Sa Seigneurie en terre connue

Sa Seigneurie en terre connue

Post by Thomas Bolton, Emp - January 2, 2012 at 9:42 PM

Lors de ces dernières péripéties, le Duc Thomas Halvadius Bolton se trouvait toujours à Zanther, dans la campagne de Medelia. L’histoire ne dit pas ce qui arriva aux prisonniers. Après son départ du village, les habitants continuèrent longtemps à parler des cris d’horreurs qui s’étaient échappés de la prison ce jour-là. Mais ce qui s’était passé exactement, ça, ils n’en connurent pas les détails. Leur imagination foisonnante s’en chargea pour eux. Curieusement, même si l’on craignait Sa Seigneurie, on ne le haïssait point. Après tout, il œuvrait pour la Ligue, alors pourquoi le haïr ? Non, le craindre, c’était bien plus simple.

Mais revenons un peu à notre histoire. Quelques mois plus tard, le Surintendant assistait à un spectacle pour le moins étonnant. Dans le grand Opéra de Medelia était donnée une représentation de chants marins. La Patricienne Margolotta avait souhaité honorer ceux qui faisaient la force de la Ligue, aussi avait-elle pris sur ses deniers personnels pour financer ces festivités. Ne nous leurrons pas, ce n’était ni par pure générosité ni par intérêt pour les arts – quoiqu’elle fut tout de même une esthète de premier ordre. Non, c’était sans aucun doute pour se rapprocher des amiraux et s’assurer de leur soutien politique. Au sein de la République, les intrigues politiciennes étaient monnaie courante.

Ainsi donc, Sa Seigneurie était assis au balcon, au côté de ladite Patricienne, revêtue d’une superbe robe de soie noire qui luisait faiblement sous la lumière des quelques torches qui éclairaient faiblement les loges. Ils étaient seuls. A Systéria, une telle constatation aurait pu en offusquer plus d’un et les rumeurs auraient mis peu de temps à parcourir la ville. A Zanther, c’était culturellement acceptable, étant donné que la religion avait bien peu de place dans le cœur des gens. La morale avait donc d’autres fondations… Peut-être qu’une seule personne encore s’en irriterait : Madame Recaedre. Ça, c’était une autre histoire.

« Je viens tout juste de recevoir des informations de nos amis à Briganne. Son Altesse a bien reçu les informations que nous voulions faire passer. Une bonne partie des plus riches marchands ira investir une forte somme sur le marché des tulipes d’Exophon. », chuchota le duc à sa voisine.

Cette dernière ne put s’empêcher de laisser échapper un léger ricanement, qu’elle étouffa bien vite dans son éventail de velours, noir encore.

« Parfait. Il ne nous restera plus qu’à percer cette bulle et nous entrainerons une bonne partie de leur ruine. C’était une bonne idée, Thomas, suffisamment intéressante pour planter une épine dans le pied des Brouxg. », lui répondit-elle d’un air de connivence.

« Il faudra penser à envoyer une compensation au Grand-Duc d’Olanno pour le remercier de son soutien, Augusta. », lui rappela le duc.

« C’est déjà fait, un convoi est déjà en chemin. », lâcha-t-elle en lui faisant un clin d’œil.

Un clin d’œil : oh, si Armika avait vu ça !

« Des nouvelles me sont parvenus de Xerdonia. Comme je m’en doutais, les requêtes du Général sont tellement extravagantes que les émissaires de Briganne n’y ont même pas donné suite. »

« C’est tellement facile avec ces militaires. Ils se sabotent eux-mêmes ! De quoi nous éviter des efforts superflus. »

Augusta ne croyait pas si bien dire. Et quand bien même ces demandes auraient été comblées, le front nord avait été suffisamment renforcé pour que Medelia et Exophon puisse résister sans difficultés aux assauts du Général.

Les deux individus se turent quelques minutes pour profiter du spectacle. Contrairement aux stéréotypes, les chants n’avaient rien d’horrible ou de forcément scabreux. Bien sûr, il y avait bien quelques chansons grivoises, mais rien de bien choquant. Et dans l’ensemble, ils chantaient justes.

« A propos, je présume que vous avez entendu Thomas. Systéria fait marche arrière. »

Le duc hocha la tête sans répondre, son regard sévère fixant la scène un peu plus loin.

