Vingt ans plus tôt
Post by Delyna Orlanth, FdC - July 28, 2009 at 1:20 PM
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Un pas devant l'autre. Avances petite sorcière, avances... encore un pas... encore un pas.
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Recule
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Vas à Droite
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A gauche, tournes en rond, fais demi-tour, hin hin hin
Les Voix se mélangeaient pour se contredire, pour la perdre. Et elle s'était perdue. A l'origine, Elles étaient intervenues pour l'aider à s'enfuir.
Le regard noir de son assaillant jaillit soudain devant elle. Elle poussa un cri. Pourquoi n'avait-elle pas vu les couleurs de son âme ? Tandis qu'il se jetait sur elle en hurlant de rage, elle réalisa qu'elle ne voyait aucun panache de couleur. Elle n'était pas dans l'entre-deux !!
L'homme la jeta en travers de ses épaules en bougonnant, lui assènant une claque violente sur les fesses qui lui fit pousser un cri de surprise et de douleur, à la plus grande joie de son assaillant. Sa robe légère ne la protégeait pas du froid et ses pieds nus étaient déjà bleus.
C'était l'hiver.
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Boris, bon sang, faut lui mettre des bottes, sinon, elle va geler sur place.
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Elle veut pas, Colimb, j'y peux rien moi, bordel !
Le susnommé Colimb venait de lui enfiler de force un ensemble de fourrure. Elle grelottait de froid... ou était-ce de la peur ?
Boris et Colimb l'avaient récupérée alors qu'elle se promenait, loin de la Confrérie et de la maison pour cueillir des fleurs et des racines. C'était déjà l'hiver et elle sortait peu, la neige lui glaçant les pieds, ses pieds nus.
Elle hurla et se débattit violemment alors que Colimb tentait de lui mettre des bottes fourrées. Il leva la main et d'un revers violent, la frappa à la tempe. Etourdit, elle se sentit partir. Enfin !! Elle montait dans l'entre-deux. Un déclic se fit dans son cerveau et devant ses yeux, le paysage se troubla.
Les deux hommes n'étaient plus que des panaches de couleurs vives. Le feu qui brûlait dans la caverne n'était plus qu'une masse bleutée, un bleu violent et mouvant. Les murs s'étaient estompés. Elle perdait pied avec la réalité. Habituellement ça n'était pas un mal, surtout quand elle avait le contact avec la terre, mais une fois les bottes enfilées, plus aucun contact ne pouvait se faire. La folie était là, elle le savait et ne pouvait rien y faire.
Encore étourdit, elle se laissa porter pendant quelques lieux. Les hommes discutaient ensemble de choses et d'autres. Que lui voulaient-ils exactement ?
Un bâteau les éloigna de Systéria. Ils naviguèrent pendant trois semaines. Trois semaines durant lesquelles Delyna délira.
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Elle doit avoir choper la fièvre... tu ne crois pas ?
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Bordel, c'est bien notre veine. Empêches-la de se griffer la peau comme ça, on va se faire repérer en arrivant si ça continue ainsi !!!
Boris lui tenait les mains. Des sanglots sans larme secouaient la jeune femme. Elle tentait depuis plusieurs jours d'arracher le cuir des bottes pour pouvoir reprendre contact avec le sol. Même s'il ne s'agissait que d'un bâteau. La peau de ses jambes commençait à en souffrir. Ses ongles étaient enfin venus à bout de son pantalon de fourrure et même si les doigts de la jeune demi-elfe commençaient à saigner, elle allait en venir à bout, dussait-elle arracher la peau de son corps pour extirper l'esprit maléfique qui avait prit possession de son corps et l'empêchait de poser le pied sur le sol.
Elle poussa un cri, se débattit, en vain pour l'instant.
Enfin ils touchèrent terre. Ce qui aurait dû être un soulagement pour la jeune femme ne fut qu'un prolongement de son supplice. Elle traînait, malgré la corde qu'ils lui avaient attacher autour de la taille pour la faire avancer. Elle se courbait en deux, bien décidée à retirer la peau qui l'empêchait de sentir la terre. La corde se tendit soudain, la tirant en avant. Elle résista de son mieux en gémissant.
Elle n'avait rien mangé depuis leur départ et c'était à peine si elle buvait. Elle passait son temps à marmonner, à sangloter sans pleurer puis à griffer ses vêtements et ses chaussures. Les deux hommes étaient à bouts de nerfs. Ils n'en pouvaient plus de l'entendre. Rien n'était compréhensible dans ce qu'elle racontait. Ses yeux brillant de fièvre ne les regardaient jamais, à leur grande rage. C'était insupportable.
Pour la centième fois, Boris frappa Delyna en hurlant.
- Je vais la tuer si elle ne se tait pas !!!
Un sanglot lui répondit, accompagné d'un flot de paroles sans logique.
- Ta gueule, la folle !! BORDEL, tu vas te taire ???
Un grand silence lui répondit. Surprit par l'absence de bruits, il se retourna vers Colimb. Lequel ne parlerait plus jamais. Une elfe noire le regardait, avec un sourire ironique au coin des lèvres.
- Vendui, Boris.
Il sursauta. Comment connaissait-elle son nom ? Derrière lui, Delyna s'était remise à se déchirer la peau en poussant des gémissements et en marmonnant encore.
- Ca n'est pas très gentil ce que vous lui faites subir. Non pas très gentil du tout.
Boris eut un ricanement puis se mit en position de combat. Il n'avait pas l'intention de se laisser avoir par une femme. Une boule de feu jaillit soudain de la main de l'elfe pour frapper l'homme de pleins fouet.
Si la douleur fut intense, cela ne suffit pas à l'arrêter. Il se releva en ricanant, toussant légèrement et grimaçant sous la brûlure, mais bien décidé à frapper en réponse.
Ce fut à cet instant que tout bascula. Même l'elfe noire eut un mouvement de recul quand elle vit s'avancer cette étrange troupe vers elle. L'homme poussa des hurlements stridents tandis qu'une dizaine de mains squelettiques lui déchiraient la peau et les chaires. Il hurla encore un peu bien après qu'ils eurent déchiqueté sa gorge dans un flot de sang.
Il ne resta plus qu'un tas sanguinolent de l'homme qui avait voulu faire du mal à Mundus et / ou à Sephyr à travers la jeune demi-elfe. Laquelle n'avait pas cessé de sangloter et de marmonner, cherchant à déchirer ses vêtements et ses bottes, toujours. L'elfe noire n'avait aucun intérêt à se doter d'une compagnie... et encore moins de cette compagnie-là. Elle n'avait cherché qu'à se distraire de son ennuie passager.
La prit-elle en pitié ?
Une fois Delyna délivrée de ses bottes, elles trouvèrent un terrain d'entente et passèrent les 20 ans suivantes ensembles, se construisant petit à petit un petit groupe de compagnons. Et un jour, il fut décidé qu'ils repartiraient vers Systéria. Delyna se réjouissait d'avance de revoir Sephyr et Mundus, inconsciente que 20 ans avaient passé depuis sa soudaine disparition.