Les malheurs de Shandri

Les malheurs de Shandri

Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - May 21, 2009 at 1:57 AM

**La Robe **
Ou comment se montrer pathetique lors d'un rendez-vous

«Retirez-moi cette robe.»

Sa voix était impérieuse et froide, alors que tout son corps demeurait figé, incapable de bouger, comme si l’effort qu’elle avait fait en rejoignant ses appartements ne lui permettait plus le moindre mouvement. Les deux femmes, d’un certain âge, échangèrent un regard devant le caprice soudain de cette petite bourgeoise bregunienne. Douce et chaleureuse, Demoiselle se montrait impassible et sévère, pour ne pas dire spartiate, ce qui aurait été anachronique. Parfaitement droite, trahissant ses origines de la haute société, elle se tenait devant la double fenêtre donnant une vue imprenable sur l’atelier Balgor. Elle attendait, la gorge nouée, incapable de respirer profondément... Que lui arrivait-il donc ? L’angoisse s’immisçait sinueusement en elle, tissant soigneusement la crise, formant cet amas purement fictif au creux de la gorge, mais ô combien douloureux, l’empêchant de retrouver son souffle, l’empêchant d’agir.

Les deux femmes eurent un regard de pitié pour la jeunette désemparée, et surtout pour sa robe féminine. L’incompréhension marquait leur visage.

«Retirez-moi cette robe !»

Demoiselle haussa considérablement la voix en empoignant une lame usée, une petite dague ayant si mal survécue au voyage maritime entre Briganne et Systéria. Elle leur tendait, à toutes les deux, la garde de cette arme, alors que ses sourcils étaient haussés en un rictus douloureux. Demoiselle Eäm’Arylth releva alors sa longue et soyeuse chevelure sur sa nuque, leur offrant son dos et sa chute de reins en toute quiétude. Et, attendant que les honorables servantes l’approche pour taillader son vêtement, la jeune humaine arrachait une à une les fleurs immaculées parsemant sa coiffure. Elle ne supportait plus cette si jolie robe, ces jupons, ce corset trop étroit. C’était sans doute cette robe qui l’empêchait de respirer profondément.

C’est que, voyez-vous, Demoiselle aime à porter de magnifiques robes pour le galant... Et lorsque le galant n’est pas au rendez-vous, et que Demoiselle constate l’ampleur du pathétisme la couvrant, hébétée...

Scrath

Le bruit du tissu déchiré.

La robe en lambeaux rejoignit le sol, couvrant le levraut et les escarpins satinés de Demoiselle. La jeune humaine congédia ses deux complices d’un excès de larmes - comme si ses interminables cils ne pouvaient les retenir-, puis les supplia de la pardonner et de prendre rendez-vous avec Dame Balgor, pour elle.


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - June 22, 2009 at 8:08 PM

La Bibliothèque
Ou lorsque la mort est d'autant plus envisageable que la honte

Voici déjà quelques jours que Demoiselle honorait la Bibliothèque Impériale de sa présence. Elle était l’une des rares citoyennes à se lever dès l’aube, se farder, se coiffer, se parer et s’habiller soigneusement dans l’unique but de visiter les rayons poussiéreux de cet établissement de savoir. D’ailleurs, la journée s’annonçait particulièrement remplie. Elle devait trouver une liste de titres éducatifs mais intéressants pour des enfants de divers groupes d’âge. Demoiselle avait, pour l’occasion, tressé son abondante chevelure noire, c’est pour dire. Ah.... Une marguerite y était plantée. Elle avait réussi à unir confort et bon goût.

Attablée non loin d’un trésor de romance et de poésie, Demoiselle feuilletait fébrilement un livre aux reliures usées signé d’un dénommé Bernardin de Saint-Lierre... Ou peut-être Bernadin de Saint-Hierre ; nul n’aurait su le dire avec précision, l’inscription était endommagée par le temps.