« Mes diplomates racontent que le Chancelier s'est effacé du devant de la scène. »

Thomas arqua un sourcil. C’était une nouvelle qui le surprenait – car oui, la surprise pouvait l’atteindre ! Le jeune baron avait toujours voulu se hisser au plus haut rang pour redorer le blason familial et maintenant qu’il y avait réussi, il semblait ne plus vouloir s’y maintenir. Etonnant, surtout lorsque l’on connaissait les ambitions des Recaedre.

La discussion se perdit alors sur d’autres sujets, principalement focalisés sur la politique intérieure.

Et ce soir-là, lorsque Sa Seigneurie rentra au Manoir, son secrétaire particulier l’attendait. Un bref échange suivi.

« Cela signifie que monseigneur peut revenir à Systeria, monseigneur ? », hasarda le petit homme en réajustant ses lunettes demi-lune.

Le duc lui lança un regard glacial, haussant un sourcil déconcerté.

« Quel rapport, Cressen ? », lâcha-t-il d’un ton tranchant comme un couperet.

« Aucun, je présume, monseigneur. Que monseigneur me pardonne. », répondit un Cressen tout penaud en déposant un tas de lettres devant son supérieur.

« Ah, du courrier de Systeria. Voyons voir. »

De ses longs doigts fins, il entreprit de briser chaque sceau de cire.

Le duc avait quitté Systeria, mais il ne se passait pas un mois sans qu’il ne collecte des informations, des nouvelles ou tout simplement qu’il entretienne sa correspondance avec plusieurs des notables qui y vivaient. Certains voulaient le voir revenir… Avec le désistement de Maegor, des rumeurs commençaient à se développer, affirmant que l’impératrice allait le rappeler à elle.

Ces rumeurs l’amusaient beaucoup. En tous les cas, ses affaires Zanthériennes n’étaient pas terminées.


Post by Cyriel S. Selaquii, Adc - January 2, 2012 at 10:06 PM

Avec les grandes révolutions d'Exophon et de Medelia, la ligue de Zanther semblait s'intéresser de plus en plus à l'Archipel autrefois colonisé par l'encombrant voisin que constituait l'Empire Brégunien.

La Patricienne Margolotta ne faisait pas exception, peut-être sous l'influence du fameux Thomas Bolton. Ou peut-être car tout était bon pour nuire à leur Empire de voisin, pour qui Systéria constituait quelque épine dans le pied.

L'on racontait, du moins, que certaines familles éminentes de Zanther s'intéressaient à la région, au point d'y envoyer quelques délégués, ou émissaires, voire leur progéniture, afin de se tenir informés de la situation politique de l'Archipel, et quant à savoir s'il s'y trouverait un terreau fertile, pour quelque appui face à l'Empire Brégunien.

Madame Recaedre goutait peut-être aux rumeurs et aux mondanités zanthéroises. Ainsi, peut-être serait-elle au vent des racontars de salons, attestant que la Demoiselle Selaquii entretenait une correspondance assidue avec Madame sa Mère, la Conseillère Seilithia Selaquii, représentante des mages au conseil de Medelia, sous égide de la Patricienne. Et quelques autres individus notables de la ligue, dont Mademoiselle Caterina d'Olanno, fille ainée du Grand-Duc d'Exophon et patronne du fameux Conservatoire d'Exophon.

Se trouverait-il que les intrigues politiques systériennes et zanthéroises furent plus rapprochées qu'on ne l'eut cru, malgré la distance? Oserait-on parler à voix haute dans les salons, devant le couple Recaedre-Bolton, de la catatonie nobiliaire systérienne rappelant d'anciens généraux déchus d'Exophon et de Medelia? Ou pire, de la gloutonnerie de quelque chancelier comptant amalgamer pouvoir et passivité? Systéria importerait-elle la révolution, en glousseraient certaines derrière leurs éventails, pour jeter à la rue certains corps morts? À moins que la noblesse systérienne renfermée, inapte et pédante ne préfère quémander la présence d'un éminent zanthérois en la personne de Monsieur Bolton, pour tenir le peuple systérien à sa place.

Au vu de la promiscuité de sa Seigneurie Bolton avec la Patricienne Margolotta, sans doute éviterait-on des sujets si sensibles en public. Toutefois, le bruit de potentiels rapprochements commerciaux et artistiques, et de leurs ébauches, continueraient de courir. En particulier en ce qui concernait un partenariat entre le Conservatoire d'Exophon et l'Institut des Arts Systériens, qu'on prétendait déjà en vigueur officieusement.


