Une autre épée sacrée

Une autre épée sacrée

Post by Shandri Eäm'Arylth, OdS - April 5, 2012 at 10:03 AM

Grégoire et Adrien guettaient l’arrivée de la maitresse de la maison, l’évêque Eäm’Arylth, depuis une bonne heure à présent, depuis l’intrusion de ce mystérieux messager. De leurs longues années de service à la protection de la Demoiselle, jamais ils n’avaient dû vivre une scène aussi lourde. Si Grégoire se contentait de scruter l’horizon stoïquement, bien campé sur sa lance, le jeune Adrien, lui, gigotait de plus en plus au fil de temps, lançant maints regards sévères à ce messager, le harassant de questions sans profiter de réelles réponses.

Les deux protecteurs avaient vu l’un de ces étranges croisés qui partaient de longues années en croisade pour le Saint Ordre. Si la majorité des protecteurs veillaient la ville et éloignaient toute menace de celle-ci, une poignée d’hommes et de femmes habités par le courage se voyaient expédiés aux quatre coins de l’Île systérienne à la recherche de reliques ou pour protéger des endroits possiblement sacrés. Cet homme, ce soi-disant messager, était irrévocablement l’un deux. Sous sa barbe longue et broussailleuse, sous sa cape entachée de mille épreuves, l’homme trainait avec lui les traces d’une vie difficile sur un faciès rigoureux aux lèvres sans sourire. Le plus impressionnant, aux yeux d’Adrien du moins, n’était pas son allure d’homme rôdé par le poids de sa foi, mais bien l’aura luminescente que dégageait même la garde de cette étrange lame. Était-ce une relique? Était-ce pour cela que le croisé était revenu en ville, vraisemblablement directement chez l’Évêque, pour lui remettre l’arme sacré sans même songer à se reposer?

-\tJe viens voir l’Évêque Eäm’Arylth. J’ai une lettre à lui rendre, et à elle seule.

L’homme s’était arrêté devant les grilles, n’avançant pas plus loin. Il dévisageait ses confrères avec sévérité et leur donnait l’impression de les jauger, l’œil inquisiteur.

-\tDemoiselle Eäm’Arylth n’est pas ici. Remettez-moi votre lettre ou patientez son retour, mon brave. Le Temple vous offrira gîte et couvert, dans votre attente.

Adrien s’était risqué à lui répondre pour ne réceptionné qu’un mouvement négatif du chef.

-\tL’affaire est suffisamment grave pour que l’Évêque me trouve dès son retour.

Après de longues minutes d’attente dans un silence inconfortable, Grégoire se risqua à lui ouvrir les grilles, lui offrant par la même occasion le luxe d’attendre sur le petit banc de bois ouvragé qu’abritaient les jardins de Demoiselle. À de multiples reprises, le messager de fortune se mérita les regards de plus en plus intrigués du plus jeune, Adrien.

-\tEst-ce que vous portez une autre épée Mystique à l’Évêque, mon frère? Sa garde ne trompe pas… aucune lame systérienne ne possède son aura.
-\t…
-\tVous saviez que les reliques furent sorties, lorsque le Loup à Trois Têtes a marché sur la ville? L’Ordre sera satisfait de posséder une autre arme et de partager son histoire.
-\tTais-toi, Adrien. Une lame n’est pas une lettre. Cela ne concerne que l’Évêque; nous le saurons si cette histoire nous concerne.

Le vigile s’emmura enfin dans un silence mais redoubla les œillades perplexes, jusqu’à ce que Demoiselle franchisse les grilles du Manoir et avise la présence de l’intrus d’un froncement de sourcil interrogateur. Le messager éreinté se redressa et lui fit une démonstration de sa discipline, ne serait-ce que par sa posture si droite qu’elle en était rigide.

-\tÉvêque Eäm’Arylth, mes respects. Le temps n’est pas aux courbettes et aux belles paroles, entrons, je vous prie. J’ai une lettre à vous remettre en main propre. Mon nom est…

L’évêque le coupa d’une voix blanche et lisse.

-\tJe sais qui vous êtes. Je redoute votre venue depuis très longtemps, déjà. Entrons.

