Enfant soleil
Post by Lili - November 15, 2007 at 5:57 AM
On peignait son corps, nu, de riches couleurs. Des torsades jaunes, des lignes rouges, on tressait ses cheveux et les ornementaient de coquillages et de pierres des marais. Ses longs cheveux étaient coiffés comme ceux d’une princesse, princesse d’un jour. On la revêtit de plusieurs bijoux, bijoux d’os, de pierres, de branches, de fleurs. Le collier à plusieurs étages venait cacher ses seins, et une jupe de paille avait été confectionnée à sa taille. Des boucles pendaient de ses oreilles, et de nombreux bracelets étaient placés à ses poignets et à ses chevilles.
Les femmes du village la retenaient, afin qu’elle ne bouge pas. Une princesse qu’on prépare contre son gré. Les vieilles prenaient plaisir à lui peindre le corps, les hanches, la poitrine, le dos, ses bras et son visage. On n’écoutait pas les protestations de la belle, on n’écoutait pas ses pleurs et ses cris. Chaque femme était joyeusement excitées, et la traitaient avec la plus grande ignorance tout autant qu’avec la plus grande des admirations. Elles s’exécutaient devant l’œil avisé du grand chaman du village qui dirigeait la préparation en agitant des maracas et des bâtons d’encens pour bénir la promise. A l’extérieur, on entendait déjà les chants enjoués du peuple, l’engouement pour l’événement qui se préparait. Le bruit des tambours faisait vibrer la terre et onduler l’eau et la peinture qui étaient dans des bols de bois. L’ambiance était à la fête alors qu’Aiyana, elle, se débattait avec la fureur du désespoir.
On sorti la belle de la tente de préparation, deux hommes vinrent la maintenir, pour la mener jusqu’à l’autel. Sa mère et son père vinrent l’embrasser de fierté, ils pleuraient de joie, tellement ils étaient honorés que leur fille fusse choisie pour un événement si important. La belle, elle, se débattait avec horreur, son corps s’agitait comme si le démon s’en était emparé. Les deux fiers soldats la maintenaient tant bien que mal. Un si jeune corps, si agile et si délicat qui gigotait comme un poisson qui se débat, qui cherche à se défaire d’un filet.
La plus belle du village allait, à toutes les éclipses solaire, être offerte au monstre des marais pour assurer la protection du peuple sauvage. L’autel était prêt à la recueillir, les sangles avaient été bien installées, des lianes de la jungle. Mais voilà qu’en l’installant, cette petite fleur éternelle s’en fut, leur glissa des mains. Avec un coquillage qu’elle s’arracha des cheveux, elle creva l’œil d’un des deux hommes, qui tomba à genoux en hurlant sa douleur, et on pu entendre tout le peuple retenir son souffle. Les guerriers coururent à leurs montures, mais Aiyana eut le temps de courir vers les murailles des hommes « sauvages » de Systéria. Elle n’avait certes pas le temps de se rendre jusqu’à la cité des hommes-de-guerre, mais plus près de la cité, gisait souvent des cadavres d’animaux, et c’est sous un de ceux-ci qu’elle se cacha. Les guerriers passèrent et repassèrent tout juste à côté d’elle, où elle retenait son souffle au point d’en devenir bleue. Ils s’aboyaient des paroles dans une dialectique toute propre aux sauvages des marais. Et ce ne fut que lorsque l’éclipse solaire débuta qu’ils prirent peur et rentrèrent au village. Alors qu’Aiyana, elle, couru vers la cité Systérienne, évitant de peine et de misère les nombreuses créatures sauvages, les loups et les serpents.