« Il s'approcha de Virginie avec respect : nous le vîmes se jeter à ses genoux, et s'efforcer même de lui ôter ses habits ; mais elle, le repoussant avec dignité, détourna de lui sa vue. On entendit aussitôt ces cris redoublés des spectateurs : " Sauvez la, sauvez la ; ne la quittez pas ! " Mais dans ce moment une montagne d'eau d'une effroyable grandeur s'engouffra entre l'île d'Ambre et la côte, et s'avança en rugissant vers le vaisseau, qu'elle menaçait de ses flancs noirs et de ses sommets écumants. À cette terrible vue le matelot s'élança seul à la mer ; et Virginie, voyant la mort inévitable, posa une main sur ses habits, l'autre sur son coeur et levant en haut des yeux sereins, parut un ange qui prend son vol vers les cieux.

O jour affreux ! hélas ! tout fut englouti. Cet homme, échappé à une mort presque certaine, s'agenouilla sur le sable, en disant : "O mon Dieu ! vous m'avez sauvé la vie ; mais je l'aurais donnée de bon cœur pour cette digne demoiselle qui n'a jamais voulu se déshabiller comme moi."»

Quelle absurdité ! Quelle genre de précieuse préfèrerait la noyade mortelle à l’indélicatesse momentanée de retirer ses vêtements pour rejoindre le rivage ? Demoiselle tournait fiévreusement la page, ses yeux azuréens plein de larmes. Elle cherchait à y lire une fin heureuse : Paul mort de chagrin pour ne pas trahir l’amour de sa Virginie. Jamais elle n’eut le bonheur d’arriver à la fin de ce roman à la morale si grande.

-\tCe siège est-il pris, Demoiselle ?

Demoiselle releva ses yeux encore humides vers l’intéressé pour constater qu’il s’agissait d’un pourpre au sourire charmant et au regard profond. Elle ne put que dénier du chef en retrouvant un léger sourire, sur ses lèvres charnues. L’étage était presque vide et il désirait s’installer à ses côtés. Malgré la mort littéraire de Virginie, la journée pouvait s’annoncer encore lumineuse ! Jusqu’à ce que le pourpre soulève la chaise pour s'installer plus loin, seul, un brin moqueur devant l’air hébété de Demoiselle. Au moins, elle comprenait le désir de Virginie de préférer la mort à la honte...

Oh ! Thaar ! Puisses-tu venir en aide à ta protégée !


Post by Esmeral, Adc - July 1, 2009 at 3:02 AM

Ha le temple et ses couloirs qui se veulent calme et apaisant ou rien ne devait s'y passer. C'est ce qu'on pouvait croire mais ses murs pouvait être témoin d'histoire éphémère remplis d'émotion qui n'avait pas forcement lieu d'être entre ses briques, ce genre d'instant qui semble bénin aux yeux de tous mais si important et révélateur aux yeux de certaine personne qui était vécu à la millième de seconde. Un temps infime, presque un souffle court que pouvait s'échanger deux personnes sans le vouloir qui voulait tout dire, ceci étant bien plus suffisant que des monologues ou des phrases bien faites.
Mais de quels genre de moment pouvons nous imaginez ?

Lui le savait et en souffrait presque malgré ses airs détendus et serein. Ses yeux ne pouvait s'empêcher de chercher cette silhouette, ce visage pour combler un vide comme s'il redécouvrait à chaque fois ses traits et ses mimiques et à la fois ne voulait pas l'oublier. Rester discret c'est tout ce qui l'importait en aucun cas il ne devait se faire découvrir malgré que certain regard appuyé et doux pouvait sans doute le trahir. Jamais il n'aurait dut, comme l'enfant qui joue avec le feu il c'était fait brulé.

