Visions d'un nécromancien

Visions d'un nécromancien

Post by Valir Menrul - August 27, 2010 at 5:06 AM


(http://www.youtube.com/watch?v=4fd5JPXSrSo&feature=related)
I. Rêve éveillé

Systéria était devenu le plus hostile des territoires pour l'homme qui, tout récemment, avait été déclaré premier ennemi public de l'Empire. Le peuple alimentait une haine envers lui, mais ce n'était pas réciproque. Valir avait d'autres projets, plus grands et plus personnels que la simple et puérile destruction. Il est vrai que l'esprit de l'hérétique était parfois hanté par des visions enflammées et chaotiques, destinées à l'Empire. Heureusement, sa sagesse particulière savait rabaisser celles-ci au stade de poussière.

Les premiers jours qui avaient suivi son changement de forme ne s'étaient pas montrés des plus confortables. Toutefois, le fait d'arrêter de dépenser de l'énergie vitale pour préserver son image charnelle, comme il l'avait toujours fait depuis des années, commençait à porter fruit. Il reprenait le contrôle, ou du moins, stabilisait ses flux magiques. Progressivement, il apprenait à cohabiter avec les cicatrices que le viol et les abus du Prince Noir avaient laissés, et continueraient de laissés. Il n'avait jamais éprouvé de réelles difficultés à négocier avec ce dieu-oublié qui s'emparait de son essence. Seulement, les temps avaient changés, et l'humain avait passé, ou sombré, dans les abysses d'une étape suivante. Valir Menrul n'était plus, et ce depuis longtemps. Une nouvelle existence prenait vie, un nouveau regard s'éveillait sur Enrya.

C'est ici, en ce 24ième jour de Rougis, que le nécromant saisirait les rennes de son destin. L'heure était venue...


Le Soleil plombait agressivement sur ceux qu'il berçait. Tel la divine autorité de Thaar, il n'épargnait personne et assurait sa suprématie sur le Grand Désert, au Sud. Midi vint à frapper. Valir Menrul était seul, en compagnie des cactus et des dunes. Il parcourait cet océan de sable depuis bientôt six heures. Lent et méthodique, sa démarche était davantage optimisée pour l'endurance qu'autre chose. Il atteindrait son but, lentement, mais surement.

La journée passa sans encombres. L'explorateur-banni rencontra quelques scarabés, serpents, hyennes et autres voluptés désertiques. À chaque fois qu'un vivant venait à l'interpeller, que ce soit par curiosité ou encore par famine, le nécromancien lui réservait une mort radicale et rapide. N'ayant plus de temps à perdre, il se jura d'éradiquer tous ceux qui se dresseraient, indirectement ou pas, devant son éternelle quête.

La nuit tomba bientôt sur les sables dorés. L'estomac de l'humain était vide, mais cela ne savais l'importuner ; ses papilles perdaient intérêt envers les goûts frivoles que tous connaissent. L'énergie vitale qu'il absorbait quotidiennement était suffisante à lui fournir l'étincelle de la vie.
Sa satisfaction se fit tout de même sentir lorsqu'il tomba nez à nez avec cet oasis tant convoité. Il s'y abreuva, comme tout bon humain saurait le faire, puis pivota vers l'objet de son voyage.

Devant lui, un temple à ciel ouvert, antique et modeste, usé par les âges. Le vieillard s'y engouffra, découvrant la porte qu'il désirait passer. Il était là, nez à nez, avec le dernier vestige de Shaelim encore palpable sur ces landes.

Infiltrer le plan des rêves n'était pas chose ardue ; bon nombre d'aventuriers l'avaient fait par le passé. Quant à Valir, il espérait dénicher au sein de ce chaos illusoire ce que les autres n'auraient guère aperçu. Il n'en était pas à sa première visite, son expertise extra-planaire saurait le guider dans ce tumulte hasardeux. Sans plus attendre, le nécromancien quitta Enrya. Son voyage aurait une durée allant d'une minute, à dix ans, s'il le fallait.

Une seconde fois entre les mains d'une divinité, il avait franche conviction qu'il survivrait aux caprices de Shaelim. Cette soif de puissance qu'on ne pouvait calmer, égoïste mais bien réelle, lui fournissait la volonté d'un millier d'hommes.
Que cherchait-il exactement ?


Post by Valir Menrul - September 1, 2010 at 6:20 AM

II. Shaelim

Ça y est, il trempait au coeur du cauchemar.

Peu après sa venue, toute notion temporelle s'était évadée. Le réalisme, aussi vaste et ardu à définir soit-il, avait aussi quitter les perceptions de l'aventurier-planaire. Des centaines de paysages et de lieux avaient défilés sous les yeux de Valir. Des centaines.. c'était ni trop, ni suffisant... il n'en savait rien.
Parfois, les cieux s'emplissaient d'astres variés, pour afficher le néant quelques instants plus tard. Il fallait se méfier de toutes les traces de cohérences ou de logiques ; elles ne persistaient jamais bien longtemps.

Valir marcha des jours, ou des siècles.. cela n'était guère important. Il n'osait s'offrir à une pareille conviction. Marcher était aussi une drôle de manière d'exprimer ses déplacements. Hormis cela, le magicien n'était pas autant déboussolé qu'il aurait du l'être. Ses connaissances planaires et ses perceptions magiques lui fournissait la clairvoyance nécessaire pour ne pas sombrer dans la folie.

"Kaahqnarn'Thhhneh'xul dernière semaine, ..k'dhusa'NEZZ !"

Loin d'être seul, des voix venaient parfois à lui. Elles n'hurlaient rien d'autres qu'un discours complètement hasardeux et indéchiffrable, allant de la langue commune au gloussement dénué de sens.

"Les abus roses et les discussions spécifiques. Enilno Amitlu Drahs Elucsuperc"

Valir survivait du mieux qu'il pouvait, tentant de filtrer le réel de tout le reste. Constatant bien vite de l'ampleur de cette tâche, il se contenta d'observer, demeurant ouvert d'âme et d'esprit à ce flux farceur que lui imposait la Créatrice.

"English isn't from this world."

"Ar gjie méfs efi ??91 f2f2q2 é#.!!$$!"

Le tourbillon s'agrandissait, et bientôt, les voix semi-lucides laissèrent place au ricannement féminin de Shaelim.


Le vieillard tomba à genoux, les deux mains sur l'énorme cristal, au fond du temple. Il ferma les yeux, se nourrissant aussitôt d'énergie vitale ; oui, il était bel et bien de retour sur Enrya.

À l'extérieur du monument, le sable lui dévoila ses empreintes laissées plus tôt. Son voyage avait donc été considérablement court. Devait-il en penser quelque chose ? Visiblement, il n'était pas prêt. Pour l'heure, il avait d'autres projets. Des projets plus réels, plus Enryens.

"Kal Ort Por."


Post by Valir Menrul - September 9, 2010 at 4:08 AM

III. Lenne Vespari

La disparition du cadavre de la mystérieuse et respectée Magistère Pourpre avait été l'argument principal de l'Empire pour isoler le nécromancien de la société. La poussière commençait à retomber, et les discussions systériennes étaient de moins en moins concernées par le morbide enlèvement. Alors que la Confrérie oubliait peu à peu ce vol inattendu, le ravisseur y nourrissait encore un intérêt distingué. Il n'avait tout de même pas commis cet acte dérisoire par simple plaisir ; il n'était pas encore fou.


