Juliette d'Amaron
Post by Juliette El'Idhrin, CP - February 19, 2006 at 2:13 AM
Nom : Juliette d’Amaron
Age : 10 ans
Race : Humain
Signes significatifs : Une curiosité incessante
**Vingt-quatre heures enfantines **
La femme de chambre s’apprêtait à regagner sa couche. Il était très tard mais au moins elle avait fini une bonne partie de ses tâches. Alors qu’elle traversait le long couloir qu’un impérieux tapis semblait rendre interminable, une faible lueur apparaissait au pied d’une porte. L’enfant sursauta et essaya en vain de cacher sous sa couverture le gros livre lorsque la nurse entra :
-\tMademoiselle ! Pensez vous vraiment que c’est une heure à lire ? La réprimanda tendrement la vieille femme.
-\t Mais Ygerne, ne vous est-il jamais arrivé de ne pouvoir vous détacher d’un livre ? Celui-ci est si passionnant … ! Ho s’il vous plaît, laissez moi lire encore un peu ! Plaida Juliette, avec un regard presque suppliant qui fit fondre la bonne femme.
Elle s’installa près de la jeune fille et posa sa bougie sur la commode.
-\tQue raconte ce livre pour vous passionner à ce plus haut point ? demanda-t-elle, caressant doucement les boucles brunes qui ornait le tendre visage de Juliette.
-\tC’est l’histoire d’un peuple, un peuple qui s’unit pour lutter contre des troupes venant du Nord … et il y a une histoire d’amour aussi !
-\tN’êtes vous pas trop jeune pour lire ceci ? La taquina Ygerne
-\tVoyons … ! J’ai déjà lu des livres bien plus poussés ! Rétorqua la fillette, piquée au vif, et puis je comprends presque tous les mots, il n’est pas bien difficile !
-\tJe n’en doute pas ! Mais la nuit est bien avancée mademoiselle, demain vous avez une grosse journée il est temps de dormir à présent.
Docile, Juliette inclina la tête et déposa le livre à son chevet avant de se pelotonner contre Ygerne qui la pris dans ses bras et lui chanta doucement une berceuse.
Les premiers rayons de soleil pénétrèrent la pièce qui baignait dans une lumière matinale. Juliette se réveilla péniblement et contempla un instant la parcelle de ciel qu’elle pouvait apercevoir de son lit encore immaculé par les nuages. L’arrivé de sa femme de chambre la tira de sa rêverie.
-\tAvez-vous bien dormi mademoiselle ? Aujourd’hui vous accompagner votre père, il nous faut choisir une très belle robe !
-\tJe sais déjà celle que je vais mettre ! Lança Juliette un large sourire aux lèvres en bondissant hors du lit, celle que mon père m’a acheté il y a quelques temps … elle fouilla son armoire et passa en revu les différentes robes de sa penderie, ha ! celle-ci !
Elle montra fièrement une longue robe bleue clair, ornée de dentelles ici et là. Acquiesçant et la félicitant sur son choix, Ygerne l’aida à se déshabiller et à enfiler la robe. Juliette était de taille moyenne pour une fillette de dix ans. Son visage possédait des traits fins, ses joues rosées amplifiaient le sourire qui habituellement était sur ses lèvres. Ses longs cheveux bruns étaient tirés en arrière, regroupés dans une natte unique qui lui arrivait au bas du dos.
Lorsqu’elle fut prête, elle descendit le grand escalier en prenant tout le soin possible pour paraître la plus élégante face à son père qui l’attendait.
-\tMa fille ! Tu es resplendissante ! S’exclama-t-il
-\tMerci père, je voulais être la plus belle pour sortir ! Avoua-t-elle en se blottissant dans les bras que venait de lui ouvrir William, il me tarde d’aller voir la ville dans ses moindres recoins !
Après quelques recommandations à l’intention d’Ygerne, ils sortirent. L’odeur fraîche du petit matin embaumait l’air humide, elle inspira à pleins poumons. Ils longèrent la maison et se retrouvèrent sur la route principale. William avait plusieurs courses à faire et ne voulant pas laisser Juliette à la maison il décida à son grand plaisir de l’amener avec lui. Dès lors commença un long et intarissable flot de questions. La fillette était plus que tout très curieuse et déjà exigeait des réponses à toutes ses questions. Ils se baladèrent presque toute la matinée et quand le soleil atteignit son apogée dans le ciel, William demanda à sa fille de l’attendre dans le parc, avait-il une course si importante qu’elle devait se faire sans elle ? Juliette se le demandait souvent quand son père s’absentait ainsi mais elle ne posait pas la question.