Les nuits lui était courte et à la fois longue, à peine levé qu'il pensait à se rendormir pour rêver sans crainte de cette image si parfaite qu'il avait d'elle sans se faire prendre. Ses rêves, sans doute une des seuls choses qu'il pouvait se permettre sans craindre le courroux de quelconque chose, jamais on ne lui enlèverais ça et même si ses derniers était complètement à l'opposé de ce qu'il devait faire il s'en moquait, il aimé en faire d'aussi beau et s'y plaire.
Comment pouvait il ne pas y penser, elle au moins fut honnête et l'affronta en face, quand à lui n'osait rien, non par fierté mais quelque chose lui en empêchait.

Sans doute jamais n'osera t'il se libérer de tout se tourment qui le rongeait petit à petit, oser ne pas oser, le silence sera son allié et la seul flamme qui lui permettra de pallier à ce silence sera ses secondes échangés en toute reserve et timidité.

HRP

Très bon et heureux anniversaire ma Shandri, j'espère que ce texte te fera plaisir autant que moi j'ai pu avoir à l'écrire ! Et puis que tout soit beau pour toi car tu le mérites !

PS:Kamayoukaaaa


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - July 13, 2009 at 7:38 PM

Leçon de harpe
Ou l’apprentissage par la douleur

« Il y a deux moyens d'oublier les tracas de la vie : la musique et les chats. »

Si cet adorable petit chat avait su éloigner quelques tourments de la vie Demoiselle, la musique, pour sa part, en avait ajouté quelques uns. Et de bien douloureux, c’est le moins que l’on puisse dire !

Depuis maintenant deux jours, Demoiselle refusait systématique d’ouvrir la porte de sa chambre, malgré l’insistance de ses confrères et consœurs. Elle demeurait inaccessible, recroquevillée au fond de son lit, le drap épais relevé jusqu’au bas de son nez. Rien ni personne ne put franchir cette porte dorée, si ce n’est que la vieille aide cuisinière qui fut mandatée de lui ramener une large bassine d’eau fumante. Cette dernière pouvait même affirmer que la jeune prélat ne semblait aucunement souffrante, du moins physiquement.

Que c’était-il donc passé ? Seul le chat, désormais compagnon de Demoiselle, aurait pu attester sans l’ombre d’un doute des événements énigmatiques de la veille. Peut-être même trouvait-il Demoiselle particulièrement pathétique ou foncièrement redoutable, si on avait su le questionner sur les récents événements.

Demoiselle sa maîtresse s’était d’ailleurs réveillée en sursaut, la dernière nuit, et avait jugé bon de profiter de ses crises d’insomnie pour s’exercer discrètement à la harpe. La mouvance de ses doigts sur les cordes ne lui semblait pas assez fluide ; c’est ainsi qu’elle tira à elle cette harpe ouvragée et déposa un épais grimoire aux reliures de cuir sur le lit. Après quelques tentatives à peine, Demoiselle se permit de lire une formule ésotérique choisie aléatoirement.

Une force arcanique vibra en elle, lui lacérant douloureusement les tempes. Le chat eut tout le loisir de constater combien il était aisé pour une musicienne de faire perdre conscience à un adversaire. Et combien il était ridicule de se désigner soi-même comme adversaire...

Demoiselle ne quitta plus son lit de la journée, la migraine et la honte ne lui laissant que très peu d’options.


Post by Feu Zaō Minh Yu, AdM. - July 13, 2009 at 10:41 PM

Quand un désaccord heurte les idée d'un médecin de passage.

Un désaccord heurta le front du médecin Minh Yu comme un mur de chaleur peut heurter celui qui tente de le franchir dans un incendie, c'était un désaccord assez fort pour troubler les pensées de celui qui était en train de planifier les interventions chirurgicales à St Elisa en l'absence de la directrice adjointe.

Ses yeux délavés se levèrent vers une fenêtre, quittant le passage en pierre plates pour se diriger et tenter de percer le masque du vitrail de son regard, sans aucun résultat évidement. Il replaça ses cheveux derrière ses oreilles, dévoilant des fines boucles d'oreilles qui détonnaient avec le peu de couleur de sa peau.

