dès que les rayons du soleil allaient se montrer, ses souffrances allaient très certainement recommencer. Tel était le fardeau d'être marqué par Le Maudit...

Et comme elle était arrivée, elle sortit de la pièce, se fondant dans la noirceur de la nuit. Où elle pu, au passage croiser un ou deux employés de l'hôpital.


Post by Lenne Vespari, CP - December 21, 2008 at 10:04 AM

« Votre courrier Madame ! »

« Déposez-le avec le reste, là où il vous plaira. »

*Celui qui avait été assigné à la tâche de la distribution du courrier au sein de l'Académie pourpre observa le désordre étonnamment calculé avec un léger malaise. Le méthodisme que lui inculquait ses études de chercheur le mettait à chaque fois inconfortable face à un tel spectacle.

Dans le bureau au sommet de la bibliothèque privée de l'Académie, assombrit par les épais rideaux pourpre tirés contre les fenêtres, les chandelles, posées un peu partout, faisaient danser les ombres dans la pièce. Pour le reste, des livres de toutes sortes, des textes de droit et un volume effarant de courrier couvrait toutes les surfaces, qu'il s'agisse du bureau principal ou du sol.

La magistère elle-même, dans son absentéisme mental caractéristique, étudiait un document à même le sol plutôt qu'au bureau qui lui avait été spécialement construit par l'intendance de l'Académie à sa nomination.

Le garçon ne se questionna pas vraiment plus longtemps -hormis sur l'accession au statut de magistère de la femme- et jeta le courrier aléatoirement avec le reste. Par présence d'esprit, cependant, il fit glisser la lettre de l'Intendant de Systéria près de la nouvelle Juge de manière à ce que l'inscription puisse être lue si son regard y dérivait. Il quitta ensuite sans plus tenter d'engager la discussion avec son excentrique supérieure.

La sollicitude de l'Intendant mêlé à la diligence du jeune chercheur furent probablement couronnés de succès, puisque peu après on vit la femme lentement déambuler, tel un zombi égaré en quête de son but, à travers les rues de Systéria pour s'effacer dans les bois.


Les paladins de St-Élisa avaient déjà aperçu la silhouette désordonnée à l'attitude désaxée et à la démarche malade plusieurs fois pénétré dans l'établissement hospitalier. Aussi ne la questionnèrent-ils pas davantage ; ils présumaient qu'il s'agissait d'une patiente qui venait pour un suivi régulier.

La magistère se rendit néanmoins directement vers la chambre de l'enfant mutilé, vacillant vers son objectif de façon irrégulière, mais assurée.

Son regard apathique marqué d'un vide prenant se posa directement sur celui de l'enfant - ou plutôt sur ce qu'il en restait -. Elle s'approcha de lui sans s'émouvoir tout en maintenant le contact visuel ; ses traits affichant son exubérante neutralité caractéristique. Un initié dans le domaine aurait pu percevoir une aura violacée dans la pièce tout juste avant que la pourpre débute une étude attentive du corps sans chercher davantage à converser ou à justifier son agissement.

Elle se pencha au-dessus des marques et des blessures d'une manière presque exagérée, ses longue mèches tombant sur l'avant et frôlant à peine le corps et les blessures de l'enfant dans son geste. Du bout des doigts elle feint caresser les inscriptions sans pour autant les toucher.

Après une trentaine de minute, elle quitta la pièce, refermant la porte sur sa silhouette sans s'être adressée à la victime, pour le peu que son esprit pourrait la comprendre de toutes manières.

Elle souffla quelques mots, d'une voix particulièrement morne, en passant devant une personne qui les apporterait -par les rumeurs ou par un message plus direct- à celui qui l'avait fait venir.*

« Les caractères elfiques sont propres à la langue des elfes noirs. Ils forment une prière au Prince Noir d'un fanatisme particulier, qui lui souligne d'ailleurs la foi du célébrant par cette offrande. Possiblement une première réalisation ou une initiation.

Quant à l'enfant, son salut est au-delà de la compétence de la Confrérie. Touché par le Prince Noir, la magie ne pourra délier son esprit de cette étreinte étouffante.

