Un retour
Post by Noür/S. Eringyas, mortes - July 17, 2009 at 11:38 PM
La terre était meuble, sous ses pieds. L'air salin, frais, lui cinglait encore le visage, lorsqu'elle mit pied à terre au port. Son teint était pâle comme le lys, cireux, comme au terme de chacun de ses voyages en mer. Son regard sombre s'attarda sur chaque détail menu, chaque pierre. Voilà longtemps, si longtemps, qu'il s'y était posé après tout. Des années.
Elle parcourrut la cité, de long en large et de large en long, ensuite. Chaque innovation n'en finissait pas de la troubler. Dans les quartiers de la fraternité du Chêne, elle cueillit une rose immaculée, grandie sur les ruines de ce qu'était la Horde Sanglante. Elle revint la mener au port, au devant de la maison que celui qui devait l'épouser antan, il y a si longtemps, s'était engagé à habiter avec elle.
Pour l'excuser peut-être, de cette promesse qu'elle ne put remplir.
-Mes excuses, sincères, Hattori-San. J'ai fauté...
Ses mots lui échappèrent, avec l'accent de l'Archipel Tsen, où elle avait passé ces dernières, longues années.
Puis elle s'en fut, lente, à travers la cité. Passant par la basse ville, elle sembla s'étonner de ne pas y retrouver la Dame de Coeur, les présences du sieur Morgathyss et de sa dame Heylaine. Elle se rendit en banque, où le tenant des clefs, à la suite de sa requête étrange, marqué d'un nom qui lui était jusqu'alors inconnu, parvint à dénicher un coffret menu, de cuivre, avant de souffler la poussière dessus.
La damoiselle se défit de ses bagages les plus encombrants, son kimono carmin flottant, sur ses épaules osseuses. Elle prit de son paquet une cape, pourpre, elle la plia soigneusement avant de la ranger.
Puis du coffre, elle prit un trousseau de clef, lumineuses ou ornée de l'éclat pourpre, avant de se diriger vers les quartiers du même nom. Elle les arpenta comme les autres, longuement, jaugeant de chaque détail changé. Elle ne croisa personne qui n'était pas empressé, qui eut temps de parler. Et pourtant elle aurait bien aimé savoir si la dame Vespari était toujours en poste. Si le sieur VonBrochert était toujours légionnaire... Si la damoiselle Maern siégeait toujours au sein de l'Académie... Tant de questions irrésolues... elle aurait aimé en discuter, savoir si sa place était toujours auprès de ces savants qui, peut-être, l'avaient oublié.
Puis elle passa son chemin, bien qu'une phrase la fit se retourner.
-V'savez pas ce qui se passe à Sainte-Élisa? Les rumeurs, tout ça? Enfin moi... ça ne m'inspire pas. Si j'étais vous, je ferais gaffe. V's'auriez pas besoin de protection particulière, la d'moiselle?
*Lança finalement le mercenaire, avec un regard salace. Il refusa cependant d'en dire davantage. Au sortir de la ville, devant les murailles, attendait une caravanne, indiquant la destination de Sainte-Éliza. La damoiselle se décida : elle irait voir par elle-même, il lui parut indispensable de se rendre là-bas. Elle s'embarqua, à destination de ce lieu inconnu, entendant bien jauger de ces rumeurs tues, ou offrir de son aide, si il s'avérait simplement que le Mercenaire voulut semer l'effroi dans les coeurs... *
Post by Feu Zaō Minh Yu, AdM. - July 19, 2009 at 10:38 PM
Il sortit dans la salle des patients se frottant les mains sur son tablier pourpre, laissant des traces sanglantes de celui à qui il venait d'arracher une dent et qui le remerciait d'une voix ou flottait la douleur. Le docteur Minh Yu le congédia d'un mouvement de la tête et posa son regard vide et vague vers la personne suivante, une vieille dame qui tremblait de tous ses membres.
Il secoua la tête et s'apprêta à quitter son service pour laisser les personnes aux mains des internes quand son regard se posa sur le tenue d'une personne qui venait d'entrer, quelques mots, elle n'avait que cela et son accent T'sen avait résonné dans la pièce. Replaçant ses mains à dos il la détailla, son odeur d'eucalyptus en rendit un malade et il ne se gêna pas pour vomir à coté sans aucun mot d'excuse.