Il resta comme cela plusieurs dizaines de minutes, parvenant a détailler l'ombre d'un chat qui se reposait contre la vitre plombée, la cape au symbole de faucon noir trainant un peu dans la boue qui ornait le chemin. Quelque chose avait troublé Monsieur Zao Minh Yu que beaucoup disaient impossible à toucher, inhumain ou encore digne d'un sadisme équivalent à celui de mala la tyrannique qui d'ailleurs était l'un de ses patientes depuis plusieurs années maintenant.


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - July 14, 2009 at 9:29 AM

Docteur Minh Yu
Ou Ces rencontres que nous ne faisons que la nuit

Demoiselle sombra malgré elle dans de longues secondes d’inconfort et d’inconscience.

De longues minutes...

... Où le regard du Docteur Minh Yu scrutait précautionneusement la fenêtre au chat perché. Ça ne pouvait provenir que de cet endroit : seule cette pièce baignait d’une lueur feutrée, dans l’obscurité ambiante. Le chat se retira de la vue de l’illustre médecin, laissant place à une silhouette plus féminine et sensiblement moins féline.

Un visage exsangue fit son apparition à la fenêtre, seule explication de ce voile d’arcane les ayant troublés tous deux. Une jeune femme, la vingtaine. Non, à peine. Et visiblement peu familière à la douleur. Cette dernière se lisait aisément sur son front. Demoiselle tressaillait sous les sueurs froides lui parcourant l’échine, tâchant sans doute de se ressaisir avec la fraîcheur nocturne. Puis son regard azuréen et amandé s’arrêta sur celui de cet imposant personnage au teint si particulier.

Peut-être l’étonnement de cette rencontre qu’elle croyait fortuite pouvait-elle se lire sur son visage brûlant.
Quoi qu’il en soit, c’était elle, hors de tout doute, qui l’avait si étrangement tiré de ses pensées médicales. Et elle l’observait avec une intrigue certaine, nullement méfiante.

Sans doute ne lui avait-on pas fait part de la réputation du Docteur Minh Yu. Que de chance...


Post by Feu Zaō Minh Yu, AdM. - July 14, 2009 at 1:57 PM

Une visite de courtoisie nocturne.
Qui dois alimenter des rumeurs encore…

Impossible de dire le temps qu’il avait passé immobile à scruter la fenêtre ou contre tout attente la silhouette féline avait laissé place à une silhouette humaine. Les yeux au teint délavé du docteur avaient scruté la forme pendant de longues minutes, drapé dans sa cape de poil sombre, un kimono de qualité noué autour de la taille, un foulard autour du cou et une toque en soie couvrant son crâne, tous ces atouts n’étaient certainement pas visible de l’endroit ou se trouvait la dame mais ils n’avaient pas manqué d’intéresser des coupes jarrets de l’endroit.

L’un d’eux s’avança au pas de course désireux de voler la bourse qui pendait à la ceinture du médecin, il le frôla presque mais a un mètre de celui-ci il obliqua vers un mur comme sous l’effet d’un champ de force. Après avoir heurté le mur il resta inconscient un moment avant de prendre sa gorge en main comme si l’air manquait, il resta comme cela à se débattre. Enjambant le corps du voleur qui se roulait dans la boue, le docteur Minh Yu pris la route de la porte d’entrée du bâtiment.

Avait t’il cru percevoir une demande d’aide dans le regard de la dame ? Sa bonté bien que peu légendaire avait t’elle trouvé une faille ? Seul lui aurait pu le dire…

Pendant que le voleur reprenait ses esprits et se trainait à l'écart le poing ganté de Zao s’abattit à trois reprises sur le panneau d’entrée de la porte avant de rejoindre son autre main à son dos. Des commercantes sur le chemin commencèrent à jacasser tout en reprenant le chemin de leur domicile, l'absence de Dame D'Estré sa fiancée de Zao depuis plusieurs mois, l'état de madame Balgor a qui parait t'il l'homme avait offert la clé d'une garconnière près de l'hopital, tout cela était du gout des rumeurs...

