Du remue-ménage aux cuisines
Post by Mundus, près de Thaar - April 10, 2007 at 11:47 AM
Le Chancelier, après avoir quitté l’Impératrice, alla à son bureau et y resta jusqu’à très tard dans la nuit. Pour tout dire, il ne dormit pas. Installé sur sa chaise, les yeux dans le vague, il restait dans un silence de mort. Se tapotant de temps à autres les lèvres de son index et majeur droits, on voyait parfois les traits de son visage se modifier, comme sous le coup d’une profonde réflexion. C’était effectivement le cas, Mundus s’interrogeait. La scène qu’il venait de voir ne lui disait rien qui vaille. Après tout, c’était peut-être un simple problème d’aigreur d’estomac. Mais quand même, ça le travaillait, il ne pouvait pas s’en empêcher.
Plus il réfléchissait, plus il pensait qu’il fallait être prudent. La situation était réellement explosive, avec les conflits dans le Cercle et les paladins qui perdaient un de leur chef. Bon évidemment, pour le mage, la perte de Kalidor, ce n’était pas grand-chose, mais il n’était pas bête : il savait qu’il pouvait être apprécié et un chef apprécié, s’il est éconduit, ça peut dégénérer. Mundus espérait que ce ne soit que pure paranoïa. Quoiqu’il en soit, ça faisait beaucoup de raisons pour renforcer la protection de l’Impératrice et ça, on ne lui ôterait pas l’idée de si tôt ! Il attendit cinq heures du matin, il n’avait besoin de sommeil pour ce soir.
Il ouvrit la porte de son bureau, dévala les marches quatre à quatre, visiblement pressé. Il avait l’habitude de courir tous les matins, c’était juste le terrain qui changeait, cette fois-là. Après avoir traversé de grands couloirs, descendu de petits escaliers, ouvert quelques portes, il se déboula dans les cuisines, avec force bruits et fracas. Le cuisinier, ses aides et les domestiques étaient déjà debout à travailler. Ils venaient d’émerger d’un sommeil réparateur et s’activaient comme d’habitude dans le palais pour le rendre pimpant et satisfaire à l’estomac de Sa Majesté Impériale. Le voyant, le cuisinier s’exclama :
- Bah alors, Chancelier Mundus ? Qu’est-ce qui se passe ? D’habitude, on ne vous attend pas avant cinq heures trente ! On n’a pas eu le temps de préparer le jeu de carte ni votre assiette de boudins.
- Ah t’es bien gentil de me le proposer mon gars. Non ce matin, j’viens pas pour jouer aux cartes avec vous, mais plutôt pour discuter d’trucs louches, tu vois ?
- Oh. Bah heu si vous voulez, hein. Qu’est-ce qui vous ferait plaisir ?
- T’es le seul à préparer les plats ? Tu les surveilles bien, quand même, tes p’tits gars, j’espère ?
- Ouh, la, ça ne va pas la tête ? Je suis tout seul, je ne peux pas espérer préparer à bouffer pour tout le palais. J’ai mes aides avec moi. Les surveiller ? Bah heu… disons que oui. Un peu. Quand même, quoi.
- Ouais, donc en gros tu les regardes pas. Tu les laisses faire. Dis-moi, mon gars, crois bien que je suis désolé de faire ça, mais ça t’incitera peut-être à devenir un peu plus prudent. T’as combien de gamins ?
Le cuisinier fronça les sourcils, suspectant quelque chose de pas net de la part du Chancelier. Mundus ne s’excusait jamais, enfin quasiment jamais. Et quand il le faisait à l’avance, on avait tout à craindre ! Il finit par donner la réponse, après un petit temps de réflexion. Autant être franc, mentir ne lui servirait pas à grand-chose.
- 5 bons gars, Chancelier Mundus ! Les meilleurs que j’connaisse en tout cas, ce sont mes bonhommes à moi. Ils bossent dans les chambres, ce ne sont pas des costaud.
- Ah ? Ils sont pas costauds ? Mais c’est parfait ça, mon vieux. Tes fils viennent de recevoir une promotion ! Ils deviennent goûteurs officiels de Sa Majesté. Tous les plats que toi et tes aides de cuisine vous préparez, ça passe par leur bouche.
- Ah. Bah ils ont le choix ?
- Evidemment que non ! Allez, à la revoyure les gars !
Mundus s’en repartit, visiblement satisfait. Le meilleur moyen de s’assurer que les plats ne seraient pas empoisonnés et que la sécurité soit renforcée aux cuisines, c’est de placer les fils du cuisinier à la fonction de goûteur. C’était certes machiavélique, le mage avait mit du temps avant de trouver cette solution, ça ne faisait pas partie de sa façon de penser. C’était même à l’exact opposé. Mais bon, au moins c’était un côté de la sécurité qui était renforcé. Mundus était plutôt content de lui, ça ferait une porte de fermée par laquelle aucun malade ou fou de pouvoir ne pourrait passer…
Bien évidemment, toutes les personnes du palais entendirent parler des actions du Chancelier.