Une étincelle bleutée apparut, et le vieillard en jaillit. La pièce baignait dans l'obscurité totale, privée de fenêtres et de chandelles. Le magicien marmonna une incantation, puis cligna des yeux, observant désormais les lieux d'un oeil nocturne et félin.

L'espace y était restreint, et le silence lourd et parfait. Il s'agissait d'un sous-sol entouré par quatre murs de bois renforcés. Dans l'un des coins Nord, une échelle donnait sur une trappe dûment barrée. Toutefois, dans le coin Sud, le magicien ouvrit une seconde trappe, davantage masquée sous les déchets que verrouillée par une serrure. Il s'y engouffra avec aisance, visiblement habitué des lieux.

En refermant le panneau de bois au dessus de lui, une seule seconde fut suffisante pour que ses pieds refoulent un sol concret. Valir était alors nez à nez avec un mur de pierre humide, au cœur d'une pièce bien plus petite que le modeste sous-sol d'où il provenait. Sa main osseuse effleura les briques, puis l'une d'entre-elle enclencha un mécanisme sourd. Un passage s'ouvrit enfin, et le nécromancien s'y engouffra, le pied ferme et volontaire.


Désormais dans un vaste réseau de couloirs, sa démarche devenait plus sinueuse. Sous la lueur des torches, l'homme marchait seul dans ce dédale sous-terrain. Pourtant, milles et uns murmures saluaient son passage et sa venue ; il ne cessait pas sa visite pour autant.

Quelques minutes furent nécessaire pour qu'il débouche dans la pièce voulue. Elle était plus grande que les autres, et le plafond y était beaucoup haut. Son architecture restait tout de même des plus simplistes. Des sources lumineuses parsemaient les murs, plus qu'ailleurs dans le réseau de corridors. Au centre de la pièce s'étendait une grande table, recouvertes d'objets alchimiques et occultes. Les comptoirs qui entouraient le tout affichaient des profils similaires.

Pour une première fois depuis plusieurs minutes, Valir n'était plus la seule chaire visible. Dans ce laboratoire secret, une étrange créature ailée, couverte d'écailles pourpres, pu accueillir le nécromant.

"Salutation, Deandra.", clama le vieil homme, d'une voix familière.

"Ssssoit le bienvenu. Que puis-je faire pour toi aujourd'sss'hui ?", demanda la femelle draco.

"Je viens pour constater de son état."

Alors, la femme ailée s'éxécuta, faisant signe à Valir d'emboîter le pas. Tous deux, ils se rendirent devant une petite pièce, isolée par une grande porte d'acier. Deandra déverrouilla celle-ci et poussa l'imposante barrière. Dans ce petit endroit, un froid arctique régnait, magiquement généré par des cristaux de glace soudés aux quatre murs. Le nécromancien ignora ce véritable souffle nordique et gagna le centre de l'alcôve où reposait, inerte, le cœur de ses aspirations. Au sein d'un massif bloc de glace était emprisonné le cadavre de Lenne Vespari. Le visage de la femme faisait surface, figé dans une éternelle neutralité.

Valir contempla l'état du corps de longs instants, tandis que la draco, fanatique des climats chauds, demeurait sur le pas de la porte. Bientôt, sa voix reptilienne mais tout de même féminine parvint aux oreilles du vieillard.

"Devra t-elle resssster ici encore bien longtemps ?"

"Je n'ai guère encore trouver âme assez forte pour occuper son enveloppe. Cela viendra. Poursuivez la cryogénie.", lança Valir, davantage pensif qu'impératif.

"Entendu."

Puis, les deux individus quittèrent les lieux comme ils étaient venus.


Post by Valir Menrul - October 5, 2010 at 5:39 AM


(http://www.youtube.com/watch?v=V5X6zUdmTTc&feature=related)

IV. En route vers Kazad'Iaur

La nuit, ce soir, était comme les précédentes, et probablement comme les suivantes. La lune profitait de l'absence de son homologue ensoleillé pour illuminer le contient Systérien. Quant aux criquets, ils gazouillaient, veillant sur les landes endormies.

Des vagues fades et calmantes venaient langoureusement clapoter sur la berge. Deux individus à la peau d'ébène emmitoufler dans des grandes robes transportaient des caisses sur une petite embarcation qui, avouons-le, était fort discrète. Ils effectuaient le tout en silence, sous l'œil d'un vieillard qui, pour sa part, toisait l'horizon marin.

"Avec toute votre fortune dans ces caisses, les nains seront bien contraints d'ignorer votre taille marginale.", tenta une elfe noire, brisant ainsi le silence.

Le vieil homme s'avança dans le sable de la plage, rejoignant ceux qui terminaient alors le chargement. Un simple sourire de satisfaction se grava dans ses lèvres délavées. Sa main, fluidement, décrocha et projeta une bourse vers le mâle drow, muet jusqu'alors.
Puis, ce même homme prit enfin la parole.

"Je vous remercie, tout est prêt maintenant. Prévoyez-vous y rester longtemps ?"

"Je l'ignore. Contentez-vous de suivre le plan à la lettre.", conclu donc sèchement le passager, visiblement prêt à partir.

Valir posa pied sur le pont du navire, puis, d'un geste calculé, il somma les drows de pousser la petite nef. Les caresses aquatiques emportèrent alors la coquille de bois, et les deux autres s'estompèrent arcaniquement.
Ainsi, plusieurs minutes s'écoulaient. L'œil spectateur du nécromancien contemplait Systéria qui, peu à peu, devenait simple poussière.

"Que tombe une pluie d’or et d’argent !"


Post by Valir Menrul - October 23, 2010 at 3:08 AM

V. Dans les mines de Nox

Les collines escarpées du continent accueillaient deux individus qui s'y aventuraient depuis maintenant plusieurs heures. Tardivement, l'aube se levait à l'Est, éclairant les débuts d'une journée qui s'annonçait grisâtre. Thorûl'Karan, riche exportateur d'Azgal'Ankor, menait fièrement l'expédition. Derrière lui, Valir Menrul suivait, la canne à la main.

"On arrive bientôt, m'sieur l'humain !"*, s'enquit Thorûl, brisant le silence montagneux et matinal. *

Ils poursuivirent leur dédale rocheux pendant quelques minutes. Puis, au tournant d'une paroi, le lieu tant convoité se montra enfin. Un pont de quelques mètres bordait un précipice sans fond, puis, un peu plus loin, l'entrée d'une mine se dressait, gardée par deux statues austères.
Une fois la traversée complétée, le duo s'engouffra dans la caverne. À proximité de l'entrée se trouvaient une dizaine de caisses de facture naine, visiblement bien scellées.

"Dit euh'm.. T'oublie mon nom, après ça, hm ? Si ça se sait que j'vend ça, m'a avoir des prôblemes moé !", précisa le nain, tout de même conforté par la somme systérienne qu'il toucherait.

"Ouvrez une caisse et montrez moi la marchandise."

Thorûl dégaina un marteau et s'exécuta, retirant les clous de leurs confortables socles de bois. Les mains de Valir s'emparèrent alors d'un cristal de Nox, véritable joyau, aussi flatteur que l'émeraude et aussi nocif que l'acide. Son regard de braise y plongeait d'interminables analyses, taquinant la patience radicalement courte du nain. Il testa la marchandise, et une vive lumière verte fut plaquée contre les parois de la mine oubliée. Thorûl, parfait néophyte de la magie, ne masqua pas ses craintes.