Une visite nocturne d'un tel personnage était dangereux pour la notoriété de la demoiselle, elle put même un moment sentir le poids des regards des mégères sur sa personne. Alors que le chat feula et se sauva sous le lit, à l'extérieur sous la pluie devenue rude un invité attendait que la porte s'ouvre.


Post by Feu Zaō Minh Yu, AdM. - July 15, 2009 at 9:38 PM

L'accueil fut froid mais pas glacial, les deux personnes restèrent un instant à se découvrir du regard comme l'on peut détailler un adversaire pour y trouver la faille de son armure. Elle était livide comme épuisée par ses essais, elle en tremblait même tandis que lui, regardant autour de lui semblait très mal à l'aise en cet endroit.

Quelques mots plus tard ils quittèrent le quartier du temple sous la pluie pour s'avancer au delà du pont, à la limite de la basse ville dans un quartier ou se trouvait la résidence Minh Yu. Le mercenaire de garde à l'entrée les salua de la tête avant les voir passer la porte alors que des trombes d'eau continuèrent à s'abattre au dehors. Quelques éclats de voix lui parvinrent mais c'était chose courante de recevoir du beau monde au domaine Minh Yu. Comme à chaque visite, une tasse de thé fut servie mais au moment ou la plupart des invités étaient conviés à quitter la demeure, l'on entendit à l'arrière de la batisse que l'on préparait du petit bois pour le bain, manifestement l'endroit était agréable aux visiteurs et le moment de discussion s'éternisait. Les ragot dirent même qu'à un moment donné les lumières donnèrent à l'étage preuve encore que le Docteur Minh Yu pouvait se montrer très agréable et ce malgré son apparence froide et austère comme une table d'autopsie.

C'est quelques heures plus tard que tous deux quittèrent la demeure pour longer la rangée de maison située à coté du manoir. Les mauvaises langues dirent aussitôt que la belle avait échangé sa pureté contre un toit. Après tout n'était ce pas comme cela que tout se passait sur Systéria ? Un service pour un autre et ce au dépit des on-dit ? D'ailleurs qu'en était t'il de la fiancée du docteur ? Certains disaient qu'il l'avait dévorée tellement il l'aimait, après tout la preuve d'un amour ne mène t'elle pas au cannibalisme ?


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - July 16, 2009 at 12:05 PM

Docteur Minh Yu - II
Ou ces rencontres qui nous mènent à l’aube

Il s’agissait d’un bracelet d’argent finement ciselé où était gravée la silhouette spectrale d’un loup. En sa gueule ouverte reposait une améthyste aux lueurs stellaires, voire irréelles. Si la symbolique du loup, sauvagerie et masculinité, s’avérait étrange pour un ornement aussi fin, le choix de pierre venait en adoucir les crocs mordants. Ainsi, le bijou enserrant étroitement le poignet de Demoiselle fut retiré délicatement. Cette dernière jouait de la pierre incrustée, tournant et retournant le bracelet, afin d’en saisir ses jeux de lumière, à la lueur d’une bougie.

Quel étrange goût en matière d’ornement... Où donc Demoiselle avait-elle eu telle parure ?

L’accueil fut froid et distant. Demoiselle et Zaö Minh Yu s’apprivoisèrent, en quelque sorte. Elle, tremblante de froid sous le peu de vitalité lui restant, lui, perlant de sueur dans cette ambiance étouffante. Ils quittèrent rapidement l’endroit pour un lieu ô combien plus agréable et saint : le manoir Trenor.