..Aussi faut-il présumer que le choix de la victime passe en soi le message de l'auteur. »

Elle reprit ensuite un chemin différent de celui par lequel elle était venue, avant que sa forme chancelante ne s'efface parmi la forêt qui entoure l'hôpital.


Post by Sarä Taur'Amandil, OdS - December 21, 2008 at 8:53 PM

Une lettre de l’Intendant
Le retour d’une crainte jamais dissipée

« Faites attention pour votre enfant. »

Ces mots écrits par l’Intendant étaient des plus évocateurs. S’il prenait la peine de les écrire c’est que lui-même devait avoir au moins un minime doute que le danger pour l’enfant des Balgor était bien réel, sinon il n’aurait pas perdu son temps à écrire pour le simple plaisir d’agrémenter la paranoïa de sa subalterne. Du moins c’est ce que se disait la directrice adjointe de l’hôpital, Sarälondë Taur’Amandil.

À cet instant de la journée la lumière qui traversait les fenêtres de la salle de séjour donnait à la pièce un aspect chaleureux et confortable. Les riches rideaux de velours satinés reluisaient un peu et la forme lumineuse du fenêtrage était visible sur le tapis de bonne facture. Un calme plat régnait dans toute la résidence… Le tic tac régulier d’une horloge, le bruit du fleuve à l’arrière et la silhouette de la vigile qui montait la garde à l’extérieur. Cette sécurité ambiante cependant n’était pas suffisante pour rendre le regard de Sarä moins trouble. Trônait donc dans la pièce la mère et sa fille… Confortablement endormie contre sa génitrice qui la tenait délicatement, assise dans un des fauteuils de la grande pièce.

Le retour de son époux semblait être un événement qui ne surviendrait jamais. Il était sortit faire quelques courses pour sa douce juste avant qu’elle ne reçoive ce courrier de Thomas Bolton. Avec impatience, Sarälondë attendait Mathéo pour lui faire part des tristes événements qui étaient survenus à un confrère de l’Ordre. L’angoisse dans le cœur de la toute nouvelle maman était à son comble. Elle était convaincue que sa précieuse Taräsilmë était menacée… Après tout, Sarä avait reçu de nombreuses missive visant à l’intimider il y a quelques mois à peine. Elle avait émis alors l’hypothèse que c’était ce malade mental de Bennet Vormitier qui était l’auteur de tout ceci, naturellement, il était dorénavant en prison. Mais si elle se trompait sur le coupable de ces angoissantes lettres?

Une silhouette approchait, une belle carrure, un bel homme. Enfin son mari revenait au domicile, quelle mauvaise nouvelle l’attendait.


Le soir était maintenant tombé. Mathéo, à l’étage, prenait soin de la petite Tarä avec une tendre attention. Ému, il l’était totalement devant la petite fille que son épouse lui avait donnée il y avait quelque jours à peine. Il la coucha puis entama d’aller rejoindre Sarälondë dans son bureau au rez-de-chaussé… La médecin de renom si trouvait avec le Paladin Caran, qui avait tant de questions. Cet homme, généralement si fier et droit, un exemple pour tous, était comme un enfant qui avait besoins de se faire rassurer dans le bureau de celle qu’il considérait encore comme la médecin de l’Ordre. En approchant près du bureau à la porte entrouverte, monsieur Balgor put capter ces quelques mots, qui sortaient de la bouche de sa femme. Le timbre de la voix était sérieux, mais empreint de compassion sincère.

« Paladin Caran, Kaleb aurait eu milles façons de mourir de ce qui lui est arrivé… C’était beaucoup plus difficile de trouver comment y survivre… Mais jusqu’à maintenant il y est parvenu. Tout sera fait pour le rétablir et c’est d’une présence bienveillante qu’il aura besoin à ses côtés, la votre. »

Donner de l’espoir à cet homme était-il une façon pour elle de s’en donner aussi? Kaleb s’en sortirait-il vraiment? Elle se doutait bien, avec ce qu’elle eu appris du Paladin, que son fils ne s’en remettrait jamais parfaitement, mais à quoi bon lui dire? À quoi bon saper un homme déjà détruit? C’est d’hommes solides que l’Ordre avait besoins, seulement ainsi les honnêtes citoyens seraient protégés de tout ce mal inéluctable qui rode autour d’eux…