Le temps semblait s'arrêter et ce n'est que le raclement d'une chaise qui le fit reprendre son cours...
Post by Noür/S. Eringyas, mortes - July 20, 2009 at 5:29 AM
Son regard aux mêmes tons que son kimono croisa celui de l'homme de l'Archipel, après l'avoir vu émerger dans la salle d'attente, couvert du sang d'autrui.
Elle le toisa un instant, dans la cacophonie ambiante elle énonça :
-Veuillez m'excuser.
Puis elle fit quelques pas, vers cet homme visiblement employé de l'endroit. Nullement incommodée par l'odeur lourde et végétale de l'eucalyptus, la préférant vraisemblablement aux remugles de sueur rances, à l'odeur aigre de la vomissure, ainsi qu'aux odeurs méphitiques et métalliques que dégageaient les plaies ou les suppurations de ceux en attente, elle vint vers lui. Elle ne rompit le contact de leurs regard que pour tancer, une seconde, l'homme qui rendait ses viscère, tâchant de conserver un masque impassible, bien qu'à cette seconde précise où elle toisa le patient, elle ne put voiler son dédain.
Son regard le confrontant de nouveau, elle enchaina, de son accent léger de T'sen, en retrouvant même plus aisément quelques intonations à la vue de l'homme. Son ton était doux, bien que posé, cependant :
**-San, pardonnez-moi. J'ignore si vous en avez-vous même le temps, mais j'aimerais m'entretenir avec un membre du personnel de ce dispensaire. Je ne suis point souffrante, cependant je viens au devant afin de prendre quelques informations et, si besoin est, soumettre ma candidature pour fournir mon aide. Sauriez-vous me diriger vers les bonnes personnes, je vous en serais gré... **
Post by Noür/S. Eringyas, mortes - July 30, 2011 at 6:10 AM
Sous les saules de l'ile d'Hatoshima, la demoiselle méditait.
Dans ses songes récurrents reparaissait Systéria la Blanche.
Son esprit était vagabond, mais en sa quête d'un savoir supérieur, il le fallait. Il lui fallait poursuivre l'étude de la psyché et des rêves, étude qu'elle voulait accomplir en un terrain propice : celle de ses Ancêtres, du clan Eringyas. Cette terre, imprégnée de leur mémoire, de leurs souvenirs. Cette terre, parée de nombreux sanctuaires.
Pour cela, elle avait laissé les êtres. Mais point la divine instance qu'elle servait. Et encore moins sa quête.
Systéria lui réapparut en son songe sempiternel. Ses yeux carmin s'entrouvrirent, énormes, parant son visage squelettique. Le visage d'une femme qui a laissé derrière les préoccupations de ce monde, charnelles, pour se consacrer toute entière au délicat ballet éthéré de la quête spirituelle.
Y avait-elle seulement laissé un souvenir? Que restait-il là-bas du clan Eringyas jadis si prisé? De l'ambition couvée, des actes accomplis, des postes occupés -à la Confrérie, Sainte-Élisa, au près des pauvres hères de la Basse-?
Des souvenirs et des êtres qui l'avaient côtoyé? Ou, chose absurde, chéri.
La demoiselle était bien certaine, elle se savait être de la nature de celles qu'on oublie. Tout était toujours à recommencer, c'était bien le cycle qui animait ce monde, en un renouveau valant la course des saisons, ou le ballet de l'astre diurne et de l'acte nocturne.
Elle était de la nature de ces ombres, qui se fondent parfois hors du monde, au gré de quelque lubie. Ou. Au gré d'une quête, désignée par des pairs comme stricte folie.
Avait-elle renié? Avait-elle trahi? Fauté, en manquant à l'appel ainsi? Se dissolvant hors des préoccupations du monde, mais en couvant peut-être d'autres. Plus hautes.
Elle referma les yeux.
Et continua de rêver de Systéria. Où elle retournerait, assurément.