"Oh, m'hhf ! Tout va bien, m'sieur le.. magicien ? C'est d'la bonne rocaille que j'vous ai donné, j'vous.. j'vous jure, j'y'suis pour rien moé !", débala Thorûl, gagnant en nervosité.

"C'est parfait.", consola le nécromancien, après les succès de son sort d'essai.

L'expert-mineur extirpa un rire grossier, mentalement disposé à profiter de sa grasse paye dorée qui l'attendait à la Capitale. Il conclu l'échange et adressa d'amicales salutations à Valir, qui, quant à lui, se contentait de sourire.

"R'venez m'voir si vous z'en voulez plus. Y'en as jusqu'en enfer, du Nox.. !"

Puis, le petit homme s'en retourna dans les montagnes qu'il connaissait bien. Une fois qu'il eut quitté le champ de vision du Systérien, ce dernier déchira l'air du bout de son bâton.

"Vas Rel Por".


Post by Valir Menrul - November 10, 2010 at 11:39 PM

VI. Une soirée ordinaire

L'exil de Valir Menrul remontait déjà à trois ans. Depuis trois ans, il n'avait pas remis les pieds dans la Grande Systéria. Du moins, pas grâce aux moyens physiques et conventionnels. De plus en plus fréquemment, il lui arrivait de ressentir le pavé des rues sous ses chausses. Illusion sensorielle certes, mais tout de même source de multiples nostalgies. Ses pieds étaient trompés par les folies de son esprit mentaliste, qui, avec aisance, parvenait à simuler la sensation du sol Systérien sous ses pieds.

Il évitait toutefois d'y accorder une importance particulière. Tout avait été pour le mieux, depuis ces trois années. Son objectif tant convoité semblait s'approcher quotidiennement, ou alors cela n'était qu'une autre chimère de ses désirs les plus intimes.

Ce soir, le nécromancien n'avait aucun projet concret. Depuis quelques temps, il crèchait dans une vieille crypte oubliée, au fin fond de la Grande Jungle. Bien que les chances d'être retrouvé dans un pareil trou humide et hostile étaient faibles, Valir observait ce soir son abri pour une dernière fois ; il lui faudrait, une fois de plus, s'adonner au nomadisme. Il partirait à l'aube.

Le vieillard avait passé la nuit à bouquiner. L'ouvrage antique qu'il tenait entre ses mains datait d'avant l'Empire. La langue employée était simpliste, donc progressivement déchiffrable. Des semaines avaient été nécessaires pour qu'il puisse peu à peu saisir la syntaxe, la logique et l'essence de ce dialecte perdu.
Alors que les perroquets et autres voluptés tropicales clamaient bruyamment la nouvelle journée qui naissait, Valir rangea son vieux bouquin dans ses effets. Il s'approcha de l'unique soupirail de la crypte, puis s'exprima de vive voix.

"Le jour se lève, Karlaxle.", dit-il

Un peu plus loin dans la pièce, un brouillard noir et éthéré flottait. En entendant son nom, le spectre quitta son statut végétatif et tourbillonna jusqu'au nécromancien.

"Nous partons ?"

Valir prit d'abord le temps d'éteindre toutes les bougies allumées avant de répondre à son compagnon éthéré.

"Qu'a tu appris dans les visions, ce soir ?"

Karlaxle voltigea jusqu'à lui, puis souffla sur son visage les réponses à ses requêtes. Il posa dans les mains de son maître un cristal bleu azuré, puis, presque pédagogue, il se contenta de déballer ce qu'il avait psychiquement vu et entendu.

"La nouvelle secrétaire de l'Armée des Mercenaires, une rousse nommée Ducan, n'est pas très appréciée par ses pairs. L'Ordre du Soleil et la Confrérie Pourpre ont été démocratiquement recompensées pour des motifs inconnus. Il y a un nouvel enseignant à l'école de la Basse-Ville. Le Bibliothécaire Impérial couve une vilaine grippe. L'impératrice cède sa place et un évènement privé semble être organisé. Une alchimiste Pourpre nommée Vayda Calyope ouvre un énième service chimique dans la Cité. C'est tout."

Valir termina les derniers préparatifs et se retourna vers la forme abstraite qui le suivait partout.

"Un évènement privé, dis-tu ? Dans ce cas, il faudra préparer mes plus beaux habits.", clâma Valir, amusé.

"..."

"C'était une blague, Karlaxle... Tu devrais rire parfois, cela serait bénéfique pour ton teint.", précisa le nécromant, véritable humoriste.

Ils s'en allèrent alors tout deux vers le prochain trou humide qui saurait les abriter. Valir avait encore le temps nécessaire pour trouver une taupe et une stratégie d'intrusion. Assister à un dîner impérial, qui pouvait demander mieux ?


Post by Valir Menrul - November 17, 2010 at 1:41 AM

VII. Loisirs & Réflexions

"C'est à votre tour, maître."

L'oeil de Valir était à cet instant attaché à une drôle de figure qu'affichait le Journal de Systéria. Il s'en détourna et sa main vint se saisir d'un pion pour poser ce dernier un peu plus loin. Karlaxle se pencha sur l'échiquier, émettant un grognement en guise de réflexion.

"Voilà un bien étrange schéma dans l'édition d'aujourd'hui.. peut-être une propagande de la Créatrice... J'ai néanmoins toujours alimenter un sévère intérêt envers les fidèles de Shaelim. Puissent-t-ils être plus nombreux."

Les longs doigts boucanneux du spectre s'enroulèrent autour d'une pièce, et il joua son coup. Le vieil homme centra alors son intérêt sur le plateau de jeu, dépensant quelques instants avant de répliquer.

"Êtes-vous réellement intéressé par cette déesse oubliée ?", s'enquit Karlaxle, avant de jouer.

"Évidemment. Il n'y a rien de plus fascinant que le désordre et le hasard créatif.", combla alors Valir.

Ses arcades sourcilières complètement imberbes se froncèrent. S'en suivit alors un discret sourire sur les lèvres plissées du vieillard.

"Échec et mat, Karlaxle. Tu en es à ta seizième défaite consécutive, ce mois-ci. Mon serviteur éthéré aurait-il les idées embrouillées ?", ricana le vieillard.

Il se redressa sur ses pieds, prenant appui sur son long bâton couvert de nécrolithe. Ses pas l'amenèrent devant le foyer qui crépitait depuis maintenant plusieurs heures. En échappant un confortable soupire, il posa sa carcasse dans un grand fauteuil.

"Ajoute une bûche, Karlaxle."

Le spectre fondit alors dans les ténèbres de la petite pièce, se représentant avec un objet cylindrique dans les mains. Une fois le combustible jeté et condamné, les flammes complètement naturelles s'agitèrent de nouveau.

"Est-il nécessaire de faire abstinence de magie arcanique quant à ce feu ?", demanda le spectre, sans pour autant s'afficher dérangé.

*Valir emboîta ses mains l'une dans l'autre, au delà de ses cuisses. Ses iris orangés demeuraient fixés sur le contenu du foyer, insondables et rationnels. Karlaxe se posta, dans un timide sifflement, aux cotés de son éternel dominateur. *

"Acturus Polymaro, célèbre artisan, a récemment succombé à une mort qu'on annonce accidentelle."

