"Je veux vous parler..."

"Je veux vous parler..."

Post by Yuri Minh Yu, AdC - January 9, 2009 at 8:54 PM

Les bruits de pas de l'inquisiteur disparaissaient alors qu'il quittait la veuve Majere devant la tombe de son frère jumeau. Son sombre regard était rivé sur la pierre où était gravé le mémorable nom d' "Elrog Minh Yu". Autour, il était évident que certains pilleurs de tombe avaient tenté de soulever la terre, mais Igor, le gardien avait tôt fait de les en éloigner. Le poing serré gardait le chapelet du grand archevesque qui était pour l'heure porté disparu, ou absent comme les membres de l'ordre du soleil aimaient à le dire.

Lorsque la silhouette de l'homme disparu, et que trois gouttes un peu salées ne s'échappèrent du regard orgueilleux de Yuri, sa main s'éleva pour lancer, dans un geste rageur ce chapelet contre la pierre où ne reposait pas le corps de son tendre frère. Mais, alors qu'il allait quitter sa main, elle referma les doigts pour qu'il ne continue pas sa route et lui éviter de se fracasser contre la stelle froide. Sa tête baissa, une armure de tombée, peut-être, et elle porta l'objet contre sa poitrine, pour laisser sortir un unique hoquet de sanglot.

*** Lorsque les ténèbres rencontrent la lumière ***

"Dame Majère, je voudrais vous parler..."

Pourquoi. Qu'ai-je fait. Je regarde cet homme. Nogar, Brehan de Nogar. La messe est si tôt terminée qu'au contraire à la masse des gens, il s'avance vers moi, jusqu'à me demander un entretient. Ne sait-il pas que du moment où je me retrouve avec un homme, cela ne fait qu'entretenir les potins au sujet du vice auquel je serai bientôt jugée. Pourquoi prend-t-il un tel risque. N'est-il pas effrayé de m'approcher. Je ne veux pas me retrouver seule à seule. Je suis épuisée, j'en ai assez de me battre.

Chaque pas que je fais résonne dans ma tête, peut-être ai-je la mine plus grave qu'il n'en faut. Pourtant à l'habitude, j'arrive à tout contenir. L'homme de foi me précède, nous allons au cimetierre. Au moins, à cet endroit, je suis assurée que ça n'alimentera pas les rumeurs. Je sens l'odeur de l'herbe fraîchement coupée, celle des bouquets déposés sur les tombes des gens aimés, l'odeur de la terre retournée et aussi celle de l'orage qui se prépare. Le temps suit mes émotions. Je suis un nuage trop lourd, noir, comme la nuit, qu'aucun rayon n'arrive plus à percer. Je suis un orage à retardement. Il me tient la porte. Je vais aller devant la pierre d'Elrog. Il me manque. Son beau visage, celui que j'aimais tant, qui me ressemblait tant n'y repose pas. Mais son nom y est gravé à jamais. Cette chair qui est également la mienne, ce sourire, si ressemblant au mien. Tout reste seulement gravé dans ma mémoire.

"Comment allez-vous?"

Mon regard s'égare. Que dois-je répondre à cette question piège? Je cherche. Je ne sais pas. C'est la seule réponse que je trouve à lui donner. "Je ne le sais pas". En toute franchise. J'aurais aimé mentir et lui dire que je vais bien. Mais je sais qu'il ne m'aurait pas crue. Comme s'il venait à lire en moi comme dans un livre ouvert. Je me sens vulnérable, j'ai peur de parler. Pourquoi tant de faiblesse, moi qui à l'ordinaire est si forte. Qu'as cette soirée d'exceptionnelle. Je me retourne un peu et le regarde. Il a les yeux fixés sur moi. Il parle peu, et moi aussi. Je crois que nous arrivons à nous comprendre sans avoir à le faire.

Puis il prend la parole à nouveau, et à mon tour. Bien que c'est un échange de peu de paroles, nous échangeons de façon équivalente. Il cherche à me consoler...? Mais sait-il à quel point sa mission est peine perdue. Il cherche à me ramener vers la lumière, mais sait-il à quel point ce sera difficile. Pourquoi cherche-t-il à faire cela. Pourquoi ne pas seulement laisser tomber. Abandonne-moi à mon sort, Brehan de Nogar, tu y perdras sans doutes plus que moi. Ne comprends-tu pas les ténèbres qui m'habitent, ne t'effraient-elles pas? Comment peux-tu m'approcher sans craintes, sans appréhensions. Avec autant de calme, tant d'assurance que c'est moi, cette fois qui aurait envie de fondre comme un petit beurre. Une petite glace perdue en plein désert. Non. Je ne souhaite plus être sauvée. Laissez-moi tomber.

Je détourne le regard, il a compris qu'il a percé ma défense, j'en suis sûre. J'ai fait la bêtise de laisser mon corps parler à ma place. Ma lèvre a tremblé, j'ai senti mes yeux piquer. Cette fois, c'est arrivé contre mon gré. Il le sait, j'ai vu son corps chanceler. Mon tremplin d'émotions l'a ému, je crois. Non Brehan de Nogar, je ne suis ni une grande Dame, ni remplie de bonté. Pourquoi refuses-tu de me croire? Je suis une demi-elfe noire. J'ai le sang maudit dans mes veines. Jamais je ne serai ce qu'on voudrait que je sois. Pourquoi refuses-tu de l'accepter...

Coup de grâce. Il dépose dans ma main un chapelet Thaarien. Pas n'importe lequel. Celui que j'ai déjà vu, il y a longtemps, accroché à la taille de l'Archevesque. Il me fait peur. Il ne peut pas me donner un objet de cette valeur à leurs yeux. Surtout pas à moi. Reprends-le! REPRENDS-LE!


Les bruits de pas de l'inquisiteur disparaissaient alors qu'il quittait la veuve Majere devant la tombe de son frère jumeau. Son sombre regard était rivé sur la pierre où était gravé le mémorable nom d' "Elrog Minh Yu". Autour, il était évident que certains pilleurs de tombe avaient tenté de soulever la terre, mais Igor, le gardien avait tôt fait de les en éloigner. Le poing serré gardait le chapelet du grand archevesque qui était pour l'heure porté disparu, ou absent comme les membres de l'ordre du soleil aimaient à le dire.

Lorsque la silhouette de l'homme disparu, et que trois gouttes un peu salées ne s'échappèrent du regard orgueilleux de Yuri, sa main s'éleva pour lancer, dans un geste rageur ce chapelet contre la pierre où ne reposait pas le corps de son tendre frère. Mais, alors qu'il allait quitter sa main, elle referma les doigts pour qu'il ne continue pas sa route et lui éviter de se fracasser contre la stelle froide. Sa tête baissa, une armure de tombée, peut-être, et elle porta l'objet contre sa poitrine, pour laisser sortir un unique hoquet de sanglot.