[Alaran Volsung] Gamin des rues, individus louches
Post by Alaran Volsung, AdM - May 27, 2008 at 1:20 AM
Maintenant seul… toujours seul, mais qu’importe?
Il n’était qu’un simple écuyer. Son employeur, sire le chevalier Beldon, était un parvenu, un nouveau riche dont la famille avait gagné sa loyauté moyennant une bonne pesée d’or. Les ennemis de sire Beldon étaient nombreux, plusieurs doutant de sa capacité à régner. Après tout, il était de sang rouge, de famille paysanne et vilaine. « *Le marchandage est une plaie qui engendre les pires monstruosités et qui permet les écarts terribles de la nature *» , avait dit un noble à l’écurie. Qu’importe. Il savait qu’il ne penserait pas cela bien longtemps. Il se rangerait, comme tous les autres.
À dire vrai, quoi que constituant la majeure partie de l’élitisme du sang bleu, les ennemis de sire Beldon se faisaient de moins en moins nombreux… La maladie frappait les plus vulnérables, les plus vieux mourraient de vieillesse et les plus jeunes attrapaient certaines maladies d’amour… Comble de malheur, un des opposants les plus vigoureux, Hector Landebasse était mort dans un terrible accident de charrette, ce qui laissait depuis peu plus de temps au bon sire Beldon pour se reposer. Mais tout ça devrait recommencer, rien n’était terminé. Le jeune écuyer brossait la crinière châtoyante de l’étalon noir, les yeux brillants, anticipant son prochain rôle.
Une ombre se profila dans l’ouverture de la porte. L’elfe noire rit et lui lança une bourse qu’il poussa du pied sous un tas de foin. Elle lui fit un signe. Le cheval rouspéta, poussant le demi-elfe. Elle avait disparu.
L’heure était propice aux déplacements. Il laissa sa brosse, reprit sa bourse qu’il porta a sa ceinture et quitta l’écurie en direction des portes du fort. Les gardes le saluèrent et échangèrent avec lui quelques blagues sur la paysanne qui apportait le lait. Il rit. Camaraderie oblige.
Il descendit la route lentement, saluant quelques visages familiers, inclinant la tête à d’autres. La bourgade était nouvelle, peu de chaumières s’étendaient encore au pied du fort, mais au rythme où allaient les choses, ça devait bien changer. Il entra dans une taverne où trônaient deux piliers trop loquaces pris dans une argumentation militaire et se glissa aux cuisines. Une trappe ouverte semblait l’inviter. Dans le caveau, derrière de grosses pièces de viande séchée et quelques tonneaux, son vrai maître attendait avec Vier’Elna, sa tuteure? Il ne savait trop quel nom lui donner… Elle s’intéressait à lui, c’était assez pour le contenter.
-Tu t’occupe des pommes, fiston.
-Les pommes… oui. Répondit le demi-elfe au demi-orque, un sourire aux lèvres.
-Vier’Elna va couper le pommier. On dit que les fleurs de certaines plantes des forêts du sud sont très toxiques. La garde en revient, justement.
Il hocha la tête. Ces deux individus, c’était sa famille. Son Clan. Il devait être mort, pris gamin a voler du pain. On voulait lui couper la main. Dans les conditions dans lesquelles il vivait, c’était la mort, atroce, par infection. Ergg lui avait sauvé la vie, tuant un garde net et amochant salement l’autre.
Il se pencha pour lire le nom du pommier. Il ne put s’empêcher une réaction de surprise, qui fit rire l’elfe noire. Ça devait bien arriver un jour…
-Le pommier n’a pas assez de pommes, fiston.
-Je suppose… Et ma couverture?
-Tu vas prendre le bateau. Briganne.
Il s’ébroua. Avait-il bien entendu?
- En quel honneur? Qu’est-ce que j’ai fait?
-Après ça impossible de rester ici. Répondit une douce voix au fort accent. Il se tourna vers Vier’Elna, qui lui souriait.
-C’est loin… Bon. Ça explique la bourse.
Il sortit. À la fois en colère et nerveux. Il ramassa une corbeille de pain qu’il laissa choir sur le comptoir entre les deux ivrognes en sortant. Le tavernier, comme convenu, lui hurla de ramener ses fesses, l’écurie était encore sale. Il acheta des fers pour destrier, continua sa route vers le fort, recroisa les gardes qui sifflèrent à la qualité des fers. Il s’engagea vers l’écurie et détacha les vingt-deux chevaux de la garde, ainsi que les trois chevaux du bon sire le chevalier Beldon. Puis, il alluma une lampe qu’il échappa dans un coin avant de sortir par un trou creusé sous la palissade. Pas un son dans la cour. Il marcha vers le pont-levis du nord. Il salua deux autres gardes dont une recrue qu’il n’avait jamais vue. Puis, à bonne distance, il disparut dans les bois.
L’incendie fit rage. On hurla. On sonna les cloches. Le bon sire Beldon ne survécut pas à la fleur de Saless. On jeta le blâme sur le second escadron de la garde, revenant des forêts du sud, qui fut interrogée. Par souci de confiance, on désigna un coupable que le peuple regarda se faire pendre.
Vier’Elna ne fut jamais au rendez-vous. Il prit le bateau seul.