La tête nue de l'humain pivota vers le majordome immatériel qui croisait le regard du nécromant. Revenant vers le feu, Valir secoua une main imprécise dans l'air ambiant, déclinant avec indifférence la morbide nouvelle.

"Cela n'est pas étonnant, compte tenu de ce monde injuste. Thaar a toujours fait preuve d'un brin de négligence."

"Pour quelles raisons ?"

"Acturus erre éternellement dans le Moyen-Astral alors que je m'adonne aux échecs avec un esprit-distrait victime du règne de Vérence Ier."

Le vieillard conclua avec un sourire, puis se frotta les mains.

"Maintenant, retourne monter la garde à la surface."

Et Karlaxle s'en alla, sans un mot, laissant l'homme à ses méditations.


Post by Valir Menrul - February 28, 2011 at 1:11 AM

VIII. Liche Manquée

Ses yeux s'ouvrent, puis se referment, aveuglé par une lumière qui n'existe pas.
Ils ré-aperçoivent l'obscurité pour la première fois. Valir Menrul se réveillait enfin de cette latente hyperconscience qu'il s'était imposé.
Cet état avait constitué son existence depuis plusieurs mois. Les caprices du Prince Noir avaient su se montrés plus vigoureux.. encore plus injustes qu'ils ne l'étaient déjà. Il avait du agir avec précipitation, rattrapé par le temps. Ses esquisses et ses plans, loin d'être prêts, avaient été exécutes alors qu'un manque de confiance le rongeait.

Le corps frêle et maladif du nécromancien avait reposé jours et nuits, inerte, sur un grand tombeau de pierre. Une pierre si froide qu'à son réveil, il ne l'a ressentait plus sous son poids modeste. Avait-il réussit ? Connaîtrait-il enfin des jours éternels ?

Le nécromant serre ses poings de peine et de misère, sans en pré-sentir la poigne. Vraisemblablement, son corps est encore endormi. Plusieurs minutes passent, et il se contente de cligner des yeux à fréquence de plus en plus régulière. Bientôt, son regard perçoit le message qu'il avait lui-même gravé au plafond, quelques mois plus tôt.

Bon réveil, nouvelle-liche. Voici ce que tu dois faire :

Passe une enrichissante éternité..
Toi-Même

Alors qu'il terminait sa brève lecture, ses oreilles purent percevoir la profondeur de l'endroit humide qui l'accueillait. Ses yeux se refermèrent et il commença sa réhabilitation. Ses muscles invisibles et mentaux se dénouaient progressivement; était venu le temps d'activer sa dernière et éternelle carcasse. Ses poumons s'ouvrirent puis eurent une mauvaise surprise. Sa toux était si tranchante qu'elle aurait pu être suffisante pour le décapiter. La respiration viendrait plus tard. Ses pieds et ses mains s'éveillèrent et bientôt, il se redressa en position assise.

La panique s'installa lorsqu'il aperçut la charogne qu'il était devenu. Plus mince que jamais, son passé humain était désormais perdu. Valir Menrul était maintenant un être dé-séché et aussi maigre qu'une branche d'automne. Une crainte, bien précise, s'éveillait alors. Il se fit tombé de son lit de pierre et c'est à cet instant qu'il étouffa une sorte de sanglot. Sa main tremblante et squelettique vint saisir le phylactère situé sous le grand cercueil qui l'avait soutenu. Ce cristal de Nox était fendu, de la tête jusqu'à la racine, et au grand malheur du nécromant, aucune lueur n'animait la pierre.

Sa défaite était assurée, il avait échoué.


Il demeura de longs instants à pleurer sa perte, sans sons ni larmes, fixant ce joyau qui l'avait trahi. Puis, au paroxysme de sa rage, il aspira le petit objet qui s'égrainait face à la haine du nécromancien.

Du calme..
Il était temps de revoir son serviteur.


Un spectre, plus vif et plus énergique que son maître, vint illuminer la pièce de sa présence.

"Karlaxle..."

La voix du dominateur était si traînante et douloureuse que les rôles semblaient inversés. Il s'approcha de son compagnon, mais une faiblesse l'entraîna contre le sol hostile.

"Vous avez échoué, Maître."*, conclu Karlaxle, avec un ton franc. *

"Il me.. faut.. une.. nouvelle envelo.... ... Heeehh ..."*, soupira la pauvre goule, étendue au sol. *

Alors que quelques spasmes animaient la faible carcasse, le loyal serviteur s'exprima de nouveau.

"Beaucoup d'évènements ont eu lieu durant votre hyperconscience. Systéria est désor..."

"Silence.. !", hurla le cadavre, pour le peu d'énergie qu'il avait sous la main.

"Je ne veux .. pas entendre parler... insectes mortels... ... Apporte.. mes cristaux...", puis, il reprit son souffle longuement.

Le besoin d'un nouvel hôte pour l'âme du nécromancien se montrait de plus en plus urgent. Une telle tentative d'immortalité soldée par un échec entraînerait bientôt sa perte s'il n'agissait pas à temps. S'il voulait éviter l'abysse et réessayer un jour de s'élever vers l'éternité, il devait reprendre la forme dans une demeure propre.


Post by Karlaxle - June 13, 2011 at 4:57 AM

IX. Où êtes-vous, Maître ?

Pataugeait dans les bois un loup à la fourrure de jais. Ses reflets bleutés rappelant l'essence bannie de la nécrolithe, il s'efforçait de demeurer en retrait de quelconque regard trop curieux. Les autres canins évitaient l'étrange créature, définitivement magique, sans pour autant la craindre maladivement. Quant aux autres bestioles qui peuplaient les clairières, elles restaient tapis dans leurs cachettes au passage de cette anomalie à quatre pattes. Le rejeté n'en faisait pas tout un plat pour autant, car sous cette illusion de fourrure et de crocs, il y avait plus qu'un simple loup. Loin d'être délivré de son éternelle servitude, Karlaxle était condamné à cette forme physique que son maître lui faisait toujours adopter jadis, lorsque la violence montrait le bout de son nez. Il avait pu échapper à Aube Minh Yu, mais Valir Menrul seulement était en mesure de le libérer de sa malédiction.

Karlaxle avait eu vent du vol commis à Sainte-Élisa. Le cadavre de son dominateur avait été enlevé. Il savait néanmoins que ce n'était guère un drame ; personne ne serait en mesure de ramener le nécromancien à la vie, et ce pour une raison bien simple : Il était toujours en vie.

Aube Minh Yu, bien que ses connaissances magiques soient avancées, avait, visiblement, négligé un élément important. Cet élément, probablement détail parmi tant d'autre dans le jargon des mages et des sorciers, échappait à Karlaxle. Toutefois, il était le mieux placé pour ressentir, jusqu'au dernier de ses poils, que l'existence de son patriarche perdurait toujours sur Enrya.


Depuis trois jours, le fauve s'aventurait dans les bois, à la recherche d'un endroit bien précis. Il possédait les capacités musculaires et l'endurance d'une vingtaine de loups, certes, mais l'odorat et l'ouïe que devait lui conférer sa forme étaient altérées par les flux nécromantiques le rongeant jusqu'à la cime de son âme. Au crépuscule du troisième jour, il atteint finalement sa destination. Il s'agissait d'une caverne très sommaire, à plusieurs kilomètres des mortels, des systériens, et d'Aube Minh Yu.