Post by Gardtalang, ind - January 4, 2012 at 8:18 AM

Cela faisait déjà un moment qu'on avait sorti le Monstre de sa cage. Habilité à répondre à son courrier, sa Seigneurie allait avoir ce qu'elle avait demandé. C'était une lettre qui se distinguait des autres... Plutôt chiffonné, plusieurs tâches d'encre ici et là qui montre le manque totale de finesse de son auteur ainsi que de la saleté. L'homme en noir pouvait se douter de l'auteur. Malgré son barbarisme, le demi-orque était quand même quelqu'un avec un sens de l'honneur et de parole.

Les humains m'énervent. Ils me semble incapable de faire preuve d'imposition. Le Conseil des Guildes était qu'une perte de temps. À quoi sert un dirigeant alors qu'il est pollué de tous ces subordonnés qui ne pensent qu'à leur propre besoin. Un véritable chef est celui qui dirige et qui impose. Il doit éliminé les éléments faibles et s'assurer de la force du clan. Il se doit directement agir. Sinon, il ne dirige rien.

J'ai cru comprendre qu'il aurait un Chancelier. Encore une erreur et à juste titre. Un faible qui n'a pas su résister. Cela ne fait que dévoiler la faiblesse aux yeux des autres. Un chef qui impose et qui décide et s'assurer d'éliminer les éléments faibles. Qu'on ne remette pas en doute sa force et cela gardera les autres en échec.

Gardtalang

Sa seigneurie devrait être satisfaite. Voilà cruement dit ce que l'Orque pensait. Il ne s'attendait à rien d'autre. Pour le manque totale du protocole pour une personne de haut rang pour le Duc? C'était en quelque sorte la signature de l'Orque. On était sur que cela provenait de lui!


Post by Thomas Bolton, Emp - January 4, 2012 at 11:11 PM

Ce que l’on disait de Systéria à Zanther, le Surintendant n’y réagissait jamais en public. Ca donnait parfois lieu à quelques brèves discussions entre le duc et son secrétaire particulier, mais c’était tout. A chaque apparition, au cours des séances du Conseil et dans les réceptions mondaines, lorsqu’on l’interrogeait, on n’obtenait pour toute réponse qu’un regard long et appuyé qui semblait vous vriller le crâne. Rien qui n’engageait à la conversation ! Bref, tout cela pour dire que la situation de l’Archipel n’arrachait aucun mot à Sa Seigneurie qui continuait à poursuivre méticuleusement et consciencieusement ses affaires au sein de la Ligue.

Un soir, alors que Sa Seigneurie se trouvait aux côtés d’Augusta Margolotta dans le Palais de Medelia, monsieur Cressen fit son entrée, toussotant légèrement pour signaler sa présence maigrelette à ces curieux personnages. L’expression contrite sur son visage laissait à penser qu’une nouvelle information lui démangeait les lèvres. Thomas le regarda sans rien dire, laissant sa voisine terminer la phrase qu’elle avait commencée. Ils discutaient, une fois encore, de politique intérieure. Un sujet qui ne passionnait pas les foules, sans aucun doute.

« Nous vous écoutons, Cressen. », finit par lui dire Thomas.

« Madame. Monseigneur. J’ai d’excellentes nouvelles à vous communiquer. Il s’agit de cette petite expédition dans le village de Préauport, à Briganne. », révéla rapidement Cressen, avec un débit de parole particulièrement rapide.

« Ah, notre petite expédition de missionnaires. Racontez-moi, je souhaite en savoir plus, que diable ! », lâcha Augusta, impatiente de connaître la suite.

« Le simulacre a fonctionné à merveille. Les effets spéciaux créés avec de la poudre de phosphore, les trois pèlerins chassés de la capitale et cette jeune comédienne ont réalisé une véritable prouesse, madame. »

Les fines lèvres pâles du duc s’étirèrent pour former un sourire inquiétant.

« Ah, magnifique ! Nous avions vu juste Thomas. Il n’en faut pas plus pour impressionner des paysans et des villageois. », se félicita la Patricienne.

« La petite troupe a parfaitement joué son rôle. Les fléaux qui se sont répandus, les bêtes qui tombaient malades, l’eau du puits dont l’odeur devenait nauséabonde… Ils ont tous cru à un châtiment divin. Il n’en fallut pas plus quand cette jeune martyr est soudainement apparue, les exhortant à s’éloigner des richesses de la Sainte-Eglise pour éviter le courroux de la Lumière Eternelle. Quelques gouttes de remèdes, quelques maladies guéries et il n’en fallait pas plus pour en faire une vérité, madame. », raconta soigneusement Cressen, qui avait repris son flegme ordinaire.

