Potins de nobles

Potins de nobles

Post by Mundus, près de Thaar - June 9, 2007 at 4:31 PM

Les courtisans du palais étaient tous émoustillés. Enfin une autre nouvelle à se mettre sous la dent, enfin quelque menu ragot à amplifier et dont on puisse se délecter ! On murmurait dans les couloirs, on ne s’en privait pas. Quelle était donc cette fameuse rumeur ? Qu’en disaient donc la Baronne De Montolivier et la Marquise De Geraudour ? Dans le petit salon du palais, les deux femmes piaillaient et caquetaient.

- Très chère Baronne, je vais finir par en devenir jalouse ! Chaque fois que vous m’invitez à prendre un thé en votre compagnie, c’est pour me régaler d’une de vos nouvelles histoires. Comment se fait-il que vous soyez au courant de tout en tout temps ?

- Ma très chère amie, voyons, vous me flattez. Comment pourriez-vous donc être jalouse de mon humble personne ? Oh non, voyons, je vais rougir !

Suivit un rire cristallin et faussement charmé. L’étiquette et le paraître était très important à la Cour et ce n’était pas une des plus grandes commères de la noblesse qui allait passer outre, certainement pas. Ménageant son petit effet, la Baronne prit tout son temps pour avaler une gorgée du précieux breuvage importé de T’Sen. Puis, portant une main à sa gorge, prit un air théâtral et légèrement hautain.

- Et bien figurez-vous, ma chère amie, qu’un nouvel Intendant a été nommé hier au soir par Sa Majesté. J’étais près de la Salle du Trône lorsque j’ai entendu quelques discussions fortes intéressantes. Un serment, des vœux de loyauté, ce genre de choses.

- Certes, mais qu’est-ce qui nous dit que c’est un nouveau conseiller ? Après tout, ce peut-être un futur chevalier, il n’y a rien d’étonnant à cela.

- Effectivement, ma bonne amie. Mais j’ai fait ma petite enquête.

La baronne se trémoussait sur sa chaise, se gargarisant de l’ingéniosité qu’elle avait dépensée pour arriver à ses fins. La marquise, quant à elle, énervée de voir la Montolivier si fière d’elle, ne lui décocha qu’un regard glacial. Tout en gardant un sourire chaleureux aux lèvres, sinon ça ne se faisait pas.

- Et bien, parlez ! Ne me faites pas languir, très chère, je m’en voudrais d’être courroucée.

- Les bureaux de l’Intendance, ils sont à nouveau occupés. Les domestiques se sont affairées toute la soirée dans l’aile nord à bouger les meubles, réinstaller des cadres, des étagères. Enfin je vous passe les détails.

- Mais qui est-il alors ? Nous le connaissons ? Le Marquis Heldan aurait-il enfin réussi à convaincre Sa Majesté ? A moins que ce ne soit notre bedonnant Duc D’Enlyss ?

- Justement ! On ne sait pas qui. Je n’ai pas réussi à arracher quelque chose. Enfin j’espère que…

Derrière elles, quelqu’un. Un homme. Il s’était éclaircit la voix. Habillé de vêtements riches et luxueux, le port aliter, large d’épaule mais sans une pointe de graisse se tenait bien droit, un dossier sous le bras. Son crâne était rasé, seuls d’épais favoris blancs ornaient son visage anguleux.

- Dames, c’est un plaisir de vous rencontrer. On ne me parle que de vous, dans le palais.

Sa voix était grave et sèche. Malgré la politesse et la courtoise de ses paroles, sans une once d’accent, son visage restait de marbre. Il alla devant chacune et leur fit le base-main de rigueur. Puis, il traversa la pièce et pénétra dans un nouveau couloir, se dirigeant vers l’aile nord, devant deux nobles cois.

- Mais… mais… C’est… lui ?!

- Je… j’avoue que… je ne sais pas bien très chère.

- Il me dit quelque chose. Son visage et son regard. Mais. Noooon, je dois me tromper.

- Penserions-nous à la même chose ? Noooon, c’est rigoureusement impossible.

Et les voila qui partent dans un éclat de rire mesuré, mais cette fois-ci sincèrement amusé. Elles reprirent leur sérieux et entendirent quelqu’un arriver à toute vitesse de là où l’homme était apparu. Un jeune page courait, agitant une missive dans sa main. Il passa en trombe sans même remarquer les femmes, se dirigeant encore vers l’aile nord.

- Intendant Recaedre !

La marquise et la baronne se regardèrent. Après quelques secondes de réflexions, elles entreprirent de contempler le fond de leur tasse de thé en émettant quelques toussotements gênés.

- Il fait beau, n'est-il pas ?