Pénétrant dans la tanière de pierre, l'animal s'arrêta, plus alerte. Bientôt, une lueur blanche vint illuminer les parois de la grotte et un spectre entier se distingua de cette tempête lumineuse. Il foudroya le loup d'un regard invisible, ou plutôt, d'une pensée qui reconnaissait l'existence de celui-ci. Quant à Karlaxle, il n'affichait aucune réaction ; il était un spectre également, après tout.

"Valir Menrul... ", souffla le spectre, avec douleur, détectant l'essence du dominateur.

"Je ne suis pas Valir Menrul. Je suis son serviteur, Karlaxle. Soit néanmoins assuré que mes paroles soient les siennes."

Pendant de longues secondes, le fantôme considéra mentalement la situation. Puis, alors que sa teinte s'accentuait, il s'exprima de nouveau.

"Karlaxle, que viens-tu faire ici ? Ton maître ne nous a pourtant jamais réveillé, après nous avoir envoyé dans les bois, jadis."

"Nous avons été séparé. J'ai besoin de ton assistance pour pouvoir le relocaliser.", répondit Karlaxle.

À nouveau, l'apparition trempa la caverne dans un silence morbide, perdu dans ses réflexions.

"Je t'aiderai... si Valir Menrul offre, à ma conscience ainsi qu'aux miens qui lui portèrent main forte autrefois.. le repos éternel que nous méritons."

"Ce sera au maître, et à lui seul, d'en décider.", termina le loup, fermement.

La nuit tombait sur les landes, couvrant les dominés dans l'obscurité. Ils se mirent alors à la recherche de celui qui, pour eux, jouait dans cette nuit noire le rôle de l'unique lanterne.


Post by Valir Menrul - July 3, 2011 at 3:10 AM

X. La Fête des Opprimés

Depuis le couché du Soleil, ils avaient commencés à se rassembler. Un évènement festif allait avoir lieu ce soir, sur le continent Systérien, comme à chaque décennie, depuis plusieurs années. Le site, différent à chaque fois, était tout de même discret. Centré dans une clairière entourée par les profondeurs dangereuses et hostiles de la Grande Jungle, il y avait peu de chances qu'un voyageur trop curieux y accède par hasard. Un tel incident est déjà survenu par le passé, et n'a pu se conclure autrement que par un douloureux bain de sang. À mesure que les participants arrivaient, les bruits grandissaient et les discussions se multipliaient. Les témoins de cet étrange évènement qui s'apprêtait à avoir lieu étaient visiblement triés au peigne fin ; lorsque qu'un nouvel individu jaillissait des denses feuillages, son identité était validée par les autres déjà présents. Toutefois, plus la soirée avançait, plus l'on négligeait cette vérification.

Au centre de la clairière s'étendait une grande quantité de bois d'allumage, de livres et de déchets de tous genre. De ce tas d'ordures se dressait un long poteau, plus ou moins raffiné. Tout près, une cage de fer renfermait un homme complètement nu, visiblement endormi, ou alors inconscient. Des troncs et des rochers étaient étalées un peu partout, en guise d'estrades. Il y avait quelques caravanes à proximité d'une grande table. Sur cette même table étaient présentées des objets occultes très diversifiés, la plupart étant interdits dans la Grande Cité. Des torches et des lampes étaient plantées sur les lieux, malgré la confidentialité de cette fête cérémonial. Il y avait une dizaine de démons-bleus qui gardaient les bordures. Ils mesuraient environ trois mètres et possédaient quatre bras.

Les heures passaient et de plus en plus de gens s'accumulaient dans l'endroit. Il y en avait pour tous les goûts et de toutes les races.


Il marchait, en silence, vers la Fête des Opprimés. Son corps était recouvert d'une grande robe bleutée, aux reflets de nécrolithe. Lorsqu'il écarta les dernières feuilles et déboucha dans l'espace-vague, deux connaissances s'avancèrent vers lui.

"Valir ! Comment se porte cette vieille branche.. ?"*, commença un drow au teint plutôt vert. *

"Tiens.. Menrul a même reprit des couleurs."*, ajouta un homme recouvert de haillons noirs, en ouvrant un sourire malicieux. *

"Bonsoir messieurs !", dit Valir en leurs accordant de fraternels poignées de mains.
Il continua
"Je ne pensais pas revoir encore vos visages sur Systéria. Il y a eu un imprévu ?"

"Szeoul ne voulait pas m'accompagner à Brégunia. Il a trop peur qu'on le remarque..", répondit l'humain aux vêtements sombres, une teinte d'humour trahissant sa voix.

"Certes, ce teint d'elfe-légume ne passerait pas inaperçu..", termina Valir, riant à son tour. Quant à l'elfe noir, il les darda tous deux d'un œil sarcastique.

Un orateur, sorte d'incube tiefling, monta sur une caisse de bois et alluma une rûche d'abeilles qui s'enflamma et pétilla en étincelles, marquant ainsi le début des festivités. Tous, une soixantaine de spectateurs, allèrent s'asseoir sur les bancs improvisés. Des cris et des rires malsains perçaient l'air, et l'ambiance tournait au vinaigre pour quelconque témoin extérieur, si témoin extérieur il y aurait eu. Un sceau d'eau glacé fut versé dans la cage, et l'homme-captif se réveilla en sursaut. On ouvrit la cage et il se précipita comme un lièvre vers la Jungle. L'un des démons-bleu l'aggripa par une jambe et le traîna vers le bûché. Quelques maîtres de cérémonies fracassaient d'étranges tambours magiques sans aucune coordination, provoquant un vacarme fort dérangeant.

"On m'a dit que ton cadavre a été volé, Valir ?", demanda un nain à l'allure cadavérique.

"Oui.. et j'ignore par qui. C'est dans ton secteur, il me semble. Si tu en entend parler, préviens-moi."

L'incube, toujours au sommet de son perchoir, attira l'attention de la foule.

"Mes frères ! Nous célébrons, en cette nuit du 28 Lumis, notre indépendance et la puissance chromatique de notre Prince Noir ! Que soit béni le jour prochain de son Apogée où il reprendra les rennes des abysses aux mains d'Enyde-Ma ! Yhagshul Qô'Rul Nôx !"

"QÔ'RUL NÔX !", hurla l'assemblée, en guise de réponse.

"Thaar, glorieux Thaar, accepte aussi cette offrande. Voici l'un de tes plus grand fidèles, le monial Bertrand Vicéron ! Kaz'nâg Hatrum !"

"KAZ'NÂG HATRUM !"

Et on ligota le pauvre homme sur le poteau, en larmes et en peurs. Les fanatiques reprirent place alors que la grotesque mélodie des tambours se faisait de plus en plus intolérable. On habilla le sacrifié d'un manteau orné d'écailles d'or.

"Ah, pendant que j'y pense.. Barn ne viendra pas. L'Ordre du Soleil l'a attrapé dans les catacombes sous leur temple, il y a quelques jours.", rapporta Valir à ses deux compagnons.

"Vraiment ? Il me devait des réactifs, le fumier...", reprocha Szeous

"Et son maître-liche ? Elle se cachait là aussi, non ?", demanda l'autre.