Ainsi donc, Sa Seigneurie et Madame Margolotta avait œuvré pour faire naître une hérésie. Sous un angle religieux, c’était un acte que l’Ordre du Soleil aurait certainement réprouvé. Mais sous un angle politique, c’était un mal plus que nécessaire pour perturber le colosse que représentait le Saint-Empire.

« Des conséquences, Cressen ? », se contenta de demander sèchement le Surintendant.

« Et bien, une nouvelle école de pensée se répand. Il y a eu quelques échauffourées, mais rien de bien compliqué pour les garnisons bréguniennes, monseigneur. »

Cette décision n’aurait pas que des conséquences sur la politique intérieure du pays… C’était un risque calculé et connu depuis le début.

« Merci pour ces informations Cressen », le remercia le duc avant de le congédier d’un bref signe de la main.

« Pensez-vous que ça suffira, Thomas ? », demanda alors la Patricienne, quand ils furent seuls.

« Sans doute pas. Les échauffourées, les possibles rébellions seront faciles à écraser par Briganne. Mais le doute, lui, est un ennemi plus redoutable. Cela mettra du temps, tant de temps que nous aurons peut-être déjà quitté ce monde, Augusta. »

Le ton était monocorde, le Surintendant n’exprimait aucun sentiment. L’idée même de disparaître semblait lui faire ni chaud ni froid.

« Je crois que nous avons bien progressé. Il est temps pour moi de retourner à d’autres affaires plus pressantes. », conclut Sa Seigneurie avec cet air toujours aussi neutre.

En prononçant ces quelques mots, il sortit une lettre au sceau luxueux qu’il lui présenta. Elle l’examina brièvement et hocha la tête, résignée.

« Je m’en doutais. Je ne tenterai pas de vous convaincre du contraire, je sais que vous ne m’écouteriez pas. Je vous remercie pour votre aide, elle fut précieuse. »

« Nous nous reverrons, Augusta. N’en doutez pas. »

Elle lui lança un sourire amusé.

« Mais je n’en doute pas le moins du monde. »

La coopération entre les deux individus avait été fructueuse. Les liens qu’ils avaient su tisser avec le Grand-Duché étaient particulièrement solides et les quelques actions qu’ils avaient pu mener contre Briganne porteraient sans aucun doute leurs fruits, même s’il faudrait des décennies avant d’en voir les véritables effets. Le duc, cependant, n’était pas un homme à se reposer sur ses lauriers. Maintenant qu’il avait terminé ce qu’il avait souhaité accomplir, il ne lui restait plus qu’à prendre le chemin du retour. Là encore, en terre connue, où il restait tant à faire.

D’où provenait cette mystérieuse lettre ? D’un membre de la famille ? D’un proche – si tant est que ce soit possible, venant de Thomas Bolton ? De la Couronne ? Les spéculations peuvent aller bon train… La réponse ne serait jamais réellement connue.

Or donc, deux mois après ces événements, on aperçut un carrosse noir aux sobres armoiries quitter le Palais de Systeria pour se rendre au port, où un bateau venait juste de jeter l’ancre…

Un billet avait été envoyé peu de temps auparavant à Mavolio Bolton.

Mon retour est proche.


Post by Mavolio Bolton, cp - January 4, 2012 at 11:25 PM

... Et le mercenaire râla...

"ENCORE une missive pour vous Mavolio... Mais bon sang, vous souhaitez que le manoir devienne une véritable poste?"

Le jeune Bolton prit le billet en main, remerciant la sympathie du soldat qui surveillait les grilles.

"Certainement très cher, ne vous plaignez point, vous voyez du monde, du passage, de la vie. Préféreriez voir déambuler des morts peut être?"

La réponse encore une fois, aurait pu être punit d'hérésie, encore un héritage familial que Mavolio ne connaissait pas encore, et que peut être ne connaitrait jamais. Toutefois les mercenaires n'étaient pas connus pour leur piété, ce n'est pas de la bouche de celui-ci, que la réplique cinglante sortira. Au contraire, ses collègues se seraient certainement moqués de lui.

La silhouette fine et athlétique grimpa les marches jusqu'au dernier étage. Là, il s'enferma dans sa chambre à double tour, chambre un peu déserté, ou de multiples papiers traînaient. Récemment une bouteille de fée verte agrémentait le coin du penseur thésard. Il finit par décacheter le tout, pour lire les quelques mots.

