HaSam_Sabbah [-BG-]
Post by Hasam Sabbah, AdM - August 17, 2005 at 3:21 AM
Le rituel du passage, en quelques sortes… Oui, c’était ça: si ils réussissaient à convaincre les membres de la confrérie qui s’étaient, en ce minuit, réunis pour le test ultime, ils pourraient enfin accéder au monde auquel ils avaient toujours rêvé: L’union des gitans, la reconnaissance… l’art !! Mais avant cela, nos trois amis devaient parvenir à se transcender, à donner le meilleur d’eux même, car il n’y aurait pas de deuxième chance, pas de droit à l’erreur.
C'est ainsi que l’heure vint. Ils devaient maintenant montrer au monde qu’ils étaient, eux aussi, artistes. Mais taisons nous, et assistons nous aussi à l’expression de leur talent de conteur : voila que l’un d’entre eux se lève, et s’en va nous raconter l’histoire d’un certain Hasam Sabbah…
"Depuis huit jours, il neigeait, et la terre brune, la terre déjà fécondée par les semences d’automne était devenue livide, endormi sous un grand drap de glace. Il faisait froid dans les chaumières coiffées d’un bonnet blanc ; et les pommiers dans les cours semblaient fleuris, poudrés comme au joli mois de leur épanouissement.
"Il allait vite, le long de l’étroite rivière qui moussait, grognait, bouillonnait et filait dans son lit d’herbe, sous une voûte de saule. Le long de l’eau, de grands arbustes avaient poussés, chauffés par le lointain soleil d’été ; mais sous la futaie, on ne trouvait rien que de la mousse, de la mousse épaisse, douce et molle, qui répandait dans l’air stagnant une odeur légère de moisi et de branches mortes.
"Le vent se levait. Il venait de se recouvrir et de reprendre son pas accéléré quand il aperçut, au pied d’un arbre, un couteau, un petit couteau d’enfant. Comme il le ramassait, il découvrit encore un dé à coudre, puis un étui à aiguille deux pas plus loin. Ayant pris ces objets, il pensa : « Qui diable pourrait bien s’amuser à tricoter par un froid pareil, et en plein bois ? » ; et il se remit en route, mais il ouvrait l’œil à présent, s’attendant toujours à trouver autre chose.
"Soudain, il s’arrêta net, comme s’il se fut heurté contre un mur invisible, car, à deux pas devant lui, gisait, étendu sur le sol, un corps, nu. C’était celui d’une jeune fille d’une quinzaine d’années. Elle avait les bras ouvert, les jambes écartés, la face couverte d’un mouchoir. Un peu de sang maculait ses cuisses. Râakim se mit à avancer sur la pointe des pieds, comme s’il eut redouté quelques dangers, les yeux écarquillés.
"Qu’était ce que cela ? Elle dormait, sans doute ? Puis il réfléchit qu’on ne dort pas ainsi tout nu, si tôt le matin, sous des arbres frais. Alors elle était morte ; il se trouvait en présence d’un crime. A cette idée, un frisson froid lui courut dans les reins, bien qu’il fût un ancien soldat. Elle ne portait aucune trace de blessures, rien que ce sang figé entre ses cuisses… Comment donc l’aurait donc tué ?
"Il s’était arrêté tout près d’elle, et il la regardait, appuyé sur son bâton. Certes, il la connaissait, puisqu’il connaissait tous les habitants de la contrée ; mais ne pouvant voir son visage, il ne pouvait deviner son nom. Il se pencha pour ôter le mouchoir qui lui couvrait le visage, puis s’écarta, la main tendue, retenue par l’appréhension. Il tomba à genoux et enleva, comme si il l’eut arraché, le mouchoir qui couvrait la face de la morte. Quand il vit cette figure affreuse, noire de boue et convulsée, il se redressât d’une secousse, et, manquant de tomber a la renverse, il lâcha: « Nom de Dieu de cochon, qui à fait ça ? ».