"Je ne sais pas, je n'ai pas eu le-"

Ses dires furent interrompus par le son grinçant et ridiculement puissant d'une énorme trompette d'os. À cet instant, tous se levèrent, ghoules, nécromants, démons et toutes les autres insanités que le monde du Prince pouvait abriter.

"VAS FLAM", clamèrent-ils tous en cœur.

Et le bûché s'enflamma de leurs mains à tous. Les cris tranchants du pauvre homme était complètement étouffé sous la folie générale qui prenait possession de la foule. Plusieurs continuaient de bombarder le buché de projectiles enflammées alors que d'autres l'arrosaient de sceaux d'huiles. Son vêtement doré était en fusion et ne faisait plus qu'un avec sa peau.

"Vous avez-vu Karlaxle, récemment ?", demanda Valir, au milieu de la fête qui commençait réellement.

"La dernière fois, il était avec toi.", répondit Szeoul.

Les festivités continuèrent jusqu'au petit matin..


Post by Valir Menrul - July 10, 2011 at 3:46 AM

XI. Szeous le Rénégat

"À mes souvenirs, ta tanière n'était pas si loin..", vint se plaindre Valir.

"J'ai préféré migrer quand j'ai appris que ma soeur et que la vieille peau me cherchaient.", répondit Szeous, en brisant quelques feuillages avec sa machette.

"Elles sont venues d'Udossta pour toi ? Pour une charogne comme Szeous ? Voilà un grand lot d'honneur."

L'elfe noir éclata de rire, puis décapita une tierce racine. Il s'arrêta, s'essuya le front, puis se retourna.

"Valir, tu le sais bien.. Elles vont encore essayer de me ramener au servage avec leurs mensonges et leurs flatteries.."

*Les deux hommes avaient quittés la Fête des Opprimés ensemble. Ils continuèrent leurs dédales jusqu'à la fin de l'après-midi, pour enfin déboucher devant la porte de Szeous, à une centaine de lieux de la Grande Cité. Le tout était dissimulé encore plus profondément dans la Jungle, là où seules les bêtes s'aventuraient. *

"Pardonne le désordre, mon frère."

Szeous déballa quelques murmures arcaniques, et la paroi de pierre auquel ils faisaient face devint complètement translucide, cédant passage aux deux hommes.


L'intérieur était une caverne circulaire aux murs humide. La voûte montait en pointe, se terminant par une stalactite qui ne menaçait pas de tomber. Il y avait un lit simpliste près d'un bassin d'eau naturelle qui semblait bouillonner en permanence. De nombreuses armes blanches, très variées, étaient organisées dans un présentoir volé de l'Armée des Mercenaires. Dans un autre coin, il y avait une table couverte d'objets diverses, de livres et de feuilles volantes.
En entrant, Szeous vint se défaire rapidement de son armure, profitant de la fraîcheur de la cave pour exhiber son tronc bien entretenu. Quant à Valir, il posa ses effets dans un coin et sortit un petit calepin, ainsi qu'une plume.

"Alors, de quoi as-tu besoin ?", demanda le nécromancien en s'approchant de la table.

Szeous vint le rejoindre et écarta des parchemins, tout en grommelant, question de faire un peu de tri.

"Mh... du Nox.. oui, hmm, 100 livres. Je n'ai plus de cendres tombales, non plus.."

*Valir griffonnait quelques mots clés dans son calepin, alors que l'elfe noir continuait de mettre de l'ordre dans son chaos. *

"C'est encore bon, ça, tu crois ?", demanda t-il, montrant une aile de chauve-souris complètement désechée.

Menrul secoua la tête, ricanant doucement.

"100 livres de Nox, 250 ailes, et une tombe égrainée. Ça te va ?"

"Oui, oui, c'est parfait.. Sauf que.."

Szeous parut troublé un instant, puis il enfonça son regard dans celui de Valir. Les deux hommes se fixèrent en silence pendant quelques secondes, puis le marchand fini par comprendre.

"Ah, tu ne peux pas payer.."

"Euhm, oui, c'est juste que -", balbutia le drow, un peu désemparé.

Le nécromancien tapota l'épaule de son compagnon.

"Voyons, je te les offre, bien sûr. J'ai un entrepôt plein à craquer chez les Ombres.. Je ne suis pas rapace comme le reste de ta famille !"

Szeous ricana puis accorda une accolade fraternelle à son fournisseur favori.
La grande porte de la caverne s'ouvrit, à la surprise des deux hommes. Szeous tira un long cimeterre d'un fourreau, et Valir se contenta de rester attentif. Une silhouette féminine à la crinière blanche se présenta, montrant un sourire narquois.

"C'est là-dedans que tu te cache, mon frère ?", fit remarquer la femelle drow.

"Tu veux quoi ?", demanda Szeous à sa sœur, l'épée au poing.

"Allons, abaisse ça.. Qui est-ce ?", demande t-elle en désignant Valir avec un dégoût xénophobe typiquement elfique.

"Ça ne te concerne pas. Tu veux quoi ?", demanda le mâle, n'ayant toujours pas écarter sa lame.

"Rassure toi, je ne suis venue que pour parlementer..", soupira la femme, l'air éhontée.

Elle se dirigea vers l'unique siège, alors occupé par Valir Menrul.

"Pousse-toi.", cracha t-elle

*Valir se releva en souriant longuement, lui cédant sa place. Elle inspira, prenant le temps de se mettre à l'aise. Szeous, télépathiquement interpellé par Valir, le consulta rapidement du regard. Ensuite, il revint poser ses yeux de topaze sur sa sœur. *

"Je t'écoute.."

"Mère n'apprécie pas tes petites manies. Mais c'est ton jour de chance. Je suis venu quérir ton aide pour qu'on se débarrasse enfin d'elle."

"Tu veux mon aide, pour tuer cette vieille harpie ?", demanda Szeous, l'air intéressé.

"C'est exact. Tu n'as qu'à revenir avec moi en Udossta, et nous établirons le plan parfait. Nous n'aurions qu'à-"

Sans prévenir, Valir menotta le bras droit de la femme à l'accoudoir de la chaise. Elle lui lança un regard de lionne, prête à bondir sur lui et lui arracher le cœur. Valir montra ses dents, et les yeux scintillants d'un enfant naïf. Elle eut à peine le temps de consulter son frère d'un oeil, mais ce dernier trancha sa main gauche d'un trait, grâce à la lourdeur d'une hache de bûcheron. Un cri aigu et déchirant secoua les murs de la caverne. Alors qu'elle grimaçait en tentant de libérer son bras droit, elle vint se plaindre.

"Comment peux-tu me faire cela.. Comment-"

"Ferme-là..."

"La Mère Noire va te faire payer ! Tu vas-"

"LA FERME !!"

Cette fois, elle fut interrompu par la masse de Szeous qui percuta, de plein fouet, son visage d'ébène pourtant si parfait. Son nez cassa, et quelques gouttelettes rouges percèrent. Elle eut à peine le temps de reprendre son souffle que la massue se logea une fois de plus, très inconfortablement, sur son délicat faciès. Le drow poursuivait son manège, avec une rage qui grandissait toujours plus. Sa pauvre sœur tentait de placer un mot, peut-être deux, mais sans succès. Les assauts du mâle étaient trop nombreux. Les gouttes, après une vingtaine de coups, laissèrent place à un torrent chaud et sombre qui s'évadait de multiples endroits. Les paroles inaudibles de la drow barbotaient dans sa gorge noyée de sang, et ce n'est qu'un grognement emplie de pitié que les deux hommes purent entendre.