Demoiselle tenta d’arrêter ses pensées sur un moment précis de cette rencontre, en vain. Ses migraines avaient quelque peu altéré sa perception de cette nuitée bien précise. Elle parvint néanmoins à se remémorer une odeur particulière et nouvelle, l’eucalyptus, ainsi que le goût amère de thé noir. Les sourires ne se calculaient plus. Et les soins... Et cette manière si particulière qu’il avait de présenter son opinion, à des lieux de celui de Demoiselle... Et ce bracelet. Elle ne retrouva la quiétude du temple qu’une fois l’aube naissante.

Qu’en était-il des rumeurs ? Il avait pris soin de la mettre en garde dès leur rencontre au temple de Thaar, semblant les craindre. Par candeur ou par sagesse, Demoiselle n’en eut cure. Cet homme ne venait-il pas de risquer sa vie pour lui offrir quelques conseils sur les arcanes et s’enquérir de sa santé? Aucune rumeur ne saurait la faire reculer devant la bonté, théoriquement. D’une manière pragmatique, toutefois, il eut été étonnant qu’elle connaisse cette réalité.

Le chat feula et retourna sous le lit. Démontrait-il ainsi l’arrivée d’un cannibale sadique doublé d’un diplôme en médecine ? Demoiselle abandonna des yeux le bracelet inquiétant afin de scruter les rues assombries par la nuit.


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - July 21, 2009 at 12:15 PM

«Dans les temps que nous pouvons nommé préscientifiques, les hommes n’étaient pas embarrassés pour expliquer le rêve. Quand ils s’en souvenaient, au réveil, ils le tenaient pour une information soit bienveillante soit hostile de puissances supérieures, dieux ou démons.»

Sur le rêve
Ou Si tu creuses trop, tu trouveras un noiraud

Je perçois Demoiselle devant moi ; facilement identifiable, sa chevelure parée de lys blancs embaume la pièce sombre d’une douce fragrance d’eucalyptus. Je m’approche alors d’Elle, intriguée de me savoir si étrangement séparée de mon propre corps. Suis-je réellement aussi chétive, au regard des autres ? Je semble si absorbée, le regard perdu au loin. Que regarde-je donc avec autant d’insistance ? Je suis Ses yeux jusqu’à en découvrir une place publique dont le pavé est frappé au symbole de Thaar. À son centre, un bûcher. Briganne, joyau de Bregunia, faisant brûler vive une hérétique.

Je m’approche encore, jusqu’à percevoir une enfant à la peau sombre en qui je reconnais la marquise, cette inquiétante enfant est sans doute morte asphyxiée, alors que les flammes lèchent sa chaire déjà noire. Comment y discerner les régions brûlées et la peau encore fraîche ? Même l’odeur est à s’y méprendre ; je ne rencontre pas celle des chaires carbonisées. Seul le parfum d’eucalyptus se fait sentir...

Je constate que la femme sous les flammes hurle sa douleur, lèvres closes, enceinte jusqu’aux yeux qu’elle a d’argent. Je cris ma stupeur, accompagnée de Demoiselle. Nous hurlons pour arrêter ce massacre : Dame Balgor doit vivre. Lorsque je vois sa peau ravagée et suintante je...

... Demoiselle sursauta brusquement sur sa couche. Sans même s’en rendre compte, elle se retrouva assise aussi droitement que la justice de Thaar. De peine, Demoiselle réussit à extirper son pot de chambre pour s’en soulager l’estomac. Décidément, elle ne digérait que très mal les douces histoires de la Marquise Mel’Viir et du Sieur Minh Yu, avant le sommeil.


Post by Feu Zaō Minh Yu, AdM. - July 21, 2009 at 6:09 PM

Questions sans réponses.