"Derrière un arbre, un petit cri répondit à ce juron. Sans même prendre la précaution d’empoigner sa dague, il courut en direction du son qu’il croyait avoir entendu. Là, sur un tas de hardes, un tout petit enfant, assis les jambes ouvertes, jouait avec une pomme de terre, qu’il laissait parfois tomber sur la pile de guenilles qui était sous lui, les habilles de la morte, probablement…
L'homme arreta sa tirade quelques secondes, fixant un à un la douzaine de personne qui l'entourait. Visiblement satisfait de l'attention qu'ils lui portaient, il repris de plus belle :
"Les recherches durèrent tout l’hiver ; on ne découvrit pas le criminel. Ceux qu’on soupçonna et qu’on arrêta prouvèrent facilement leur innocence, et la justice renonça à la poursuite du coupable.
"Prêt d’une année s’écoula, le meurtre restant dans tout les esprits, tout les cœurs. L’automne suivant vint, les feuilles tombèrent. Elle tombaient jour et nuit, descendaient en tournoyant, rondes et légères, le long des grands arbres ; et on commençait à voir le ciel à travers les branches. Quelques fois, quand un coup de vent passait sur les cimes, la pluie lente et continue s’épaississait brusquement, devenait une averse vaguement bruissante qui couvrais la mousse d’un épais tapis marron, criant un peu sous les pas.
"Et le murmure presque insaisissable, le murmure flottant, incessant, doux et triste de la rivière, semblait une plainte, et ces feuilles tombant toujours semblaient des larmes, de grandes larmes versées par les grands arbres tristes qui pleuraient jour et nuit sur la fin de l’été, sur la fin des aurores tièdes et des doux crépuscules, sur la fin des brises chaudes et des clairs soleils, et aussi, peut-être, sur le crime qu’ils avaient vu commettre sous leur ombre, sur l’enfant violée et tuée à leurs pieds. Ils pleuraient dans le silence du bois désert et vide, du bois abandonné et redouté, où devait errer, seule, l’âme, la petite âme de la petite morte.
"Et voila que Râakim, tout à coup, revint se promener dans les bois. Chaque jour, à la nuit tombante, il sortait de sa maison, descendait à pas lent son perron, et s’en allait sous les arbres d’un air songeur, les mains dans ses poches. Il marchait longtemps sur la mousse humide et molle, tandis qu’une légion de corbeaux, accourue de tous les voisinages pour coucher dans les grandes cimes, se déroulait à travers l’espace, à la façon d’un immense voile de deuil flottant au vent, en poussant des clameurs violentes et sinistres. Quelques fois, ils se posaient, criblant de taches noires les branches emmêlées sur le ciel rouge, sur le ciel sanglant des crépuscules d’automne. Puis, tout à coup, ils repartaient en croassant affreusement et en déployant de nouveau au-dessus du bois le long feston sombre de leur vol.
"Et Râakim errait encore aux pieds des arbres, lentement, puis, quand les ténèbres opaques ne lui permettaient plus de marcher, il rentrait, tombait comme une masse dans son fauteuil, devant la cheminée clair, en tendant au foyer ses pieds humides qui fumaient longtemps contre la flamme.
"Un matin, une grande nouvelle courut dans la région: le conseil du village avait décidé de faire abattre la futaie. Vingt bûcherons étaient déjà engagés. Il était temps, semble-t-il, de tourner la page, et de mettre fin aux rumeurs de malédiction.
Le bois diminuait chaque jour, perdant ses arbres abattus comme une armée perd ses soldats. Râakim ne s’en allait plus ; il restait là du matin au soir, contemplant, immobile et les mains derrière le dos, la mort lente de la futaie. Quand un arbre tombait, il posait le pied dessus, ainsi que sur le cadavre d’un ennemi vaincu. Puis il levait les yeux sur le suivant, avec une sorte d’impatience secrète et calme, comme s’il eut attendu, espérer quelque chose à la fin de ce massacre... "
Post by Hasam Sabbah, AdM - August 17, 2005 at 9:00 PM
Ayant fini sa tirade, presque haletant, il s’en retourna prêt de ses deux amis, un petit sourire aux lèvres. Son compagnon, une demi-elfe au teint très pale, la capuche de sa tunique posée négligemment sur sa chevelure blonde, se leva a sont tour, fis quelques pas en direction du feu, et pris la parole.