Alors que Szeous soufflait enfin après ce bûchage intensif, Valir vint tendre l'oreille à la femme.

"Une dame comme vous devrait s'exprimer plus proprement. On ne comprend rien quand vous parlez. Et vous postillonnez tant de sang.. Valir Menrul, enchanté."

Valir déverrouilla la menotte, et la femme inerte s'effondra comme une feuille sur le sol froid. Elle rampa quelque peu, mais son sang visqueux rendait le sol glissant, et elle ne faisait que s'ébattre comme une truite dans cette marre noire. Son souffle était encore audible, bien qu'étouffé par le sang et les sanglots d'un chien battu. Elle dressa sur son frère deux yeux innocents et exorbités par la peur.

"Mh..f'hgh..gnn.."

Pour l'achever, Szeous sauta à pied joints sur le crâne déjà méconnaissable de la drow. Le résultat final n'était pas beau à voir.

"Je t'amènerai tes réactifs dans quelques jours.", dit Valir, serrant la main de Szeous.
"Merci, mon frère. Ma porte te reste ouverte."


Post by Karlaxle - July 24, 2011 at 4:08 AM

XII. Qu'allons-nous faire, Maître ?

"Nous sommes très près.", dit le fantôme, menant les devants de l'expédition qui, depuis maintenant une semaine, s'éternisait.

Derrière lui, Karlaxle suivait, tel le loup infatigable qu'il était. Au détour d'un grand chêne, le duo aboutit nez à nez avec une clairière noyée par la lumière du Soleil. Au centre, une silhouette y était paisiblement voûtée.

"Grrmh ! Plus un bruit.", communiqua Karlaxle à son compagnon flottant. Du bout de son museau, il désigna cet individu qui lui était inconnu.

"C'est pourtant ton maître. C'est Valir Menrul.", répondit l'autre.

Karlaxle examina la silhouette plus en profondeur, puis vint en convenir, après de longs instants. Le loup et le spectre s'approchèrent donc de cette personne qui occupait son après-midi à la cueillette du ginseng. Lorsque la lumière du Soleil caressa le dos du serviteur-canin, son pelage vitreux étincela de vifs reflets cobalts. Valir était au centre de la clairière, agenouillé devant une plante aux fruits rouges, un panier de liège posé à ses cotés. De ses lèvres s'échappait un air reposant, digne d'une berceuse. Les deux voyageurs, désormais au terme de leur quête, se postèrent près de lui.

"Karlaxle. Il me tardait de te revoir."

Valir se releva, empoignant l'anse de son panier. Il prit une longue respiration, humant l'air frais qu'une brise apportait. Sa main écarta quelques brindilles de ses vêtements. Puis, ses yeux croisèrent le regard du spectre qui flottait à proximité de Karlaxle.

"Je sais pourquoi tu es venu. Je te remercie d'avoir guidé mon serviteur jusqu'à moi."

Le nécromancien marqua une pause, contemplant l'apparition avec plus de précision. Puis, un sourire anima son visage.

"Va. Tes frères et toi sont libres, désormais.", déclara Valir, une teinte paternelle arrosait alors sa voix.

Le spectre leva la tête au ciel, puis soupira. Une brise délicate chatouilla la clairière et il s'y effaça comme une trainée de poudre. Le loup redressa la tête vers son maître.

"Maître, qu'en est-il de la suite ? Faut-il se concentrer sur Aube Minh Yu ? Sur l'individu qui possède votre ancienne chaire ?"

"Ni l'un ni l'autre.. mon grand ami. La vengeance est une affaire Thaarienne.", dit-il en prenant son panier à deux mains.

"Systéria s'est mêlée de certaines choses où elle n'avait guère à le faire. Je vais devoir négocier avec eux."

"Qu'ont-ils fait ? Comment allons-nous nous y prendre ?"

"Pas sans aide, Karlaxle. Je t'expliquerai en route, nous avons beaucoup à faire. Fort heureusement pour nous, un jeune homme, très prometteur, existe."

Et le nécromancien s'en alla, le loup à sa suite. L'air mélodieux fut repris, alors qu'ils quittaient la clairière.


Post by Valir Menrul - September 7, 2011 at 1:38 AM

XIII. Livraison d'un cataclysme

Il entra dans la demeure et plaça une petite boîte de bois sur la table de la cuisine. Il retira ensuite ses longs habits, accrochant l'essentiel au porte-manteau. Il jeta une bûche dans le foyer et ses pas le menèrent près de la fenêtre, qu'il scruta attentivement. À cette heure, dans ce secteur, les rues étaient désertes, complètement désertes. Il n'y avait que les criquets, le ronflement du voisin et le crépitement du feu qui masquaient le silence. Malgré tout, sa main tira les rideaux de satin. Ils étaient très fins, presque translucides, mais c'était mieux que rien.

Une fois persuadé que personne ne l'épiait, Valir s'empara à nouveau du paquet qu'il avait laissé plus tôt sur la table. Avant de l'ouvrir, il s'installa confortablement dans son grand fauteuil de cuir rouge. Au pied du feu, il retira le couvercle avec un soin particulier. Ce qu'il vit ne l'étonna pas, mais son regard s'y perdit pendant de longs instants. Au fond du contenant reposaient deux fioles, ainsi qu'une enveloppe.

Valir retira d'abord le sceau de l'enveloppe pour en faire une lecture attentive. Tout de même courte, il en eu vite terminé du message. Le nécromancien roula la lettre entre ses mains et la lança dans le feu, où elle ne tarda pas à disparaître.

Puis, il y avait les deux fioles. Une jaune, une bleue. Il sourit.

"Bien joué, j'ai eu raison de te choisir..", prononce t-il pour soi-même.

Des griffes se firent entendre contre le marbre du plancher. Un loup noir arrivait, se postant près du fauteuil.

"Et s'il s'est joué de vous ? S'il ne s'agit que de teinture ? Ou encore d'un piège ?", demande Karlaxle, nouvellement arrivé.

"Il ne s'est pas joué de moi, car il comprend les mêmes choses que moi."

"Que voulez-vous dire ?"

"S'il m'a envoyé un canular, c'est alors qu'il a eu peur de moi et craignait des représailles dans le cas où il ne viendrait pas satisfaire ma requête; Mais, vois-tu.. il ne fait pas partie de cette masse qui craint les nécromanciens simplement parce qu'on leurs as ordonné de le faire. Il sait très bien que les nécromanciens qui agissent par pure méchanceté tout en retirant de la satisfaction à propager le chaos n'ont aucune valeur. Il savait, dès qu'il a reçu cette boîte, que rien ne l'obligeait à répondre à mes désirs. Il savait que je ne le punirais pas s'il manquait de répondre à l'appel."

"Et pourquoi l'a t-il fait, dans ce cas ?"

Valir saisit la fiole bleue, et l'observe longuement, tout en poursuivant la conversation.

"Il veut être sauvé, élevé à ce qu'il est destiné à être. Il réclame ce qu'il mérite."

"La différence entre une légion de morts-vivants et une communauté de vivants qui obéit aveuglément à un royaume est très mince, Karlaxle. Ceux qui dressent les peuples contre les nécromanciens valent autant que les nécromanciens eux-mêmes. Dans notre cas comme dans le leurs, toute cette masse d'âmes qui est dirigée n'a aucune valeur et n'est destinée qu'à errer dans l'Astral, une fois la vie terminée."