Mon retour est proche.

La première réaction fut de spéculer sur un rendez-vous possible avec Maegor, Alysanne, Evadne sa soeur jumelle dont il n'avait plus eu de nouvelles depuis longtemps. Non... ce n'était pas leur écritures, quoi que ceci aurait pu être attribué à sa jumelle à son égard. Une vague flamme d'espoir renaissait, dans tous les cas, on lui assurait qu'il ne serait plus seul.

Sa mère Armika? Non, elle ne lui aurait pas envoyé qu'un billet mais une longue missive détaillée de mère. Père... le billet pouvait être de Père...

Alors Mavolio sort de ses pensées, la nuit était tombé. Il relève son regard gris acier sur la fenêtre de sa chambre. Un simple mot, avait fait renaître en lui un espoir qu'il avait perdu depuis longtemps, qu'il avait oublié. Il vérifia l'écriture, car s'il connaissait bien une chose de son père c'était cela. Les lettres concordaient. Et si on vait essayé d'imiter la signature de son père?

Mavolio se versa un peu de fée verte, et continua à spéculer toute la nuit de la sorte. Ses insomnies reprenaient.


Post by Thomas Bolton, Emp - January 5, 2012 at 11:34 PM

Sans surprise, ce fut Sa Seigneurie qui sortit de l’imposant navire aux courbes zanthériennes. Suivi de son secrétaire particulier, le duc descendit lentement la passerelle, s’aidant de sa canne pour assurer sa jambe malade. Ainsi, boitillant, notre austère personnage rejoignit son carrosse. Il pénétra dans l’habitacle sans se presser. Les badauds qui passaient par là eurent tout le temps de voir de qui il s’agissait. De quoi démultiplier les quelques rumeurs qui couraient depuis la sortie du véhicule dans la grande avenue. Ce dernier quitta alors rapidement le port pour prendre la direction du palais.

Ce que l’histoire ne dit pas, c’est si Armika Recaedre ou Evadne Bolton se trouvaient avec lui. Peut-être étaient-elles restées à Zanther ? Peut-être souhaitaient-elles se rendre directement au Manoir, pour constater l’état miséreux dans lequel il se trouvait ? Quand on connaissait le caractère de l’épouse du Surintendant, c’était une option qui restait parfaitement envisageable. Si elle l’avait suivi, le port entendrait bientôt ses réprimandes aux domestiques. Un séjour à Medelia, même de longue durée, n’aurait pas pu altérer le caractère de cette brégunienne. Quoique…

Or donc, le duc Thomas Bolton pénétra au palais et se rendit directement dans les appartements royaux, où se trouvait l’Impératrice Isaleïa. Les curieux seraient déçus : ce qu’ils se dirent restera du domaine du privé. Toujours est-il qu’en se quittant, le premier ministre – car oui, il l’était à nouveau – repris ses marques dans son bureau. Il fut surpris de constater que personne n’avait touché à la décoration. Il s’attendait aux bannières Recaedre, à des marques de luxe et de pouvoir, mais ce ne fut pas le cas. C’était presque comme s’il n’était jamais parti.

Pendant plusieurs heures, le Surintendant resta attablé à son bureau, utilisant l’étrange stylo à réservoir que lui avait fabriqué jadis le jeune prince Feredìr. De nombreuses feuilles furent noircies d’encre. Et quand il eut fini, il tendit toute une liasse à Cressen. Ce dernier examina la première page et arqua un sourcil, étonné.

« A peine arrivé que monseigneur dissout la Chancellerie ? », demanda-t-il, perplexe.

« Je ne me reconnais pas dans ce titre. Faites également fondre l’épais collier d’or que ce page m’a fait porter et rajoutez-le au Trésor. », répondit le duc d’un ton monocorde.

Si pendant son absence l’armée de secrétaires et de personnel administratif avait dansé, le chat était désormais de retour. Sobriété et austérité devraient à nouveau régner au palais.

« Je veux que ces lettres partent le plus rapidement possible auprès des guildes et des familles nobles de la ville. Ma fonction nécessite que j’établisse un état des lieux minutieux de la capitale avant d’entreprendre toute action. »

L’ordre était donné. Cressen s’empressa alors de se diriger vers la sortie quand il fut arrêté d’un geste sec de la main par son supérieur. Ce dernier lui désigna plusieurs livres vierges qui traînaient dans sa bibliothèque.