"Aujourd’hui, je suis allé voir, avec quelques amis, le vieil ermite installé sur un ancien tumulus couvert de grands arbres, au milieu de la vaste plaine qui va de la province d’Ardoria à celle de Santeney. En revenant, nous parlions de ces singuliers solitaires, nombreux autrefois, et dont la race aujourd’hui disparaît. Nous cherchions à déterminer la nature des chagrins qui poussaient jadis les hommes dans les solitudes.
C’est alors que l’une de mes cousines, Vildrie, dit tout à coup:"
Sa voix se fit chantante, alors qu’elle retirait la capuche qui cachait les reflets dorés de ses cheveux:
"J’ai connu deux solitaires dans ma vie: un homme et une femme. La femme doit encore être vivante. Elle habitait au milieu d’une plaine absolument déserte, à 15 ou 20 km de toute habitation. Elle vivait là avec une bonne, et j’allais la voir de temps en temps. Elle avait certainement été une femme du monde distingué ; car elle me reçut avec politesse et même avec bonne grâce, mais hélas, je ne sais rien d’elle, et je ne pus rien deviné.
"Quand à l’homme, je vais vous raconter sa sinistre aventure…
Retournez vous, vous apercevez là-bas un mont pointu et boisé qui se détache à l’horizon. Il vivait au sommet d’un mont semblable à celui-ci. On l’appelait, dans le pays, le mont des serpents. C’est la que vivait mon solitaire, dans les murs d’un petit temple antique, il y a 2 ans environ.
"Ayant entendu parler de lui, je me décidai à faire sa connaissance. Je partis à cheval, un matin de printemps. Laissant ma bête à l’auberge, je me mis à gravir à pied ce singulier cône, haut peut-être de 150 à 200 m. Le sol y est pierreux et on voit souvent glisser sur les cailloux de longues couleuvres qui disparaissent dans les herbes. De là, sûrement, ce surnom bien mérité de mont des Serpents: certains jours, les reptiles semblent vous naître sous les pieds, quand on gravit la pente exposé au soleil ! Il sont si nombreux que l’on n’ose plus marché et qu’on éprouve une gêne singulière, non pas une peur, car ces bêtes sont inoffensives, mais une sorte d’effroi mystique.
La conteuse fit une pause, laissant les personnes qui l’entouraient s’imprégner de l’atmosphère de son récit.
"Donc, un matin de printemps, j’y grimpais, sous prétexte d’admirer le pays. En arrivant au sommet, j’aperçu en effet des murs et, assis sur un pierre, un homme. Il n’avait guère plus de 35 ou 40 ans. Il caressait un chat roulé sur ses genoux et ne semblait point prendre garde à moi. Je fis le tour des ruines, dont une partie couverte et fermé aux moyens de branches, de paille, d’herbes et de cailloux, était habité par lui.
Je revins de son coté. La vue était admirable.
Apres un instant de silence, je murmurai: « Dieu.. C’est beau ! ».
L’homme leva la tête et dit: « Oui, mais quand on voit ça toute la journée, c’est monotone ». Donc il parlait, il causait et il s’ennuyait, mon solitaire. Je le tenais !
"Je ne restai pas longtemps ce jour-la, et je m’efforçai seulement de découvrir la couleur de sa misanthropie. Il me fit surtout l’effet d’un être fatigué des autres, las de tout, irrémédiablement désillusionné et dégoûté, de lui-même comme du reste. Je le quittai après une demi-heure d’entretien. Mais je revins huit jours plus tard, et encore une fois la semaine suivante, puis toutes les semaines, si bien qu’avant trois mois, nous étions comme amis. Or, un soir, je jugeai le moment venu et j’emportai des provisions pour dîner avec lui sur le mont des serpents.
"Mon solitaire m’accueillit avec une joie visible, et il consentit volontiers à partager mon dîner. Je lui fis boire un peu de vin, dont il avait perdu l’habitude ; il s’anima, et se mit à parler de sa vie passée. Il était arrivé depuis un moment dans la région, et avait auparavant vécu en garçon heureux, me semblait-il.
