Chroniques d'un bâtard
Post by Silias Alfarsson, Ind - January 15, 2009 at 7:01 PM
LIBÉRATION
- Premiers pas libres en Systéria -
Sur le quai, Aédan plissait des yeux. Le soleil, depuis bien trop longtemps il ne l’avait pas vu et maintenant, il aurait voulu pouvoir s’en cacher quelques instants, le temps de s’y réhabituer. De ce qu’il pouvait entrevoir des ombres de moins en moins floue autour de lui, le quai était bondé de gens qui les entouraient lui, et les quelques esclaves qu’on venait d’extirper de la cale du bateau marchand. On les enfermait à l’approche d’un port de commerce plutôt que de laisser entrevoir par les gens « bien pensants » que le riche capitaine en était encore à utiliser l’esclavage. Mais que faisaient-ils sur la terre ferme, les avait-on vendu à plus offrant?
- Qu'on brise leurs chaines.
Des voix qui s’élevaient autour de lui dans un brouhaha insaisissable, il avait perçu celle-ci avec une clarté providentielle, comme si toutes les autres s’étaient tus et que ces simples mots lui étaient adressés tout particulièrement. Promenant son regard, une fois sa vision légèrement affinée, sur l’assemblé entassé autour d’eux, il réussi à localiser la source de sa libération.
- Vous êtes libre, l'Ordre du Soleil pourra vous aider en cas de besoin.
Une tempête d’exclamations retentie alors tout autour de lui. On acclamait visiblement celui qui venait de prononcer ces paroles. Avant qu’il n’ai pu correctement définir l’homme qui avait de leur offrir la liberté, ce dernier se faufila dans la fouille et disparu de la vue du demi-elfe encore embrouillée. Et soudain il réalisa.
Libre.
Il n’avait plus entendu ce mot depuis bien longtemps. La longévité des elfes coulant dans ses veines, il ne se souvenait plus la dernière action qu’il avait posée de son plein gré, en toute possession de ses moyens. Quelques décennies peut-être? On l’avait prit à la fleur de l’âge, alors qu’il venait à peine d’atteindre l’adolescence. Personne ne s’en était vraiment préoccupé; qui s’interrogerait sur le sort d’un bâtard? Et dès lors, il avait été mit « au service » de ce marchand, trop faible pour tenter une quelconque évasion, trop futé pour mettre sa vie en danger en défiant l’autorité établie à coups de fouet et d’injures. Depuis, son aviron avait été sa seule préoccupation et sa misérable couche qu’il partageait au milieu d’une centaine d’autre, sa seule demeure.
Mais ce port, cette Systéria, lui avait été salutaire; il n’était plus sous l’emprise de ce marchand-capitaine perfide qui décochait des sourires hypocrites aux clients ignorants qu’une centaine d’esclaves étaient tenus au silence dans la cale pour le faire bien paraître. Toutes ces années, il avait tenté de se convaincre que cette existence n’était pas si pathétique et vide de sens, qu’une vie sur les mers l’avait endurcit physiquement aux intempéries et ces heures interminables de travaux - forcés - avaient sculpté une musculature solide mais qui renfermait un esprit à présent vide de toute volonté. Cette nouvelle vie que cette voix lui offrait serait un nouveau départ - ou serait-ce le premier? - et la possibilité d’enfin pouvoir faire ses propres choix.
Vraiment, cette terre lui serait bénéfique après cinquante quelques années sur mer.
Post by Thomas Bolton, Emp - January 16, 2009 at 12:12 AM
Le décret était finalement bien appliqué. Les répercussions internationales étaient minimes compte-tenu des liens diplomatiques entre Systéria et ses alliés. Le professionnalisme du Chevalier-Capitaine Al Kazar et l’entraînement solide qu’il donnait à ses recrues permettaient de faire respecter à la lettre le fameux adage : « Le sol de Systéria affranchit le pied qui s’y pose. » Souvent, les interlocuteurs de l’Intendant lui faisaient des remarques sur cette loi progressiste, voire moderne. Ca l’amusait particulièrement car un tel principe avait déjà été proposé dans les toutes premières législations systériennes.
« Nous connaissons un fort accroissement démographique, monseigneur. Ces dernières semaines ont été particulièrement déterminantes. On constate tout de même une diminution des libérations, les marchands d’esclaves se sont donnés le mot. »
« Il fallait s’y attendre, Cressen. Ce qui importe réellement c’est le bénéfice que nous en tirons. De nouveaux habitants sur les terres de l'empire. J’ai reçu un rapport très intéressant nous indiquant qu’il y avait parfois quelques elfes dans ces groupes. »
« Effectivement, Votre Seigneurie. J’ai pratiqué un recensement. Tenez. »
Thomas examina le registre avec intérêt.
« Sa Majesté El’Aglar sera heureuse de voir que nous avons contribué à libérer son peuple de la tyrannie des marchands d’esclaves, Cressen. Parfait. »
« Autre chose, monseigneur ? »
L’Intendant réfléchit un instant, passant son index droit sur ses lèvres, songeur. Enfin, il ajouta :
« Faites dire à ces nouveaux arrivants que l’Association entreprend un large chantier de construction. Des ouvriers sont demandés. La paie est peu gratifiante, mais ce n’est qu’un début. »
« Bien, monseigneur. Autre chose, monseigneur ? »
« Évidemment, dans le tas, regardez si nous n’avons pas quelques amis un peu trop curieux… »
Une lueur brilla dans le regard de Thomas.
« Oh, bien sûr, monseigneur. Bonsoir, monseigneur. »
Et les deux hommes retournèrent à leur occupation…