Elle fit quelques pas quand une fleur rouge écarlate attira son attention, elle s’agenouilla et inspira les yeux fermés le doux parfum qui en émanait. Elle sursauta quand une main se posa sur son épaule :
-\tQue fais-tu ? demanda un petit garçon
-\tJe regardais cette fleur, elle est jolie n’est ce pas ? lui répondit Juliette, l’observant à la dérobée
-\tOui, je trouve aussi, tu t’appelles comment ?
-\tJuliette d’Amaron ! Et toi ?
-\tNathan ! Tu es jolie toi aussi tu sais ! Affirma le jeune garçon, souriant timidement.
Juliette quant à elle détourna le regard pour cacher ses joues qui s’empourprèrent. Elle côtoyait peu les garçons, répétant qu’elle ne les supportait pas et qu’ils l’empêcheraient d’apprendre correctement mais c’était pour mieux cacher la curiosité qui l’attirait inexorablement vers eux. Elle se tourna vers lui, et se risqua à l’observer. De toutes évidences il n’était pas noble, comme elle, et son regard s’arrêta sur le chemisier maculé de terre que portait le garçon. Devançant la question qu’elle s’apprêtait à poser il dit :
-\tMon père est fermier, nous avons une grande terre plus loin, quand je serais grand moi je deviendrais comme mon père ! Déclara Nathan visiblement fier, et toi que veux tu faire ? Il lui tendit la main qu’elle prit timidement, se sentant presque honteuse et le suivit jusqu’au banc quelques pas plus loin.
-\tEt bien moi, je veux tout savoir ! Lança t-elle avec une pointe d’orgueil naissante, mon père m’apprend tout ce que je veux, bientôt je pourrais faire ce que je veux !
-\tEt bien ... tu en as de la chance ! Moi aussi j’aimerais bien pouvoir apprendre des choses mais on a pas les moyens … de son regard se lisait soudain une profonde désolation, qui fit perdre à Juliette ses moyens quelques secondes et surtout toute forme d’égocentrisme.
-\tJe … je suis désolée, balbutia-t-elle confuse, mais si tu veux, je peux t’apprendre des choses moi !
-\tVraiment ? Tu ferais ça ? Questionna le garçon, surprit par cet élan soudain de générosité.
-\tBien sur ! Suis moi !
Elle le prit à son tour par la main et l’entraîna devant une petite bâtisse qui marquait l’angle du parc. Elle lui apprit de quelles pierres était formée celle-ci, sa hauteur approximative et répondit avec un plaisir ostensible aux questions parfois naïves que posait Nathan.
Juliette savait que son statut de noble était un privilège, elle ne comprenait pas vraiment encore ni pourquoi ni comment mais Ygerne ne lui avait-elle jamais rappelé qu’elle avait une chance que beaucoup rêverait d’avoir ? Juliette parfois se perdait dans les méandres de l’orgueil qui la faisait se considérer comme supérieure aux autres, mais sa générosité la ramenait très vite sur terre et elle n’hésitait pas à faire partager aux autres les plaisirs dont elle jouissait quotidiennement.
Elle adorait par-dessus tout montrer son savoir, et la fierté qu’elle lisait dans les yeux de son père quand elle récitait une leçon apprise par elle-même la comblait d’une joie indicible.
Etant à bout de questions, Nathan finit par demander :
-\tTu sais vraiment tout … Plus tard tu seras diplomate j’en suis sûr ! Ils sont très intelligents et ils savent très bien parler !
-\tJe ne sais pas … j’aimerais bien écrire des livres aussi, lui avoua-t-elle, pensant qu’elle recevrait une moquerie face à cet aveu …
-\tTu en écriras un pour moi ? lui répondit-il avec un sourire plutôt tendre aux lèvres qui troubla Juliette.
-\tBien sûr ! Et je te le donnerai ! Assura-t-elle, surprise de la réponse.
-\tTu es vraiment gentille tu sais …
Elle ne comprit pas vraiment ce qui se passait quand Nathan la prit dans ses bras. Cette étreinte soudaine lui rosit les joues mais elle ne parvint pas à s’en défaire. Derrière une apparence froide et distante qu’elle essayait d’entretenir se trouvait une frêle fillette vulnérable. Nathan la libéra trop tôt et elle comprit en voyant son regard se lever au dessus de sa tête que son père était derrière elle. Elle fit volte face brusquement, confuse et honteuse, elle parvint tant bien que mal à articuler :
-\tJe vous attendais père ! Partons ! Elle se leva et prit la main que lui tendait William sans même jeter un regard à Nathan. Ce n’est qu’en sortant du parc qu’elle risqua un faible signe de main qui n’échappa pas à William. Il se contenta de sourire sans ajouter un mot.
-\tQue faisons-nous à présent ? Demanda-t-elle l’air hagard
-\tEt bien il me semblait que tu serais ravie de faire un tour à la bibliothèque me trompais je ?