Je me décidai, et lui dis brusquement: « Quelle drôle d’idée vous avez eut de venir vous percher sur ce sommet ! »
Post by Hasam Sabbah, AdM - August 18, 2005 at 2:36 PM
Un silence. Un instant. Puis une voix grave se fait entendre.
C’était le dernier postulant, un humain au physique impressionnant dont le visage était parcouru par une cicatrice qui allait du menton jusqu’à l’oreille:
"Ah !! C’est que j’ai reçu la plus rude secousse que puisse recevoir un homme. Mais pourquoi vous cacher ce malheur ? Il vous fera me plaindre, peut-être ! Et puis… je ne l’ai jamais dit à personne… jamais… et je voudrai savoir… une fois… ce qu’en pense un autre… et comment il le juge.
"Né à Ardoria, élevé à Ardoria, je vécus et grandis dans cette ville. J’avais mené, dès mon plus jeune age, une vie de garçon. Vous savez… Libre et sans devoir, résolu à ne point prendre de femme légitime, je passais tantôt trois mois avec l’une, tantôt une semaine avec l’autre, puis un an sans compagne, butinant sur la masse des filles à prendre ou à vendre. Cette existence médiocre, et banale si vous voulez, me convenait, satisfaisait mes goûts naturels de changement et de badauderie. Je vivais sur les places, dans les maisons closes et les tavernes, toujours dehors, presque sans domicile, bien que proprement logé. J’étais un de ces milliers d’êtres qui se laissaient flotter comme des feuilles aux vents, pour qui les murs de la ville sont les murs du monde, et qui n’ont souci de rien, n’ayant de passion pour rien. J’étais ce qu’on appelle un bon garçon, sans qualités et sans défauts. Voilà. Et je me juge exactement.
"Donc, de quinze à trente ou trente-cinq ans, mon existence s’écoula lente et rapide, sans aucun évènement marquant. Comme elles vont vites, les années monotones d’Ardoria, où n’entre dans l’esprit aucun de ces souvenirs qui font date, ces années longues et pressées, banales et gaies, où l’on boit, mange et rit sans savoir pourquoi, les lèvres tendu vers tout ce qui se goûte et tout ce qui s’embrasse, sans avoir envi de rien ! J’étais jeune. Mais j’étais vieux, et cela sans avoir rien fait de ce que font les autres ; sans aucune attache, aucune racine, aucun lien, presque sans amis, sans parents, sans femme, sans enfants.
"Le soir de mes 40 ans, pour fêter cet anniversaire, je m’offris, à moi tout seul, un bon dîner dans une belle taverne. J’étais un solitaire dans le monde ; et je jugeai plaisant de célébrer cette date en solitaire.
Celle qui prenait soin de ma table était toute jeune, jolie et rieuse. Je lui offris une consommation qu’elle accepta tout de suite. Elle s’assit en face de moi et me regarda de son œil exercé, sans savoir à quel genre de mâle elle avait affaire. C’était une blonde, une fraîche, toute fraîche créature qu’on devinait rose et potelée sous l’étoffe gonflée du corsage. Je lui dis les choses galantes et bêtes qu’on dit à ces êtres-là ; et comme elle était vraiment très charmante, l’idée me vint soudain de l’emmener... toujours pour fêter ma quarantaine. Ce ne fut ni long ni difficile. Je demeurai donc là, toute la soirée, à l’attendre.
"Pardonnez-moi ces détails grossiers ; mais ceux qui n’ont pas aimé poétiquement prennent et choisissent les femmes comme on choisit une côtelette de bœuf: sans s’occuper autre chose que de la qualité de leur chair.
"Donc, je l’emmenai chez elle, car j’ai le respect de mes draps. C’était un petit logis, propre et pauvre ; et j’y passai deux heures charmantes. Elle avait, cette petite, une grâce et une gentillesse rares.