Le barbu ne sortit de la demeure de l’Évêque qu’une fois la soirée bien entamée, sans sa lame et plus sombre encore qu’à son arrivée.


Demoiselle avait trouvé refuge au fond de sa chambre, enserrée sous sa cape immaculée, le regard totalement absent derrière ses larmes. Elle comprimait un anneau de lumerca, dans son poing fermé, et sa seconde main s’était refermée sur la fameuse lettre.

Ma chère et tendre épouse,

Bien que j’aurais pu en écrire des chapitres dans d’autres circonstances, je souhaite t’offrir ces quelques lignes pour te dire à quel point je t’aime et que tu me manques. Les mots m’échappent pour t’exprimer à quel point je suis fier pour tout ce que tu as accompli pour moi et pour tous ceux autour de toi. Jamais un homme n’aurait pu espérer avoir meilleure épouse que toi.

Si tu reçois cette lettre, c’est que je suis probablement dans l’incapacité de revenir à toi tel que j’en avais fait la promesse.

Pardonne-moi ma belle pour toutes mes fautes et mes manques envers toi. Je prie Thaar pour que l’on se retrouve un jour où nous pourrons vivre notre amour sans retenue, au côté de notre fils.

Prends soin de lui, il demeurera à jamais ma plus grande fierté et tout cela grâce à toi Shandri. Si je vous quitte aujourd’hui et ne peut revenir demain, ce sera le cœur léger ayant pour seul regret de ne pas avoir été suffisamment présent pour vous. Mais sachez que votre amour m’aura comblé pour l’éternité.

Adieu mon amour, je t’aime du plus profond de mon cœur.

Lucius


Post by Adalard Dranem A.K, OdS - April 6, 2012 at 12:27 AM

- Je suis content de te savoir parmi nous. Je connais ton passé difficile, mais Thaar t'ouvre ses bras. Nous allons pouvoir débuter l'entrainement.

- Merci... Merci, Lucius.

Des années plus tôt, alors que le Croisé d'aujourd'hui n'était qu'un nouvel acolyte parmi tout les autres, il avait déjà un grand respect pour celui qui se trouvait être son mentor. Adalard avait apprit de lui beaucoup, celui-ci lui avait apprit les vertus, la voie de la Lumière, la sagesse et la Valeur d'un homme de foi. Que cela fasse des années que Lucius était parti en une Sainte Croisade ne changeait rien au respect qu'il accordait à ce grand homme, à son ami.
Les années avaient passés, alors que Lucius n'était jamais revenu, et le terrible messager était finalement arrivé, réduisant ainsi à zéro l'espoir de revoir cet homme tant apprécié de ses proches.


Dans le jardin des vertues, Adalard se trouvait devant le symbole de la Valeur, une des Huit vertus. Il était agenouillé devant celle-ci, et sa main ganté frôlait la dalle qui la représentait. On pouvait l'entendre murmurer quelques mots, se faufilant entre ses fines lèvres. Il s'agissait probablement de prières, et personne n'osait venir le déranger pendant celles-ci. La discussion qu'il avait récemment eu, à ce même endroit, avec la demoiselle résonnait dans son esprit. Puis, ce n'est que lorsqu'il se releva qu'un Templier vint à lui alors.

- Vous croyez que l'Évêque se porte bien ? Il y a plusieurs jours que nous ne la voyons plus.

Un long silence fut d'abord la seule réponse que le Templier ne reçut. Dranem vint poser ses iris d'un vert clair vers le ciel, alors que ses traits sévères mais sombres semblaient malgré tout songeurs, il plissa les yeux en regardant ce ciel couvert de nuages d'un gris pâle, puis ouvrit faiblement la bouche pour répondre au protecteur.

- Je ne saurais vous dire, mon Frère. Vous avez vu comme moi la note... Laissons lui le temps de panser sa blessure.

- ....Vous... Vous avez vécu la même.. peine, récemment. Vous pourriez.. peut-être l'aider?

Bien que la peine était encore douloureuse, malgré que le Templier en parlait au passé, le Croisé se contenta d'acquiescer doucement. Il ramena son regard émeraude vers celui-ci, puis posa sa main sur son épaule.

- C'est bien dans mon intention. Jamais je ne laisserais une amie dans le chagrin.