Il est des moments ou la raison ne peut être tenue et cela même en un esprit scientifique. La quête qui est faite par tout un chacun peut trouver un moment de latence mais il est un moment ou l'on souhaite partager ses souvenirs même si ils ne sont pas heureux à raconter. Tout le monde se demande en son esprit comment le saint père jugera ceux qui ont mené une vie plutôt rude lorsque le jour ou la mort viendra les chercher. Les paladins montent des buchers pour y purifier les hérétiques, ils combattent avec ardeur et force, n'hésitant pas à faire couler un sang impie dans les sillons, sont t'ils des victimes pour autant ? Se posent t'ils des questions lorsque leurs yeux se ferment le soir et lorsque les visages de ceux qu'ils ont fait passer de vie à trépas se baladent devant leurs paupières fermées ? Chaque homme le fait.. il en est ainsi.

Doit-on également se poser des questions lorsque l'on a écorché un homme vivant afin de vérifier si l'idée des muscles que l'on s'est fait est correcte ? Doit t'on s'en poser lorsque la médication trop prononcée dans les dosages mène à la mort d'un patient heureusement sans famille ? Dois t'on s'en poser lorsque la moitié de son salaire est donné à un voleur qui ira déterrer l'un ou l'autre cadavre pour que dans la salle d'autopsie vous puissiez comprendre en quoi une jambe brisée peut mener à la mort ? En quoi la mort d'un cheval un soir de tonnerre peut elle attrister une personne qui vous est chère et vous faire poser des questions sur les actes d'une vie entière ?

Qui donc peut être sûr de marcher sur la bonne voie ? Est ce que les prières parviennent à la bonne personne ? Le sommeil ne vient pas facilement lorsque vous êtes l'un de ceux ci... Il semble même vous l'avoir quitté à tout jamais, c'est ce que disais les gens d'ailleurs. Assis dans un fauteuil dans sa maison de campagne, il tendait son esprit vers celle qui avait quitté la demeure quelques heures avant...

La demoiselle aux Lys...


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - July 22, 2009 at 10:56 AM

« Vous ressemblez à Mala d’Systéria, mad’moiselle. En moins grosse... Et en moins blonde, disons en brune. Et avec un visage plus fin... Et vos lèvres sont plus épaisses, aussi. Mais vous êtes sa copie conforme, sinon. Quand elle était plus jeune. »

Décidément, Demoiselle avait le chic pour se retrouver dans les situations les plus inconfortables et humiliantes. Sans doute était-ce le résultat d’une exposition prolongée aux radiations féroces du manoir Balgor : Qui se ressemble s’assemble, disait le proverbe populaire. Et Demoiselle s’assemblait quotidiennement aux occupants de cette illustre demeure.

Petite erreur stratégique. Le vieil homme à la tête blanche lui marmonna cette insulte, au sujet de Mala de Systéria, comme s’il s’agissait d’un compliment sincère. Demoiselle esquissa dans un premier temps un sourire doucement amusé, croyant qu’il s’agissait là d’un trait d’humour. Puis, voyant le regard admirateur du vieil homme, elle prit conscience qu’un vieillard venait de lui offrir le plus délicat discours courtois dont il était capable.

Confinée à ses côtés jusqu’à la fin du voyage, les secousses dérangeantes d’un terrain irrégulier l’obligeant à s’agripper non loin, Demoiselle arborait un air endeuillé à son arrivée à Sainte-Elisa. Elle déposa soigneusement une lettre sur le bureau de l’absent Docteur Minh Yu.

http://www.au-crepuscule.com/forum/viewtopic.php?f=62&t=29628


Post by Feu Zaō Minh Yu, AdM. - July 22, 2009 at 1:43 PM

Le boucher d'Isuki de retour en Systéria.
\tQuand un courrier cause autant de dégat qu'une dague.