"Comme j’allais partir, je m’avançais vers la cheminée afin d’y déposer le cadeau réglementaire, je vis alors vaguement quelques décorations sous globe, un vase de fleurs et deux petits tableaux. Je me penchai, par hasard, vers un portrait, et je demeurai interdit, trop surpris pour comprendre… C’était le mien, un de mes premiers portraits, que j’avais fait faire par un artisan d’une ville voisine. Je le saisis brusquement, pour l’examiner de plus près. Je ne me trompais point… Et j’eus envie de rire, tant la chose me paraissait inattendue et drôle.
"Je demandai: « Qu’est ce que c’est que ce monsieur la ? ».
Elle répondit: « C’est mon père, que je n’ai pas connu. Maman me l’a laissé en me disant de le garder, que ça me servirait peut-être un jour… ».
Elle hésitait, et se mit à rire, puis reprit: « Je ne sais pas à quoi. Je ne pense pas qu’il vienne me reconnaître maintenant. »
"Mon cœur battait, précipité, comme le galop d’un cheval emporté. Je remis l’image a plat sur la cheminée, je posais dessus, sans même savoir ce que je faisais, les deux bourses qui pendait a ma taille, et me sauvait en m’écriant: « A bientôt… Au revoir… Ma chérie… Au revoir ».
J’entendis qu’elle répondait: « A demain ».
"Lorsque je sortis, je m’aperçus qu’il pleuvait, et je partis à grands pas, par une rue quelconque. Ma fille… Ma propre fille !!
"Ainsi, j’étais le digne fils de mon père. J’avais fait, sans le vouloir, sans le savoir, la même chose que cet être ignoble. J’étais entré dans la couche de ma fille ! Je faillis me jeter à l’eau. J’étais comme fou ! J’errais jusqu’au petit matin, puis je revins chez moi pour réfléchir. Je fis alors ce qui me paraissait le plus sage: je disparus.
"Et c’est en errant sur ce rivage que j’ai trouvé ce mont, et je m’y suis arrêté. Jusqu’à quand, je l’ignore."
*L’humain se leva alors, et se tourna vers le feu, les yeux brillants, comme s’il eut été en train de pleurer. *
"Assis sur une pierre, l’autre jour, devant les ruines qui me servaient de maison, en plein soleil, je contemplais une corbeille d’anémone fleurie.
"Assis sur une pierre, je caressais un grand chat blanc, installé sur mes genoux. Il faisait chaud ; une odeur de fleurs nouvelles, odeur timide encore, intermittente, légère, passait dans l’air, où passaient aussi parfois des frissons froids venus de ces grands sommets blancs que j’apercevais là-bas.
Mais le soleil était brûlant, aigu, un de ces soleils qui fouille la terre et la font vivre, qui fendent les graines pour animer les germes endormis, et les bourgeons pour que s’ouvrent les jeunes feuilles. Le chat se roulait sur mes genoux, sur le dos, les pattes en l’air, ouvrant et fermant ses griffes, montrant sous ses lèvres ses crocs pointus et ses yeux verts dans la fente presque clause de ses paupières. Je caressais et je maniais la bête molle et nerveuse, souple comme une étoffe de soie, douce, chaude, délicieuse et dangereuse. Elle ronronnait, ravie et prête à mordre, car elle aime griffer autant qu’être flattée. Elle tendait son cou, ondulait, et quand je cessais de la toucher, se redressait et poussait sa tête sous ma main levée."
Comme si quelques esprits malin voulaient faire peur aux conseils réuni en cercle autour du feu, un petit chat, noir celui la, émit un miaulement et vint se coucher contre la flamme, ne prêtant pas la moindre attention a tous les yeux qui le regardaient avec stupeur.