-\tHo excellente idée ! S’exclama Juliette, pressant la main de son père, il y a tant de livre que je voudrais lire ! Voyons … un livre sur la magie peut- être ?
-\tCe sera à toi de choisir ! Nous y sommes, va quérir le livre qui t’intéresse je vais m’entretenir avec la bibliothécaire, indiqua t-il, déposant un baiser sur le front de Juliette.
L’enfant arpenta avec un profond plaisir les allées bordées d’étagères immenses contenant un nombre considérable d’ouvrage. Passionnée très jeune par les livres, Juliette réclamait toujours qu’on lui conta une histoire et quand elle fut en âge d’apprendre à lire, elle passait des heures entières sans détacher son regard des lignes. Cette soif pour la lecture nourrissait son langage et l’étoffait. Ainsi quand elle eut sept ans, on lui en donnait douze à l’entendre parler. Ce décalage la remplissait de fierté mais aussi la pénalisait car bien trop souvent elle s’ennuyait avec les autres enfants qui découvraient les lettres pendant qu’elle lisait des livres de plusieurs centaines de pages. Elle restait souvent avec les adultes mais eux ne partageaient pas ses jeux. Ecartelée entre deux âges, elle en souffrait et attendait secrètement avec impatience de grandir pour pouvoir partager ses centres d’intérêt. Sa rencontre avec le petit Nathan lui avait apporté un certain réconfort, lui au moins ne s’était pas moqué quand elle lui révéla son projet futur, et il s’intéressait à elle … Son esprit se mit à vagabonder et imaginer quelques situations dont elle eu honte après coup d’avoir osé penser.
Elle reprit sa quête et finit par trouver un livre contant l’histoire tragique d’un couple qui s’aimait. Elle décida d’en prendre un autre, plus banal pour son âge et cacha l’autre sous les plis de sa robe pour qu’il échappât au regard interrogateur de son père. Chose faite, Juliette regagna l’entrée et rejoignit William.
-\tTu as trouvé ce que tu cherchais ? Demanda-t-il d’un ton que Juliette jugea comme soupçonneux, elle s’empressa de répondre
-\tOui oui, on peut partir !
William ne posa pas de questions, mais loin d’être naïf et connaissant pour le moins sa fille il savait pertinemment ce que cette soudaine envie de partir cachait.
Le soleil déclinait à l’horizon inondant le ciel d’une pâle couleur rose. L’air se faisait plus froid et Juliette dû attacher sa belle houppelande. Son père tenait à l’emmener quelque part, mais voulant lui faire la surprise il n’avait rien révélé. Elle poussa un petit cri de surprise découvrant l’enseigne du magasin.
-\tJe sais que Maria, ta dernière poupée s’est brisée, nous allons en racheter une autre tu es d’accord ? Demanda William enlaçant de son grand bras les épaules de sa fille.
-\tHo j’en voulais tant une autre ! Père comment avez-vous deviné ?
-\tJe devine tout, ne l’oublie pas ! Allez va la choisir, et choisis la bien !
Juliette s’élança dans le magasin après avec promptement salué le commerçant. Elle mit un temps qui paru interminable à choisir une poupée en porcelaine et quand ils sortirent la nuit avait déjà enveloppé la ville. Père et fille se pressèrent de rentrer.
La fillette se précipita vers la chambre de sa nurse pour lui montrer la nouvelle pensionnaire qu’elle baptisa Kelia. Elle ouvrit la porte avec fracas sans même frapper, happée par l’excitation et se retrouva nez à nez avec Ygerne qui se changeait.
-\tMademoiselle ! S’écria-t-elle, il convient de frapper à une porte même quand vous entrez chez votre bonne !
-\tPardonnez moi Ygerne ! Mais j’étais tellement impatiente de vous montrer ma nouvelle poupée … ! s’excusa l’enfant en détournant les yeux par pudeur. La nurse éclata de rire, et finit rapidement d’enfiler une tenue.
-\tElle est très belle ! comment se nomme cette charmante poupée ?
-\tElle s’appelle Kelia ! Et elle sait faire pleins de choses ! S’exclama la fillette, ravie au plus haut point.
-\tJe n’en doute pas une seule seconde ! Mais … Mademoiselle qu’est-il donc arrivé à votre robe ? Ygerne se pencha sur l’enfant, l’étreinte fugace de Nathan avait laissé des traces sur la soie bleutée. Mais quand finirez vous par cesser de vous tâcher ! Je vais devoir la laver, allez enlevez moi ça et filer donc vous laver !
-\tYgerne … ce n’est qu’un peu de terre, ce n’est pas bien grave ! Rétorqua Juliette qui avait plus envie de jouer avec sa poupée qu’aller prendre un bain et puis …
-\tMademoiselle, coupa la nurse, avez-vous oublié le repas que votre père a organisé ce soir ? Il vous faut être ravissante et là vous ressemblez plus à une gavroche !