« Faites déposer ces registres dans la cité. Je veux que ces livres recueillent les doléances du peuple. »

« Mais, à quel but monseigneur ? »

« Je vous l’ai dit Cressen. Obtenir des informations. »

C’est ainsi qu’à peine arrivé, le Surintendant faisait déjà acte de présence. Et pas qu’un peu. Annonce officielle, missives contenant parfois quelques menaces légèrement distillées…

Soudain, on frappa à la porte. Un jeune page entra.

« Un courrier pour monseigneur le Chancelier. », annonça-t-il en agitant la main.

« Pour le Surintendant. », le corrigea gentiment Cressen.

Le petit tourna la tête, remarqua le profil de vautour du zanthérien, écarquilla les yeux, donna rapidement le document au secrétaire et détala à toute vitesse.

Après avoir examiné la lettre, un fin sourire se forma sur les fines lèvres pâles du duc.

« Les promesses de loyauté arrivent déjà, Cressen. Venant de ce destinataire, je n’en attendais pas moins. »

Le subalterne allait demander de qui il s’agissait, mais devant le visage fermé de son maître, il se dit qu’il avait des ordres à exécuter…


Post by Saevan Al Kazar, AdM - January 5, 2012 at 11:50 PM

Toute ces rumeurs n'était plus vraiment des rumeurs maintenant, la demeure Al Kazar avait même reçu une lettre, une lettre auquel il se devait de répondre.

Mon seigneur,

vous me voyez agréablement surpris par le courier que j'ai reçu de la pars de la ''nouvelle'' Surintendance, si je peux vraiment le dire ainsi, enfin.

Nul doute que vous chercher a prendre le pouls du peuple en ce moment. Il y a certaines choses dont je dois vous parler a ce sujet dans ce cas, mais je ne peux les écrire sur papier.

J'aimerais donc prendre rendez vous pour un entretien.

Saevan Al Kazar


Post by Armika Recaedre, CP - January 10, 2012 at 6:47 PM

Comme on pouvait s’y attendre, ou non, c’est dans un bateau qui suivit plusieurs jours après que revint la femme du Surintendant. Un plus gros bateau, plus luxueux, un bateau de plaisance. Comme le mariage était semble-t-il d’apparat, ce n’était pas du tout une surprise qu’Armika ne voyage pas en compagnie de son mari, et encore moins qu’elle s’offre le luxe d’une bateau… luxueux.

Plusieurs années s’étaient écoulées. Et malgré tous les petits pots, les petites crèmes et artifices habituellement créé que par elle-même, le temps avait quand même fait son œuvre sur la jeune femme qu’elle était jadis. Toujours aussi svelte, toujours aussi belle, elle avait malgré tout gagné quelques ridules impossibles à faire disparaitre.
Zanther ne lui avait pas fait de bien semble-t-il. Elle semblait encore plus austère et apathique qu’auparavant. Sans doute que la promiscuité avec son mari avait fini par lui déteindre dessus. C’est accompagné de plusieurs dames de compagnies et de serviteurs que la femme, habillé d’une toilette vert émeraude luxueuse, piqué ici et là de véritable pierre, déposa à nouveau les pieds sur le sol Systérien. Un peu plus, on se croirait 25 ans plus tôt, tellement la scène était semblable à son premier débarquement. Mais alors elle était encore jeune et ne connaissait ni son mari, ni ce pays. Comme quoi les choses changent. Non qu’elle aime ou connaisse plus Systéria à présent, mais elle n’y était pas étrangère, même si la brégunienne d’origine prenait toujours cette cité de haut. Ils étaient tous barbares sous leurs airs apparemment civilisés.

À l’arrivée du navire, nous ne pouvions douter de la personne qu’elle contenait au vu de l’imposant carrosse noir aux armoiries Bolton qui attendait non loin de là. Il fût chargé de nombreuses malles, ce qui laissait présager le retour permanent de l’ancienne Duchesse. À son départ de Systéria, rappelons-nous qu’elle avait emménagé au palais, avec son époux. Mais c’est tout de même la direction de la Haute-Ville que pris le carrosse. En froid avec son mari? Parce qu’il y a déjà eu un chaud? Dirons certaines mauvaises langues. Quoi qu’il en soit, elle savait que le manoir avait rénové, reste à voir si elle apprécierait ce qu’elle y verrait.
Seul l’avenir nous le dira.

L’exécrable Recaedre est de retour.