"C’est sur cette pierre qu’un matin, je fis la connaissance de Vildrie, jeune femme que je n’ai pu posséder, et que voici"
*Son doigt se leva alors, montrant la demi-elfe qui était assise, jouant mélodieusement de la harpe. *
** "C’est encore sur cette même pierre que je suis tombé malade. Notre rencontre, enfin, a eut lieu alors que j’étais assis ici." **
Il fit alors une pause, baissant la tête, et murmura son nom :
"Sahib-Khabar… "
Post by Hasam Sabbah, AdM - August 23, 2005 at 8:29 PM
*Le malaise grandissait. Tout le monde essayait de comprendre, de mettre en relation les différentes choses qui s’étaient dites. Le premier homme se leva alors, et repris, le regard lointain : *
"Sahib-Khabar s’ennuyait fort au sommet de ce mont. Il laissait souvent promener son regard à la lisière du bois, sorte de foret de pins éventés par toutes les brises de l’hiver. Il y rencontra un homme qui y venait aussi les soirs de solitude, respirer l’air frais sous les arbres.
Comment se sont-ils trouvés ? Le sait-on ?
"Ils se rencontraient, ils se regardaient, et quand ils ne se voyaient plus, ils pensaient l’un à l’autre, sans doute. A force de se rencontrer, ils sourirent en se revoyant, peut-être ; et à force de se revoir, ils s’imaginèrent qu’ils se connaissaient. Un soir, ils se saluèrent assurément, furent surpris, et s’inclinèrent, un peu… Si peu, tout juste ce qu’il fallait pour ne pas être impolis. Mais au bout de quinze jours, le salut était devenu naturel, de loin.
"Ils se parlèrent, ensuite. De quoi ? Du couché de soleil, sans aucun doute. Et ils l’admirèrent ensemble, en le regardant au fond de leurs yeux plus souvent qu’à l’horizon. Et tous les soirs, semaines après semaines, ce fût le prétexte banal et persistant d’une causerie de quelques minutes. Puis ils osèrent faire quelques pas ensemble en s’entretenant de sujets quelconques ; mais leurs yeux déjà se disaient mille choses plus intimes, de ces choses secrètes, charmantes, dont on voit le reflet dans la douceur, dans l’émotion du regard, et qui font battre le cœur, car elles confessent l’âme, mieux qu’un aveux. "
*Alors que celui qui venait de parler se rassis, le colosse, levant la tête, comme s’il défiait le ciel, dis soudain, avec force: *
"Mon ami, mon frère, je suis malade et je me meurs ; Mais je… je veux que me soit exaucé un dernier vœux: que l’on m’emmène loin de cette terre, cette terre si basse… Car tel un vent violent, je veux vivre au dessus de vous, voisin de l’aigle, voisin des neiges, voisin du soleil, car c’est ainsi que vivent les vents violents. Et, tel un vent violent, je veux encore souffler parmi vous, et, par mon esprit, couper le souffle à votre esprit: c’est mon avenir qui le veut. Vrai, je suis un vent violent pour les plaines et pour les creux, et tel est mon conseil à mes ennemis, à tous ceux qui bavent et crachent: gardez-vous de cracher contre le vent…
"Aujourd’hui, je meurs. Mais avant ça, je te libère. Va, Sahib-Khabar. Va. Et n’ai pas peur, car maintenant, tu n’es plus seul. "
C’est ainsi que nos les trois conteurs, tout sourire, firent une révérence en direction de Dame Naomie d’Atango, satisfaits d’eux même: leur prestation eut l’effet escompté ; tout le monde s’interrogeait, essayait de comprendre, et cela durerait encore plusieurs jours.
Dame Naomie d’Atango appris plus tard que la jeune demi elfe était bien Vildrie, celle qui avait rencontré l’ermite, ses deux compagnons étant ses demi-frères.
Rares étaient ceux qui avait compris que le jeune enfant, jouant avec une pomme de terre, le jeune homme qui aimait à goûter aux plaisirs que la vie offrait, et, enfin, l'ermite, assis sur une pierre, était le meme homme. Si l'on ne tenait pas compte des quelques visites de Vildrie, l'ermite n'avait jamais eut de visites, apprirent ils plus tard. Qui Diable alors l'ermite avait rencontré, au sommet du mont des serpents ? Un dieu ? Un diable, peut-être.. A moins que ce ne soit lui même..?
Ce qu’elle ne sut pas, c’est que Sahib-Khabar, ce nom, était faux, n’avait jamais existé, à la différence de celui d'Hasam Sabbah…