Juliette n’eut même pas le temps de répliquer qu’elle se retrouva nue dans l’eau chaude. Ygerne lui défaisait les nœuds qui naissaient dans les longs cheveux bruns et lui chantait
un air appris il y avait fort longtemps. Juliette repensa à Nathan et se risqua à demander avec un long moment d’hésitation :
-\tMa nurse, vous avez déjà aimé ?
-\tSi j’ai aimé ? Bien sur ! Mais c’était il y a des années, il est mort à présent paix à son âme…
-\tEt vous vous êtes mariés ? Demanda Juliette, posant un regard peu sûr sur celui d’Ygerne.
-\tNe mélange pas mon enfant … Le mariage n’est pas l’amour et l’amour n’est pas le mariage, j’ai aimé oui mais je me suis mariée à un homme qui avait un bon parti. C’est ainsi que cela fonctionne … Lui répondit-elle en caressant le visage de l’enfant
-\tAlors on ne peut se marier avec l’homme qu’on aime ? Demanda Juliette, la voix et le visage grave.
-\tIl arrive parfois que les deux se rencontrent, mais mon enfant ce sera votre père qui décidera de votre futur époux … elle sentit la tristesse de Juliette et l’attira dans ses bras, la serrant contre sa gorge volumineuse et rassurante, mon enfant je suis persuadée que votre père saura vous trouver le compagnon de vos rêves !
-\tJ’ai peur de ne pas l’aimer … Des fois je vois des jeunes filles qui sont avec des vieux messieurs … elles n’ont pas l’air heureuses … c’est pour ça que je veux pas voir les garçons, je veux pas être mariée à quelqu’un que je n’aime pas !
-\tJuliette ma fille calmez vous, vous avez encore le temps de changer, et croyez moi, vous êtes promise à une belle vie ! Lui assura Ygerne de sa voix la plus douce, la sortant de l’eau.
Juliette mit fin à la conversation par son silence. Elle ne l’avait jamais avoué à son père mais tout ce qu’elle lisait sur le mariage l’angoissait au plus haut point. Elle craignait de devenir une femme au foyer qui passe ses journées à filer … non ! Elle l’avait décidé, elle n’accepterait pas ce destin ! Et son père serait assez lucide pour s’en rendre compte … Rassuré par ses quelques pensées, Juliette se laissa habiller et descendit accueillir les invités avec son père.
Ils se mirent rapidement à table et Juliette fut flattée d’entendre des compliments sur sa façon de se tenir, de parler, de se comporter.
-\tJe n’ai que trop rarement vu une jeune fille aussi bien élevée que Juliette ! Lança un invité
-\tMoi non plus, cette douce enfant est une vraie perle rare Sir William, vous en avez de la chance ! Ajouta une vieille dame qui faisait peur à Juliette. Cette dernière trouvait qu’elle ressemblait à une sorcière car la description qu’elle en lisait dans les livres correspondait exactement à celle qui était en face d’elle. Mais elle se garda de tous commentaires et se contenta de sourire.
Le repas paraissait interminable et William voyant que Juliette s’endormait demanda à sa nurse de la porter au lit. Feignant en tout point sa fatigue, la fillette une fois seule, s’empressa de prendre le livre interdit qu’elle avait caché dans son armoire. Elle attendit un peu avant d’allumer sa bougie, ne voulant pas être surprise avec un tel livre dans les mains.
Elle repensa à sa journée, s’inventa quelques histoires, se demanda si tout ce qu’elle faisait lui servirait plus tard. Finirait-elle mariée à un homme étrangé à son cœur ? Quel métier exercera-t-elle ? Sera-t-elle aimé dans ce qu’elle entreprendra ? Toutes ses questions lui trottaient inlassablement dans la tête.
Lorsque le silence régna dans la maison, elle se leva et alluma la bougie manquant de peu de se brûler et d’enflammer le tapis.
Puis elle s’allongea et commença à lire. Nombreuses fois elle entendit Ygerne se lever et plaça sa main devant la bougie pour diminuer la faible lueur qu’elle diffusait mais renonçait à l’éteindre … L’excitation de ce faire prendre doublait le plaisir qu’elle prenait à lire.
Elle s’identifia au personnage féminin, une jeune femme un peu perdue aimant un homme qu’elle ne devrait pas. Cette situation était courante, Ygerne ne lui avait- elle pas avoué qu’elle avait eu un amant ?
Elle lut un bon moment, rougissant lors de descriptions un peu osées et reposa au milieu de la nuit le livre sous ses vêtements. Puis elle souffla sur la petite flamme qui se mouvait près d’elle plongeant ainsi la pièce dans le noir complet. Elle serra sa poupée contre elle, le noir l’angoissait toujours un peu et finit par s’endormir.