Dans le bureau de l'intendant

Dans le bureau de l'intendant

Post by Cornelius Aigrepont, Ind - August 10, 2008 at 5:11 AM

Alors que poignaient les premiers indices de nuages menaçants ne pouvant que promettre des pluies copieuses pour les prochaines heures et que le soleil achevait de léguer sa place privilégiée à la lune, alors que la plupart des Systériens éteignaient les bougies et mettaient leurs enfants au lit, le diplomate Aigrepont arpentait les couloirs à peine éclairés du palais impérial. La faible lueur des torches n'offraient qu'une piètre visibilité. Il fallait faire extrêmement attention pour ne pas se prendre les pieds dans le relief inégal du plancher de pierres. Un déferlement torentiel d'eau s'abattit brusquement sur l'énorme structure de pierre alors que Cornelius accélérait le pas.

Il dut recourir à un sort de bouclier pour se protéger de la pluie et passa sur les remparts pour se diriger vers une lourde porte de chêne. Levant le sortilège dont il s'était affublé, il cogna trois fois contre la porte.

C'était celle du bureau de l'Intendant Bolton.

Aussitôt qu'il fut entré, il entra rapidement en la matière.

-Intendant Bolton, je veux être muté. Il ne se passe plus rien dans la branche diplomatique, et j'ai bien peur de ne pas être à la hauteur de la situation. Je ne puis plus me figurer de nouveaux projets pour la faire revivre. Je me demandais donc si vous m'accorderiez la permission de démissionner et de déposer ma candidature pour un poste dans la branche artistique, éventuellement à l'organisation d'événements.

Il attendait la réponse, debout dans le pas de la porte.


Post by Thomas Bolton, Emp - August 10, 2008 at 1:40 PM

L’Intendant épluchait différents dossiers quand Cornelius entra dans son bureau pour se lancer dans un bref monologue. Fidèle à lui-même, le baron ne cilla pas d’un pouce, ne lui lança pas même un regard et continuait les tâches qu’il s’était astreint. Thomas donnait l’impression de ne pas avoir remarqué le diplomate, bien que ce fut totalement impossible – le fonctionnaire ne pouvait être dupe, il avait rencontré son supérieur bien souvent.

Toujours est-il qu’au bout d’une minute – qui, au demeurant, semblait s’étirer sur une heure – le ministre releva son regard d’acier pour le braquer sur les prunelles de son subalterne. Il le considéra pendant plusieurs secondes, aucune expression ne venant s’imprimer sur son visage. Lentement, sa main se dirigea vers un tas de documents en tout genre qui trônait sur un coin de son bureau.

« Bien le bonjour, monsieur Aigrepont. »

Un formulaire fut tiré de la pile. Déjà rédigé, semblait-il.

« Voici votre demande de mutation, dûment complétée. Vous trouverez ci-joint une lettre de recommandation à l’attention de ma collègue, la comtesse Mel’Viir. Vous saurez en faire bon usage. »

Tiens donc ! L’Intendant semblait avoir tout prévu. En réalité, cela faisait déjà quelques mois qu’il songeait à le faire muter, mais la supervision Hattori avait gelé le processus. Dommage que les échanges n’aient pu aller plus loin, mais Thomas s’en contenterait.

Jamais il n’avait oublié leur première rencontre : ce systérien au style brégunien, imbu de lui-même, juché sur le piédestal de son amour-propre. Il ne faisait pas un bon diplomate, mais il fait un pion parfait. Des vacances lui feraient le plus grand bien.

« Inutile de vous rappeler que les dossiers dont vous avez eu connaissance sont confidentiels, monsieur Aigrepont. Voulez-vous ajouter autre chose ? »

Pendant que le silence s’installait, le baron appliqua son sceau sur le papier et le tendit avec la lettre vers celui qui était autrefois diplomate. Voici ce qu’elle disait…

Madame le Chancelier des Universités,

Par la présente, je vous recommande le dénommé Cornelius Aigrepont ayant travaillé dans la branche consulaire de l’administration impériale, en tant que diplomate durant plusieurs années. Dans le cadre de cette fonction, monsieur Aigrepont a été amené à réaliser les missions suivantes :

Ces travaux lui ont donc permis d’acquérir un sens aigu des responsabilités et un esprit d’analyse à toute épreuve, à l’aide des compétences développées qu’il avait déjà su mettre en avant telle que sa maîtrise de la langue et son dynamisme. Durant tout le temps qu’il a passé au sein de l’ambassade, monsieur Aigrepont a su faire preuve d’intelligence. En outre, son travail s’est avéré fructueux.

Veuillez agréer, Votre Grandeur, l'assurance de mon respect le plus sincère,
T. H. Bolton, Intendant de l’Empire

La balle était dans le camp de Cornelius…


Post by Cornelius Aigrepont, Ind - August 11, 2008 at 7:35 PM

-À tout le moins, Intendant Bolton, on peut sans crainte vous affubler du qualificatif de clairvoyant. J'en comprends que vous prévoyiez déjà me muter dans la branche culturelle.

Nos relations dans la branche diplomatique furent, il faut le souligner, tumultueuses, mais j'ai bon espoir qu'elles ne s'arrêtent pas là. Vu votre poste, il est tout à fait possible que nous ayions encore à travailler de concert.

Sans rien dire de plus, Cornelius se saisit des documents et de la lettre de recommandation. Puis, avant de partir, il ajouta quelque chose.

-J'ose faire remarquer que la lettre que vous me tendez aujourd'hui n'est pas exempte d'une certaine pointe d'hypocrisie. Il est agréable de voir que vous avez à coeur ma réussite dans l'Empire, bien que j'aie l'intime conviction que l'intégralité de ladite référence ne soit pas forcément sincère. Je vous souhaite la bonne journée.

S'inclinant comme à son habitude, en relevant quelque peu son chapeau à plumes, Cornelius fit un sourire quelque peu outrecuidant avant de prendre congé de l'intendant.


Post by Thomas Bolton, Emp - August 11, 2008 at 8:02 PM

Devant la porte du bureau se tenait le secrétaire particulier de l'Intendant, monsieur Cressen. Ce dernier bloquait le passage, ce qui permit à Thomas de réagir une dernière fois.

« Je ne vois aucune hypocrise, monsieur Aigrepont. Vous avez constitué toute sorte de dossier, je n'ai simplement pas précisé que la plupart de vos idées étaient inadéquates, ce qui, je crois, n'a pas besoin de figurer dans une lettre de ce type. »

Puis, d'un simple signe de la main, il signifia à son ancien employé qu'il pouvait prendre congé. Cressen fit un pas de côté et ouvrit en grand la lourde porte de métal...