La voix du vent

La voix du vent

Post by Eïlnaefël Gyssëlrvis - September 8, 2012 at 3:49 PM

"Regarde, regarde Eïlnaefël ! Regarde moi !"

L'elfe, blonde platine, tourna alors la tête vers l'enfant. Tout maigre et plein de vie. Et là, le voilà qui s'élançait dans les airs, insouciant, pour retomber, plusieurs mètres plus bas, dans un lac limpide ou aucune forme de mal n'avait encore sû pénétrer. La jeune elfe rit un peu, tout en applaudissant du bout des doigts, puis cueillit un raisin sauvage, issu d'une vigne, puis le roula contre sa joue pour l'engloutir derrière les portails de sa bouche gourmande.

"Encore Ëarombor ! Encore, mais cette fois, fais-le en tournant !" L'encourageait-elle.

Le torse gonflé comme celui d'un paon, tout fier. Le petit frère de notre personnage principal remonta le long de la rive, puis du gros rocher naturellement posé en amont, qui leur servait de tremplain. Il saluait sa grande soeur avec de larges gestes des bras, tout en puisant au fond de son gosier, des gris aigües et excité. Du moment qu'elle lui répondait, il recommençait ses figures de plongeur, cherchant à impressionner son aînée.

L'après-midi défila à vive allure sous le hâlo d'un petit elfe qui réclamait à tout va l'attention d'une grande soeur désormais adulte. Et, patiemment, elle répondait à ses cris avec des encouragements, des gestuelles des bras, et en l'accompagnant dans les eaux fraîches et claires. Ce, jusqu'à la tombée de la nuit.

Lorsque les dieux peignirent le ciel de différentes couleurs, tous deux savaient qu'il était temps de rentrer. Eïlnaefël se leva calmement, puis le jeune elfe, blond comme la lune, couru à en perdre haleine pour la retenir, tirant sur sa main. Ses traits n'exprimant plus cet innocence d'enfant, mais une triste angoisse.

"Non, n'y va pas, je ne veux pas que tu partes ! Je veux pas ! Je veux pas !"

En un sourire désormais triste, la grande soeur s'accroupit. Du bout des doigts, elle décolla une mèche du front de son petit frère. Continua sa caresse jusqu'à lui pincer la pointe de l'oreille.

" Ëarombor, tu le sais que nous ne ferons pas autrement. Les dieux nous font don d'une voie dès la naissance. Ils nous la font parvenir de différentes façons. Il est possible que toi, ce soit la voie des eaux, tu te débrouilles si bien ! Moi, c'est le vent qui est venu murmurer à mon oreille."

" Non !! Je ne veux pas ! je ne veux pas..." Continuait-il en vagissant comme l'enfant qu'il était.

Eïlnaefël ne lui en voulait pas. Elle arrivait à comprendre puisque les rôles avaient jadis été inversés lorsque sa cousine partit pour son voyage initiatique. Désormais, c'était son tour. Elle tendit ses minces bras vers le garçon aux traits elfiques, qui se blottit contre son coeur, puis elle reserra ses mains autour de lui, le soulevant de terre. Puis, lovés l'un contre l'autre, elle traversa un long chemin entre fougères et arbres millénaires jusqu'à un petit village rudimentaire d'ou s'élevait le bruit de tambours et de flutes. Les ombres s'allongeaient de plus en plus rapidement, alors que le soleil se hâtait de rejoindre l'horizon. Le village du Clan de la Feuille Sacrée préparait une grande fête. Un grand feu central avait été allumé, des bancs avaient été placés tout autour et un banquet de fruits, de viandes faisandées et de légumes était installé de façon à mêler couleurs et formes pour que le tout soit d'une beauté créative. Attirant ainsi le bon oeil des dieux sur celle qui partirait en quête de son destin.

Notre protagoniste approcha de ses parents. Deux elfes dont le visage était sans âge et dont le regard reflétait une infinie sagesse. La paix émanait de leurs attitudes respectives, et c'est en arrachant un cri au jeune Ëarombor, qui cherchait à se rattacher à sa grande soeur, qu'il parvinrent à l'en détacher. L'enfant avait essayé de se raccrocher à Eïlnaefël. Si bien qu'il la quitta en ramenant avec lui quelques cheveux et une goutte de sang, sous ses ongles. Mais notre elfe platine ne se plaint pas. Elle le regardait la quitter avec mélancolie, se disant qu'à un moment de leur vie, ils se retrouveraient.

Il prit plusieurs heures à la famille Gyssëlrvis à endormir Ëarombor. Mais du moment qu'il pu rejoindre le monde onirique, la fête commença.

La musique, les percussions, le festin. On déshabilla complètement Eïlnaefël pour peindre son corps aux couleurs du clan. Tous chantaient et dansaient dans une réunion qui ne pouvait qu'être joyeuse. Malgré l'amertume qui siégeait dans le coeur des parents de sang de notre elfe aux yeux clairs, au sourire généreux, le bonheur était au rendez-vous. Ils savaient que c'était là la coutume et qu'elle ferait honneur au clan ainsi qu'aux dieux en suivant sa voie. C'est donc au bout de la nuit, quand les couleurs revinrent teinter le ciel, après avoir donné de chaleureuses accolades à chaque membre de son village, après s'être arrachée des bras de sa mère et de son père, qu'elle pleurerait certainement, qu'elle partit. Se remémorant le tribu que sa famille lui avait fait. La remise d'un sac de voyage, avec des vêtements quelconques. Un pantalon aux couleurs banales, un gilet tout aussi banal, et le tout pouvant être recouvert d'une toge blanche délavée. Les vêtements initiatiques du voyageur.

Elle avait encore un long chemin à faire avant d'embarquer sur le navire, qui ferait alors plusieurs escales avant de toucher son terme. Un terme dont elle ignorait le nom et la position géographique.