Un éclair zébra le ciel d'un arc lumineux, un arbre au loin fit les frais de cette puissance que certains considéraient comme divine, au même moment le trait fut décoché par l'archer. Il était droit et son but visé était visible dans les buissons, lorsqu'il toucha sa cible, le cerf hurla sa douleur une dernière fois et chuta dans la végétation. Rapidement le tireur fut sur lui, ayant échangé son arc contre une dague de Pyrolithe, il enjamba le corps de la bête et souleva la tête par les cornes pour la passer par le fil de la dague, le sang jaillit comme une fontaine pourpre, fontaine qui se tarissait au rythme des pulsations affaiblies. Le docteur Minh Yu, habillé d'une tenue verte sombre se tenait comme cela au dessus de l'animal, un sourire glacial sur le visage. La pluie délavait ses mains tachées de sang, son regard vide posé sur le corps de celui qu'il avait occis si rapidement, ses cheveux pendant devant son visage en tresses sanglantes, ceux qui avaient connu le docteur à son retour de T'sen auraient retrouvé l'homme barbare qui avait débarqué sur Systéria.

Il était tard dans la nuit quand souillé de boue et de sang, il prit place sur l'un de ses sièges de velours qui ornait sa maison de campagne, contemplant l'un des brouillons de ses courriers. D'un bond il se redressa sur ses pieds, renversant table et matériel, dans la main la lettre qu'il avait recu à St Elisa, lecture cent fois relue, le regard levé au ciel, bouche déformée par le cri qu'il adressait à celui-ci, il hurla sa haine tellement fort que les vitres de la maison en tremblèrent.

Peu de gens avaient croisé le docteur depuis la nuit passée et ceux qui l'avaient fait s'étaient sentit mal à l'aise en sa présence, la salle d'attente de St Elisa s'était elle-même vidée de son public lorsque la mauvaise humeur de l'homme s'était fait sentir, comme si confier leur santé à cet homme aurait été un péril en un pareil moment.


Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - August 24, 2009 at 11:09 PM

La lettre
Ou comment être désirable tout en étant couverte de sang.

«Demoiselle Eäm’Arylth, vous avez reçu une lettre de provenance de Briganne... Elle est arrivée ce...»

Un peu à la manière d’une petite fée, Demoiselle tira la missive des mains de l’initiée, filant à sa chambre à toute vitesse! Aussi vite que la décence le lui permettait. Un nouveau petit lièvre sautillait joyeusement à sa suite. Ce dernier remua énergiquement ses moustaches en entrant dans la chambre de Demoiselle, reniflant cette pièce avec grand intérêt. Il y décela sans doute une odeur dégoûtante de ... Eurk ! De félin !... Oui, un chat ! Le nouveau compagnon de chambre de Demoiselle leva sur elle son regard le plus expressif, semblable à celui d’une morue séchée au soleil, cherchant sans doute à la mettre en garde, elle également. Pauvre petit lièvre ; elle ne lui offrit alors qu’un sourire béat en se faufilant avec une grâce consommée jusqu’à l’une des fenêtres donnant sur le manoir Balgor. Ou plutôt le manoir Taur’Amandil, par les temps présents. Oh, Sieur Balgor était soupçonné de ... Enfin, ceci est une autre histoire.

Suite à la lecture de cette lettre, Demoiselle écarta doucement les volets de sa fenêtre, évitant ainsi le moindre bruit pour ses voisins dormeurs. Le spectacle devait sans doute être particulier à voir. La silhouette fine d’une jeune humaine se faisait voir, par-delà l’atelier, vis-à-vis la chambre de Sieur Taur’Amandil. Lorsqu’elle glissa le chandelier contre le revers de pierre de sa fenêtre, son voisin eut tout le loisir de la considérer encore couverte de sang séché, les cheveux légèrement en bataille, battant langoureusement ses longs cils. Mais elle brandissait fièrement un papier plié et souriait, souriait tant, respirant le bonheur, la joie de vivre et l’insouciance...

Il ne fallait plus qu’espérer que seul Sieur Taur’Amandil surprenne ce geste frôlant la pathologie, tant de joie et de papillonnements de cils pourraient brusquer une certaine demi-elfe aux tendances insomniaques...