"Nous, nécromanciens, qui désirons l'immortalité et une volonté éternelle, sommes élevés au delà de cette masse d'âmes dépourvues de pouvoirs et de destins. Les morts sont là pour être menés par les vivants. Tous meurent pour finir dans la poigne d'un nécromant. Nous sommes ceux qui vivront pour toujours, ceux qui resteront forts pour toujours."

"L'avez-vous surestimé ? Peut-être ces potions n'auront-elles qu'un effet minime.."

"Cela ne serait pas catastrophique. Mes projets ne pressent en rien, Karlaxle. Je ne suis plus immuable."

"Mh ?"

"Regarde-moi, j'ai vingt ans à nouveau, dans le corps d'un autre. Je suis revenu au même état physique et social qu'il y a trente ans. J'ai encore cette bénédiction des inconnus qui débarquent sur les quais de la ville. Ils me cherchent dehors, alors que je cherche à leurs cotés, dans les murs de la Cité. Je suis déjà pratiquement immortel, Karlaxle. Je peux attendre bien plus longtemps que Systéria le croît."

"Peu importe si mes plans fonctionnent ou échouent. Ceux qui contrecarrent mes plans aujourd'hui finirons par disparaitre, et une génération finiras bien par échouer."

Il replaça les fioles au fond de leur boîte, puis la ferma avec soin.

"L'oiseau rare qui m'a confectionné ces deux merveilles sera récompensé.. comme il le mérite."


Post by Valir Menrul - February 18, 2012 at 7:07 AM

XIV. Illumination d'une conclusion
- Ambiance -

Il avait perdu toute notion du temps…

Depuis très longtemps, peut-être. C’était difficile à dire.

D’ailleurs, il n’avait pas l’impression d’être capable de dire quoi que ce soit, selon l’idée qu’il avait eu d’une parole ou d’un propos. Il s’observait sans toutefois se dupliquer ; paradoxe qui, bien vite, consuma les dernières bribes de sa rationalité. Témoin dépassionné d’une attente qui n’en était pas vraiment une, existait-il encore ?

Il se réveilla au fond d’un songe. L’environnement rapporté par ses sens ressemblait à une pièce. Une pièce aux contours clairs, à l’essence symétrique, à l’architecture physiquement plausible, qui, tout de même, savait lui susciter un irréalisme prononcé. À vrai dire, il ne se sentait pas familier avec cet endroit qui, pourtant, l’avait vu naître. Au delà de sa tête, une lumière pleine, blanche, lui permettait de faire l’usage de ses yeux pour s’orienter à travers cette drôlerie.

À l’extrémité de la pièce : un canal, un tunnel enténébré qui n’éveillait pas particulièrement sa curiosité. Il n’avait plus la capacité de choisir, de vouloir, de décider ; il n’avait même plus la conscience de s’en rendre compte. Il attendait quelque chose qu’il croyait ne pas connaître.

Puis, il entendit.


Bon, te revoilà encore une fois.

« Quelqu’un a parlé ? De quoi s’agit-il ? Où suis-je ? Suis-je mort ?»

Pour la définition que tu en fais, non, tu n’es pas mort. Tu te demande sans doute ce que je suis ? Ce n’est pas très important. En révéler trop sur ce que je suis provoquerait le déplaisir de mes pairs et de mes égaux. Ils seraient choqués de te voir avec autant de savoir, avec le pouvoir de réduire à la banalité le rêve qu’ils entretiennent.

« Qui est-ce ? Yhagshul ? »

Je ne suis pas Yhagshul. Tu trouveras peut-être.. étonnant, d’apprendre que Yhagshul possède encore moins de volonté que tu en possèdes. Yhagshul est une image, un concept, rien d’autre. Il a son utilité ; je ne dis pas l’inverse. Son existence permet à ce que je suis et à mes pairs d’orienter, de régulariser leurs rêves et d’ajouter ce que nous considérons comme une richesse culturelle, une profondeur créatrice, à ce rêve que nous partageons. Le terme de rêve est imprécis, je te l’accorderai, mais c’est le mieux que je puisse faire pour que tu comprenne sans éveiller un trop grand nombre de tes semblables lorsque je te renverrai.

« Éveiller ? Suis-je un élu, un messager ? Je n’ai aucun semblable, je suis supérieur. »

Visiblement, en t’amenant ici, je n’ai pas réussi à faire taire l’égocentrisme absurde que j’ai décidé de t’attribuer au moment de ta conception. Tu le comprendras donc ; je suis ton créateur. Maintenant.. pourquoi t’ai-je amener ici ? D’ailleurs, ici, c’est mon imagination. Tu sais ce que c’est l’imagination, non ? Ceux qui ont créée le monde dans lequel je t’ai envoyé ont décidé que tu aurais quelque chose de similaire à l’imagination, ou plutôt, ils m’ont chargé de t’offrir une telle capacité. J’ai été obligé de t’offrir énormément de choses, d’ailleurs. Mais bon, inutile de tout expliquer, tu prendrais des heures à tout saisir à propos de ta vraie nature, de ma réalité et du lien entre nous.
Sache au moins que ton existence, dans absolument, je dis bien absolument tout ce qu’elle concerne, possède une seule et unique utilité : désennuyer ce que je suis.

C’est décevant ? Peut-être, oui. Mais ne t’inquiètes pas. Si je te renvois là où tu as coutume d’exister, je ferai en sorte que tu ne sois pas affecté par ce ressenti. D’ailleurs, c’est à propos de ta nature que je t’ai amené ici. Il est possible que tu serve, une fois de plus, à me désennuyer.

Je vais t’avouer ne pas avoir confirmer ma décision à ce propos. Cependant, pour satisfaire mon besoin perpétuel de chasser l’ennui, j’ai envisagé d’effacer tous tes souvenirs et de faire en sorte que ta nature soit de nouveau déterminée, de A à Z. Évidemment, encore une fois, je serai l’artiste entier de la personnalité que tu croiras pourtant comme intimement tienne. Je t’offrirai ce que la majorité de tes semblables connaissent par le simple fait d’exister au sein de votre monde ; tu ne seras pas pénalisé à ce propos.

J’y pense et, finalement, je serai obligé d’effacer tous tes souvenirs de cette conversation que nous avons à l’instant. Ta nature demeurera un mystère dans le sens où la raison responsable d’une telle amnésie proviendra directement d’un autre monde que le tiens, soit le miens. Je t’annonce donc tout de suite que tu ne retrouveras jamais ta véritable nature, ou devrais-je simplement dire, ta première nature.

Tu continueras d’exister dans le même corps ; tu entendras peut-être parler de ton existence actuelle, car une poignée de tes semblables connaissent ta vraie identité. J'ai hâte de voir comment nous réagirons, toi et moi, à leurs fantaisies. Karlaxle ne viendra plus ; il n'existe plus.

Avant qu’on se sépare, une fois de plus, sache tu m’as bien amusé.

Bon voyage, mon petit poussin.


Une pureté naïve l’envahit alors, potentiel symbole de sa prochaine nature ; ses actes, son humanité, sa culpabilité, son savoir, la considération mentale qu’il s’était fait de soi-même… tout cela ne valait même plus la peine d’être mentionné, où que ce soit.